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Haïti-Séisme : Petit-Goâve, entre les décombres et la mer

Par Wooldy Edson Louidor

P-au-P., 9 fév. 09 [AlterPresse] --- La population de Petit-Goâve, ville située à environ 60 kilomètres au sud de Port-au-Prince, se sent livrée à elle-même après le séisme du 12 janvier dernier, selon les témoignages recueillis sur place par l’agence en ligne AlterPresse.

La mer a franchi plusieurs mètres à l’intérieur des terres

Alors que les deux principales artères du centre-ville de Petit-Goâve, la grand-rue et la rue Saint-Paul, sont encore occupées par des décombres, Ti Ginen, localité située au sud de la ville, est envahie par la mer.

Comme effet du puissant tremblement de terre dont l’épicentre s’est situé à Léogane, ville voisine de Petit-Goave, la mer a franchi plusieurs mètres à l’intérieur des terres, rendant impossible la récupération des maisons situées dans cette localité.

Tout comme d’autres régions du département de l’Ouest et du Sud-est, les dégâts matériels enregistrés à Petit-Goave sont considérables : résidences, bureaux étatiques, dépôts de marchandises, bâtiments scolaires, bibliothèque municipale, hôpital public, banques, etc. se sont effondrés, alors que d’autres édifices ont subi de graves dommages et d’importantes fissures.

Par exemple, il ne reste du bâtiment de l’Eglise catholique « Notre Dame » de Petit-Goâve que des murs très fragilisés et le clocher.

Ce temple accueille, le 15 août de chaque année, des milliers de pèlerins de tout le pays et de la diaspora venus célébrer Notre Dame de l’Assomption.

L’Hôtel de Ville , en l’occurrence la Mairie (photo ci-contre), est sur le point de craquer, alors que l’élégant Hôtel « Relais de l’Empereur » (photo précédente) est réduit en ruines.

Petit-Goâve, vaste camp de réfugiés

La ville de Petit-Goâve s’est convertie en un vaste centre de réfugiés, où des tentes de fortunes faites de draps sont installées dans presque toutes les rues, transformées pratiquement en lieu d’habitation de la population.

Parallèlement, des sinistrés qui ont perdu leurs maisons ont construit des camps de réfugiés aux environs de la ville.

Les gens qui dorment dans ces tentes improvisées ne sont pas à l’abri de la pluie ; les enfants et les personnes âgées sont sous la menace constante d’attraper des maladies (surtout respiratoires) suite à des nuits trop fraîches.

« Le plus urgent maintenant pour nous à Petit-Goâve, c’est d’avoir des tentes », insistent plusieurs habitants de la zone.

Le camp le plus grand, situé à la Rue Bijoux dans le local du Collège Pierre Mendès France, compte 550 femmes, 475 hommes et 430 enfants, selon les informations fournies par deux membres de coordination de ce centre de réfugiés.

Plusieurs familles ont choisi d’abandonner ces centres pour aller s’installer dans des lieux très souvent inappropriés, mais moins insalubres et plus protégés contre la pluie.

Par exemple, des habitants de Ti Ginen retournent dans leur quartier et y construisent des abris en tôle près de leurs anciennes maisons, mais à proximité de la mer.

Un contingent de « marines » américains, des organisations internationales et quelques églises chrétiennes s’occupent de faire arriver à Petit-Goave de la nourriture, de l’eau potable et des médicaments.

Les enfants, premières victimes

Les conditions de vie dans ces camps sont très précaires et les enfants sont les premières victimes de la situation caractérisée par l’absence d’hygiène.

« Ces camps sont le foyer de maladies infectieuses et d’épidémies qui affectent les enfants », explique Joël Charles, administrateur de l’hôpital public « Notre Dame » de Petit-Goâve, qui prévoit une aggravation de la situation sanitaire durant la saison des pluies.

Entre 200 et 300 parents viennent actuellement à l’Hôpital pour faire ausculter leurs enfants, atteints surtout de diarrhée, de vomissement et de fièvre, fait-il savoir.

Mais peu d’enfants arrivent à recevoir effectivement des soins médicaux, en raison du manque de pédiatres disponibles et des limitations en termes d’horaire des consultations, fixées entre 8 heures du matin et 4 heures de l’après-midi.

Le plus grand centre de santé de la ville ne compte pas assez de pédiatres pour fournir des soins de santé appropriés aux jeunes patients.

Les spécialistes étrangers (américains, russes et cubains) présents ne sont pas spécialisés en pédiatrie, mais plutôt en chirurgie et orthopédie.

Les consultations se réalisent sous une tente et en plein air, et une clinique de campagne accueille les patients, dont des blessés graves, qui sont sous surveillance médicale.

Le matériel et les équipements médicaux et de laboratoire, qui se trouvaient dans l’enceinte de l’Hôpital, ont été endommagés. D’où l’impossibilité pour les médecins de diagnostiquer avec précision les cas auscultés.

Vu ce manque de ressources humaines et matérielles, la direction de l’Hôpital se voit dans l’impossibilité de lancer une campagne de vaccination qui pourrait aider à prévenir certaines maladies, regrette l’administrateur. Il dénonce l’abandon dont est victime cette structure sanitaire publique.

En outre, une grande partie du personnel, notamment « les contractuels », est démobilisée parce que l’État haïtien leur doit des arriérés de salaires, ajoute-t-il. [wel gp apr 09/02/2010 00 :30]