Alertant sur différents dangers potentiels (constructions anarchiques, conditions déplorables de transport public, exploitation de mines de sable), après les effondrements d’édifices début novembre 2008, le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh) tient à attirer l’attention du gouvernement de Michèle Duvivier Pierre-Louis sur les conséquences de l’installation de matériels lourds, comme les antennes de compagnies cellulaires privées, sur les toits des maisons. L’organisme de défense de droits humains s’inquiète également des effets des « tours d’antennes qui émettent des ondes magnétiques généralement nocives à la santé et considérées comme cancérigènes par plusieurs spécialistes quand l’exposition [des habitants généralement résidant à proximité] à ces antennes est permanente.
Par le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh)
Soumis à AlterPresse le 24 novembre 2008
Port-au-Prince, le 19 novembre 2008
Lettre ouverte à la Première Ministre
Madame Michèle Duvivier PIERRE-LOUIS
Madame La Première Ministre,
Le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh), profondément préoccupé par la situation générale du pays et les menaces qui guettent la nation, prend la liberté d’attirer votre attention sur des faits appelant à des mesures urgentes de la part de tout gouvernement soucieux du respect des droits à la vie, à la santé, à la sécurité, à l’intégrité physique, psychique et mentale de ses concitoyens.
Madame La Première Ministre,
La population haïtienne est aujourd’hui exposée à toutes sortes de tragédies.
Cet état de fait est le résultat d’une politique de laissez-faire, d’une pratique de corruption et d’un mépris total des droits fondamentaux du peuple haïtien par les responsables de l’Etat.
L’effondrement du bâtiment de l’Etablissement la Promesse Evangélique le 7 novembre 2008 et l’incapacité de l’Etat à faire face à cette catastrophe ont sérieusement froissé la conscience de peuple de tout haïtien.
Des enfants ont perdu la vie, d’autres sont frappés d’infirmité permanente. Le désarroi était tel que l’effondrement de ce bâtiment a mis l’Etat à genoux.
Vous-même avez pleuré à chaudes larmes sur les lieux de la catastrophe, traduisant ainsi votre souffrance et votre angoisse face à l’impuissance de l’Etat.
Le 12 novembre 2008, moins d’une semaine après le drame de Nérette, Grâce Divine, un autre établissement scolaire, est partiellement effondré, provoquant des victimes et indiquant par là que le pire est à craindre.
Additionnés aux dernières intempéries, ces événements génèrent le traumatisme chez tous les haïtiens, particulièrement, chez les écoliers et leurs parents, d’où l’urgence d’agir avant qu’il ne soit trop tard.
Madame La Première Ministre,
Votre gouvernement a l’obligation de travailler à mieux gérer les bassins versants et à refaire la couverture végétale du pays.
Il doit désormais empêcher les constructions anarchiques, notamment dans des espaces fragilisés par la coupe effrénée des arbres, tels les pentes, les bords de mer, curer tous les drains, les égouts, les lacs, les étangs. Il doit également rassurer les citoyens qui ont aujourd’hui la sensation d’être abandonnés à leur sort, dans un milieu sursaturé, générateur d’inondations, de glissements de terrain à la moindre averse.
De plus, le Rnddh attire également votre attention sur d’autres catastrophes éventuelles que représentent des maisons louées par des compagnies privées de téléphonie mobile pour le placement de matériels lourds.
Des génératrices sont placées sur le toit de ces maisons et fonctionnent sans arrêt, vingt-quatre heures par jour, provoquant des mouvements vibratoires intenses. A côté de ces génératrices, sont installés des tours d’antennes qui émettent des ondes magnétiques généralement nocives à la santé et considérées cancérigènes par plusieurs spécialistes quand l’exposition à ces antennes est permanente.
Des réservoirs mobiles de stockage de carburant sont aussi placés sur les toits, aux fins d’alimenter automatiquement ces génératrices. La plupart de ces maisons sont habitées ou servent d’établissements scolaires. Les contrats sont signés pour des périodes allant jusqu’à huit (8) ans.
La situation de pauvreté de la population et son manque d’informations sont exploités par ces compagnies, bien que celles-ci soient au courant des dangers encourus par les contractants et leurs voisins.
Vous pouvez, par vous-même, vous faire une idée de ce qui peut arriver à une maison soumise à huit (8) années de vibrations.
Dans ces conditions, elles sont nombreuses, les personnes susceptibles d’être, à l’avenir, malades ou pire, atteintes du cancer. Elles sont aussi nombreuses les maisons qui risquent de s’effondrer, vu qu’elles n’ont pas été construites pour recevoir de telles charges.
C’est là un problème de santé publique et de sécurité qui appelle à l’intervention immédiate de l’Etat.
Madame La Première Ministre,
Le transport en commun terrestre, maritime et l’exploitation des mines de sable représentent aussi une source d’inquiétudes pour vos concitoyens.
Au niveau des zones urbaines, les conditions de transport en commun sont, certes, difficiles, mais ne sont pas de nature à causer de grandes catastrophes, l’embouteillage aidant.
Cependant, d’un département à l’autre, le transport terrestre et maritime se fait dans des conditions infra humaines. Les passagers sont entassés dans des caisses n’ayant pas été construites à cet effet, au mépris de toute notion de surcharge et de tonnage, et dans l’obsession de la perspective du gain.
Tout ceci se fait sous l’œil indifférent des autorités concernées.
Les mines de sable sont exploitées de manière anarchique, constituant des risques éminents d’éboulements et de glissements de terrain. Les exploitants ne se soucient guère du danger auquel ils exposent les personnes résidant au voisinage de ces sites.
Madame La Première Ministre,
Gouverner, c’est prévoir, dit-on. C’est aussi protéger tous les citoyens en particulier les plus faibles et ceux qui n’ont pas accès aux informations relatives à leur vie, à leur santé.
Des enfants, des vieillards, des malades, des femmes enceintes, sont susceptibles d’être victimes des risques ci-dessus énumérés.
Il est donc plus que temps d’agir.
Espérant que des actions promptes seront prises par votre gouvernement, le Rnddh vous prie de croire, Madame La Première Ministre, à l’expression de ses hautes considérations.
Pierre ESPERANCE
Directeur Exécutif