P-au-P, 22 avril 09 [AlterPresse] --- Le retard accumulé dans l’affichage de la liste électorale, la mesure de la police nationale interdisant la circulation des véhicules de transport public le jour du vote, la peur chez la population concernant d’éventuels actes de violence durant les opérations électorales, sont autant de facteurs qui pourraient expliquer la faible participation constatée aux élections sénatoriales partielles du 19 avril 2009, énumère la plate-forme des organisations haïtiennes des droits humains (Pohdh).
La majorité de la population haïtienne ne fait plus confiance, ni au Conseil électoral provisoire (Cep) ni aux membres du corps législatif, affirme Antonal Mortimé, secrétaire exécutif de la Pohdh, dans une conférence de presse à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.
Les élus qui sortiront de ce scrutin ne vont rien faire pour améliorer les conditions de vie des plus vulnérables, estiment plusieurs citoyens.
La Pohdh signale toutefois certains efforts consentis par le Cep pour faciliter la tenue normale de ce scrutin. La plate-forme cite la mise en place de guides pour informer les électrices et électeurs, ainsi que la mobilisation des agents de la police nationale pour sécuriser les centres de vote.
Vilès Alizar, coordinateur au Réseau national de défense des droits humains (Rnndh), membre de la Pohdh, évoque une réalité de boycottage du scrutin au sein même de l’organisme électoral. Les membres des bureaux de vote ainsi que les mandataires de partis politiques, pour la plupart, n’ont pas voté, alors qu’ils devaient le faire avant les électeurs.
Alizar fait également état de problèmes d’identification des officiers électoraux (absence de badges et de maillots spécifiques) et de la distance que devait parcourir un électeur pour trouver son centre de vote.
Les membres des bureaux de vote donnaient l’impression de n’avoir reçu aucune formation pour canaliser électrices et électeurs lors du scrutin. Au cours du vote, ils faisaient le va-et-vient, certains d’entre eux somnolaient de temps à autre. Leur attitude a découragé même ceux-là qui envisageaient de voter, déplore Alizar.
Dans l’un des centres visités à Port-au-Prince par les observateurs de la commission épiscopale nationale Justice et Paix (Jilap) de l’église catholique romaine, le taux de participation était inférieur à 1%, rapporte le père Jean Hanssens, directeur exécutif de cet organisme religieux de droits humains, également membre de la Pohdh.
Les partis politiques n’arrivent pas à se rapprocher de la population, constate le père Hanssens qui identifie, par ailleurs, divers types de violence ayant entravé la journée électorale du 19 avril.
Alors qu’à Port-au-Prince, la violence était à la fois psychologique et idéologique, dans d’autres régions du pays, comme Mirebalais (Centre), des incidents violents ont empêché la tenue de ces joutes, ajoute le directeur exécutif de Jilap.
« La menace est aussi une forme de violence. Donc, nombre de violences ont été enregistrées à Port-au-Prince à travers des menaces verbales, nombre de violences ont été enregistrées à Verrettes (Artibonite, Nord) et dans le Plateau Central », révèle le père Hanssens.
Sans citer de noms, le responsable de Justice et Paix dénonce l’implication directe de parlementaires, partis politiques et candidats dans ces turbulences.
« Nous avons vu sur le terrain des sénateurs et députés qui participaient à ces violences », explique le promoteur de droits humains.
Jean Hanssens, qui pense qu’ « il est du devoir des partis politiques de prendre leurs distances par rapport à la violence faite en leur nom », demande au Parlement de sanctionner les sénateurs et députés qui n’ont pas respecté les principes démocratiques.
Les responsables de la Pohdh exigent des sanctions pour toutes les personnes impliquées dans ces violences, notamment dans le Plateau Central où les élections ont été annulées et dans la commune de Verrettes.
Ils invitent le Cep à fixer une date pour la reprise de ces joutes tout en prenant des dispositions pour éviter la répétition d’incidents violents le jour du prochain vote.
Soulignant le manque d’expérience de l’actuel Cep, la commission Justice et Paix évoque la nécessité d’instituer le Conseil électoral permanent prescrit par la Constitution haïtienne de 1987.
Le Conseil électoral permanent est le seul qui pourrait améliorer l’organisation des élections dans le pays, selon le père Jean Hanssens qui parle également de la nécessité de « construire un registre électoral fiable. » [do rc apr 22/04/2009 09:40]