P-au-P., 15 mai 04 [AlterPresse] --- Les relations haitiano-dominicaines traversent une zone dangereuse et une grave crise n’est pas à écarter, si les autorités n’affichent pas une volonté politique pour faire face aux problèmes qui affectent les relations entre les deux pays, selon l’ancien ambassadeur d’Haiti en République Dominicaine, Guy Alexandre.
La situation actuelle est porteuse de tous les dangers, constate le diplomate dans un entretien avec AlterPresse, au lendemain de la décapitation, le 2 mai écoulé, d’un jeune Haitien à Santo Domingo.
Alexandre, qui enseigne les relations haitiano-dominicaines à la Faculté Latino-américaine de Sciences Sociales (FLACSO) de Santo Domingo, estime que les autorités des 2 pays partageant l’île ont laissé s’accumuler une suite de rancoeurs en se confinant dans des « protestations diplomatiques », sans chercher à créer les conditions pour éviter la poursuite de la dégradation des relations entre les deux communautés.
Carlo Mérilus a été décapité en présence d’une foule de personnes qui riaient et plusieurs d’entre elles filmaient la scène, qui a fait le tour de l’Internet.
Cette “barbarie” traduit une dynamique dans la remontée de l’antihaïtianisme en territoire dominicain depuis 2005, analyse Guy Alexandre. En plus d’autres cas de violations de droits humains, 3 ressortissants haïtiens ont été brûlés vifs avec de la gazoline en RD ces dernières années, ajoute-t-il.
Tous les faits de violence contre les Haïtiens en RD n’ont pas été suivis d’effets judiciaires, sauf dans un cas, rappelle Alexandre.
Pour lui, même si la décapitation du 2 mai 2009 ne parait pas être une conséquence d’une politique délibérée de l’Etat dominicain, ce dernier a pour responsabilité de mettre en branle un processus judiciaire pour punir les coupables.
Rusbert de Leon Lara, présumé auteur de la décapitation, a été remis à la police dominicaine le 7 mai. Il a injustement accusé Merilus d’avoir tué à coups de machettes son frère Francisco de Leon Lara, 43 ans.
De son coté, Haïti doit dire halte « basta », que la réactivation du sentiment antihaïtien est inacceptable, poursuit Alexandre. La société dominicaine craint les pressions venant d’Haïti ainsi que l’internationalisation du débat, soutient-il.
La main-d’oeuvre haïtienne contribue beaucoup à l’économie dominicaine, et Haïti est le deuxième partenaire commercial de la République Dominicaine. Au-delà des recherches académiques, Haïti doit se servir de ces atouts majeurs dans les négociations avec la République Dominicaine, où le laisser-faire semble prédominer en ce qui concerne les actes d’agression et autres violations des droits des migrants haïtiens, souligne Guy Alexandre.
Guy Alexandre, qui a dirigé la diplomatie haïtienne à Santo Domingo durant 8 ans, suggère de « réguler le flux migratoire, la situation des Haïtiens en République Dominicaine, définir des formules de retour en Haïti des compatriotes (rapatriement de ressortissants nationaux), formaliser les mouvements de population sur la frontière commune entre les 2 pays ».
Après la decapitation du 2 mai, des ressortissants dominicains ont blessé, le lundi 11 mai 2009 avec des armes blanches, 3 Haïtiens répondant aux noms de Eligène Exavier, Désir Rénold et Charles Nerostène près d’une ferme agricole à Karata non loin de Guayahuco (République Dominicaine).
Les victimes, mutilées dans diverses parties de leur corps, notamment une oreille tranchée chacune, ont été attaquées au moment où ils rentraient chez eux à TiLori (Haiti), après une journée de travail dans des fermes agricoles en République Dominicaine. [rc gp apr 15/05/2009 00 :30]