Español English French Kwéyol

Suspens, peu avant un rassemblement public anti-gouvernemental à Port-au-Prince

P-au-P., 14 nov. 03 [AlterPresse] --- Le Groupe des 184, regroupement ainsi nommé à partir de la quantité d’associations et d’institutions qui l’ont initialement formé, se propose de présenter à la nation haïtienne une proposition de « sortie de crise », lors d’un rassemblement prévu ce 14 novembre au cœur de Port-au-Prince.

Un suspens intense règne à Port-au-Prince dans divers milieux, peu avant cette action, perçue comme un défi pour plusieurs franges de la population opposées au pouvoir du Président Jean Bertrand Aristide et un test important pour le gouvernement et la police.

« Le message est passé et nous sentons que la population fait preuve de réceptivité », a déclaré l’industriel André Apaid, Coordonnateur du Groupe des 184, qui s’est montré confiant. Tout dérapage, a-t-il averti, serait de la responsabilité du président Jean Bertrand Aristide.

Le Premier Ministre Yvon Neptune a fait savoir que la sécurité du rassemblement sera assurée. Il a cependant averti que « si un citoyen sort du cadre de la loi », la police aura à « intervenir pour rétablir l’ordre ».

Une dernière réunion des dirigeants du Groupe 184 avec la direction de la police n’a, cependant, pas pu avoir lieu ce 13 novembre. Apaid a attribué le rendez-vous manqué à une "confusion", qui ne laisse pas « l’impression » que la Directrice Générale de la Police, Jocelyne Pierre, « endosse ses responsabilités ».

Au cours de la semaine, la direction départementale de la police a toutefois indiqué avoir pris toutes les mesures appropriées. Elle a refusé de commenter les annonces publiques d’un contre-mouvement en faveur du pouvoir, non loin du lieu prévu pour le rassemblement du Groupe des 184.

De nombreuses organisations politiques et associations de divers secteurs ont exprimé leur appui à l’initiative et appelé leurs membres à y prendre part.

Les partis de la Convergence Démocratique ainsi que les autres partis d’opposition n’ont pas marchandé leur appui.

Des associations du secteur privé, dont la Chambre de Commerce et l’Association des Industries d’Haïti ont invité les patrons à libérer leurs employés avant midi, en vue du rassemblement.

Des associations socio-professionnelles, syndicales, estudiantines et de certains milieux féministes se sont également prononcés en faveur de la réunion.

Certaines organisations et plates-formes au sein des secteurs populaires n’ont pas pris position publiquement sur l’initiative du Groupe des 184.

A travers les « médias d’Etat », des parlementaires et partisans du gouvernement ont exprimé le rejet du rassemblement de ce 14 novembre.

Le pouvoir, par la voix de son porte-parole, le Secrétaire d’Etat à la Communication Mario Dupuy, a interprété cette initiative comme une "provocation".

Dès le début de la semaine, le gouvernement, secondé par la justice, a déclenché une offensive contre André Apaid, a-t-on estimé dans la presse. Alors que le Ministre de l’Intérieur, Jocelerme Privert, a soulevé la question de la nationalité étrangère de André Apaid, le cabinet d’instruction l’a convoqué pour le 12 novembre dans le cadre des meurtres perpétrés, selon les autorités, le 12 juillet à Cité Soleil, lors d’une activité du Groupe des 184.

Les deux dossiers n’ont pas été suivis d’effet. Les avocats de Apaid ont fait savoir que l’intéressé, né de parents haïtiens aux Etats-Unis où il a été élevé, détient depuis 1988 un passeport haïtien.

La Communauté internationale, à travers plusieurs diplomates, dont les représentants des Etats-Unis, de la France et du Vatican, a annoncé qu’il va observer la situation. "C’est de la responsabilité du gouvernement de respecter les droits civils et politiques des citoyens", a déclaré la Mission de l’Organisation des Etats Américains (OEA) en Haïti.

A la veille du rassemblement du Groupe des 184 à Port-au-Prince, plusieurs manifestations anti-gouvernementales ont eu lieu dans le pays et une adolescente a été tuée par la police aux Gonaives (Centre- Ouest) durant un mouvement de protestation, ont rapporté des correspondants.

Plus de mille étudiants et des centaines de partisans de l’opposition ont manifesté contre le gouvernement à Port-au-Prince. La manifestation s’est terminée prématurément, lorsque la police a tiré pour disperser la foule, alors que quelques dizaines de partisans du pouvoir tentait de perturber le mouvement.

A Jacmel, dans le Sud-est, un sit-in antigouvernemental a également eu lieu et s’est déroulé sans incidents majeurs, selon les correspondants sur place. [gp apr 14/11/2003 00:31]