P-au-P, 10 mai 2010 [AlterPresse] --- La plateforme de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda) proteste contre la décision du gouvernement haïtien de céder 60% des actions de la compagnie nationale de télécommunications (Téléco) à la compagnie vietnamienne Viettel.
Le « contrat de modernisation » paraphé la semaine dernière entre la Banque Centrale et la compagnie de télécommunications Viettel s’élève à un montant de 59 millions de dollars.
Le secrétaire exécutif de la Papda, Camille Chalmers, estime qu’il y a eu « une sous-évaluation des actions de la Téléco » et affirme craindre « une vague de privatisations » avec la probabilité que les ports, les aéroports, la banque nationale de crédit, entre autres, soient les prochaines institutions sur la liste à être « liquidées ».
« C’est une décision très grave qui exprime une tendance à remettre les actifs de l’Etat à des entreprises transnationales », déclare Chalmers lors d’une conférence de presse le 6 mai.
« C’est cette tendance qui va dominer les décisions économiques qui seront probablement prises au cours des 2 prochaines années compte tenu du poids de la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti (Cirh) et compte tenu du poids de la banque mondiale au sein de cette commission, les institutions financières internationales ayant toujours voulu la privatisation des entreprises publiques », analyse-t-il.
La Papda qui qualifie la décision du gouvernement d’ « irresponsable » croit qu’il faut s’attendre à ce que le pays perde certains outils stratégiques de développement.
« Le secteur des télécommunications a toujours été un secteur stratégique… et c’est un secteur qui peut jouer un rôle clé dans la mesure où ses services sont vitaux pour le développement d’autres secteurs comme par exemple l’éducation ou la santé publique. En général en Haïti on peut dire que les télécommunications jouent un rôle très important dans une véritable stratégie d’intégration sociale », relève-t-il.
Lors de la cérémonie de signature du contrat de modernisation, le président de la Banque Centrale, Charles Castel, a soutenu que l’Etat n’avait pas d’autre choix, la Teleco étant depuis des années déficitaire. La Banque Centrale aurait par exemple déboursé jusqu’à 675 millions de gourdes pour réduire le personnel de cette entreprise jugé trop nombreux.
« C’est une contre-vérité. Minoterie, Ciment d’Haïti et Téléco ne sont pas des entreprises déficitaires. La Téléco jusqu’à récemment transférait des sommes au Trésor public, donc c’était une entreprise rentable contrairement a l’électricité d’Haïti (Edh) qui est réellement déficitaire », soutient le secrétaire exécutif de la Papda.
Camille Chalmers a de plus affirmé qu’il faut s’attendre à « des conséquences très désastreuses » découlant de cette vente tout en rappelant les échecs de la privation d’entreprises de l’Etat en Amérique latine, notamment en Colombie et en Argentine.
En attendant des ingénieurs vietnamiens sont déjà en Haïti pour travailler sur le réseau afin de rétablir le service à la clientèle. Les nouvelles structures de la Téléco, rebaptisée Natcom, seront mises en place au cours d’une période de transition de 2 mois. [kft gp apr 10/05/2010 14:00]