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Un ancien Conseiller du Président Aristide, l’historien français Christophe Wargny, critique l’orientation et les pratiques du pouvoir lavalas

P-au-P., 5 mars. 02 [AlterPresse] --- "Il est aujourd’hui extrêmement difficile de défendre Haïti", se plaint l’historien et enseignant français Christophe Wargny, ancien conseiller du Président Jean Bertrand Aristide. Haïti, dit-il dans une interview a AlterPresse, est décrit, "et avec quelques bonnes raisons, comme un pays de la corruption, du chaos, un pays sans issue ou un pays de la désolation".

"Même si on veut promouvoir la culture ou l’image d’Haïti, on a l’impression d’être complètement isolé", déclare Christophe Wargny, qui caresse l’idée de faire du bi-centenaire d’Haïti en 2004 le rappel d’un évènement moteur de l’Histoire. Il fait circuler en ce sens un appel dans des milieux étrangers intéressés à Haïti. "Nous ne rencontrons que très peu de concours de la part des Haïtiens qui devraient être les principaux concernés", confie-t-il.

Christophe Wargny, qui ne cache pas son amitié pour Aristide, attribue en partie a l’actuel président haïtien, les causes des difficultés que connaît le pays. Wargny estime cependant que "la préférence d’Aristide pour la notion de fidélité au détriment de la notion de compétence paraît aujourd’hui atteindre des records et constituer une des explications aux difficultés d’aujourd’hui".

L’intellectuel français critique la structure du parti Fanmi Lavalas, le comportement de certains militants lavalas et les élections contestées de l’année 2000. "La constitution de Fanmi Lavalas s’est fait sur un modèle terriblement haïtien de parti avec un chef et un clan", au lieu d’un "modèle plus moderne et différent" affirme-t-il à AlterPresse.

D’autre part, "un certain nombre de militants de la première heure, qui etaient réellement des militants, qui ont pris des risques, ont fini par enfiler des habits traditionnels des politiciens haitiens, avec tout ce que cela peut recouvrir de clanisme et de corruption", regrette Christophe Wargny.

Il indique également que la façon dont les élections de l’année 2000 ont été managées a ajouté non seulement au discrédit, mais a créé une sorte d’impasse politique. D’un coté, dit-il, des élections gagnées, "mais qu’on a voulu trop gagner" et puis de l’autre, "aucune alternative pour l’opposition que de faire durer la venue d’un hypothétique accord". Il en résulte, selon Wargny, "une impression que la classe politique toute confondue aurait oublié qu’elle est la représentante du peuple haïtien, qui souffre terriblement".

Christophe Wargny est co-auteur avec Pierre Mouterde du livre intitulé "Apre bal tanbou lou - Après la fête les tambours sont lourds", une analyse des rapports de Washington avec Port-au-Prince durant la période du coup d’état militaire de septembre 1991, qui met en évidence les doubles jeux de Washington. Wargny déclare qu’en considérant les années 1994 a 2002, "il y aurait sans doute un certain nombre de choses à redire". Il faudrait, ajoute-t-il, "un autre livre montrant l’extrême pesanteur des facteurs internes contre lesquels on a eu l’impression qu’il y avait un début de combat". [gp apr 05/03/02 11:30]