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Haïti : nécessité d’un contre-pouvoir organisé et efficace

P-au-P, 12 nov. 03, [AlterPresse] --- Les évènements actuels en Haïti « mettent en péril le pouvoir contesté et contestable de Jean-Bertrand Aristide » et témoignent de l’importance de la société civile dans la transition démocratique, estime le Professeur Jacky Dahomay, membre du comité de réflexion sur les rapports France/Haïti.

Quand les forces politiques traditionnelles sont dans l’incapacité de faire respecter les libertés dans une société, il revient à la société civile (prise en tant que contre-pouvoir face à l’Etat) de crier halte, juge Jacky Dahomay, qui observe la situation haïtienne depuis de nombreuses années et a produit d’importants textes sur le sujet.

Jacky Dahomay pointe du doigt l’incapacité de l’opposition politique haïtienne à « entraîner le pays dans une dynamique de libération démocratique ». « Tout se passe comme si l’opposition, regroupée au sein de la Convergence (Â…), était dépassée sur sa gauche par une ébullition positive de la société civile représentée par le groupe des 184 (associations et institutions) », écrit Jacky Dahomay. Il souligne également « la déclaration signée par les intellectuels haïtiens et dénonçant la dérive totalitaire du régime en place ».

Jacky Dahomey croit que la société civile qui s’était constituée comme un contre pouvoir face au régime des Duvalier a été dénaturée par Aristide. Le peuple, a-t-il indiqué, est substantialisé, caractérisé notamment par ceux qui meurent de faim, ce qui interdit de le penser comme pluralité en témoigne la formule aristidienne célèbre : « la paix dans le ventre, la paix dans la tête ! ». Et par voie de conséquence la réduction de la société civile en une stricte « société de besoins ».

Jacky Dahomay dénonce, au passage, l’instauration, par le pouvoir en place, d’un climat de répression en Haïti, par des « assassinats d’opposants, de journalistes, de membres d’associations diverses », sans oublier la vassalisation de la justice, la corruption des juges et de la police « qui n’est plus qu’une garde privée d’Aristide, nouveau baron de la mafia haïtienne ».

Pour Jacky Dahomay, la voie de la solution de la crise haïtienne à moyen et long terme passe inévitablement par la dynamisation des secteurs de contre-pouvoir. « Ce n’est que si cette société civile parvient à s’organiser et à s’épanouir effectivement, que seront brisées les cadres historiques et culturels déterminant, au plan anthropologique, la persistance des dictatures depuis 1804 ». [rv gp apr 12/11/2003 05:30]