Par Ives Marie Chanel
Soumis à AlterPresse le 14 novembre 2008
Après les passages des cyclones et ouragans qui ont dévasté le pays et entraîné la perte de centaines de vies humaines, le gouvernement est venu en pompiers annoncer aux citoyens qu’un montant de 200 millions de dollars - tiré des fonds du programme Petro Caribe - allait être mis à contribution dans des interventions et projets de récupération.
Cette nouvelle a surpris plus d’un, car, par absence de transparence, les citoyens n’étaient ni informés de la disponibilité de ces fonds, ni, encore moins, de leur placement dans des banques étrangères.
Le réflexe de nos dirigeants n’a pas évolué ni dépassé celui affiché depuis des lustres par nos hommes d’affaires qui préfèrent importer des produits de base et les revendre en gros et en détail sur le marché local, plutôt que de jouer leur vrai rôle d’investisseurs par la création de véritables entreprises de production, génératrices d’emplois et de richesses.
Laissons de coté le débat sur les contraintes à l’investissement et concentrons-nous d’abord sur la nécessité de changer cette mentalité qui nous fait toujours penser le conjoncturel avec nos instincts égoïstes.
Aujourd’hui, après « les catastrophes des deux écoles », on se retrouve avec les mêmes formules et les mêmes solutions conjoncturelles… les mêmes démagogies qui se démarquent de toute démarche structurelle et constructive.
On se décharge de toute responsabilité et on annonce des mesures qui, j’en suis certain, ne dureront que l’espace d’un matin.
Ces catastrophes en cascade ne sont elles pas, pour nous, de sérieux avertissements, afin que nous prenions conscience de notre situation ?
Le problème d’Haïti n’est il pas les Haïtiens eux mêmes ?
Nous devons voir les choses autrement, refaire cette mentalité basée sur l’égoïsme, l’étroitesse de vues, l’absence de solidarité, les préjugés.
Il nous faut cesser de penser le court terme en regardant nos intérêts immédiats et personnels qui ne se résument qu’en commissions sur les projets, dilapidation des fonds alloués aux projets ou tout simplement au blocage de tout projet non compensé par des largesses de leurs promoteurs.
En complémentarité à un véritable projet visant à renforcer la capacité de l’Etat haïtien à garantir une instruction publique de qualité à tous les niveaux, le gouvernement pourrait procéder à la mise en place pour le secteur privé de l’éducation d’un projet parallèle, dont les étapes d’exécution pourraient être :
1.‐ Une évaluation structurelle et infrastructurelle des écoles ;
2.‐ la désaffectation graduelle des écoles jugées à risque ou logées dans des édifices inappropriés.
Cette désaffectation devrait se faire moyennant la mise à la disposition des écoles, dotées d’une viabilité financière et structurelle, de fonds pour la construction d’immeubles adaptés et répondant aux normes modernes.
Le financement pourrait être mis à la disposition de ces écoles à travers les banques d’Etat ou des structures privées, moyennant la mise à leur disposition par le gouvernement Haïtien d’un fonds de garantie.
L’Etat Haïtien pourrait identifier des espaces pour la construction d’écoles dans les grandes agglomérations (Zonage). Ces espaces pourraient être dotés, au préalable par les services compétents de l’Etat, d’espaces communautaires (terrains de jeux (Volley ball, Basket ball, football, piscine, piste d’athlétisme, gymnasium, parc, jardin botanique, etc.), d’infirmeries ou de dispensaires, de bibliothèques publiques, d’un sous commissariat de police, de salles de projection, Internet Wi fi (développer le concept de zones Wifi).
L’Etat Haïtien se chargerait du lotissement des parcelles, du drainage, de l’électrification et de l’approvisionnement en eau potable de ces véritables villages scolaires. Les parcelles seraient ainsi mises à la disposition des écoles pour la construction des édifices, selon leur taille et leur viabilité financière et structurelle.
Le gouvernement garantirait ensuite le transport des écoliers et des professeurs des différents villages, à des points d’arrêt prédéterminés dans les différentes agglomérations visées par le projet.
Ce projet permettrait de :
1. Réduire graduellement les risques de catastrophes et des pertes en vie humaines dans le secteur scolaire ;
2. Améliorer les conditions d’apprentissage ;
3. Améliorer les résultats au niveau scolaire ;
4. Améliorer le niveau des apprenants et le niveau de connaissance des futurs professionnels ;
5. Donner un plus grand accès aux nouvelles technologies, aux livres, à la pratique du sport aux couches défavorisées ;
6. Faciliter un meilleur contrôle et une meilleure évaluation des écoles ;
7. Contrôler le coût d’accès à l’instruction (contrôle de la scolarité et des frais scolaires) ;
8. Renforcer la pratique sportive et découvrir de nouveaux talents dans les domaines sportifs et artistiques ;
9. Garantir une meilleure sécurité par un contrôle plus efficace de ces zones par la police (les problèmes lies au kidnapping) ;
10. Impact certain sur l’environnement, le développement des villes et l’aménagement du territoire.
Trop beau pour être vrai, diront plus d’un.
Mais les possibilités existent.
Ce qui nous manque, ce sont peut être des idées et de la volonté de faire quelque chose, de travailler pour la postérité.
Le simple citoyen, que je suis, croit que le gouvernement Haïtien gagnerait plus à investir localement les revenus générés par Petro Caribe ou de l’ONA ??? Que de faire des placements dans les banques étrangères ?
Les millions de Petro Caribe pourraient permettre, par exemple, à l’Etat Haïtien, en partenariat avec une banque locale ou internationale, d’entamer la construction de routes nationales à quatre voies dotées de stations de péage.
Les revenus de ces droits de passage pourraient servir à l’entretien de ces routes ou encore à payer les faibles intérêts de ce prêt spécial du Vénézuéla.
L’Etat Haïtien ne pourrait-il pas s’engager dans le développement urbain par la construction de nouveaux quartiers, dotés d’immeubles qui pourraient être mis à la disposition des classes moyennes, des fonctionnaires à travers un système de crédit sur 20 - 30 années ?
De même dirons-nous : que perdra l’Etat Haïtien à investir mensuellement, pendant une certaine période, 10 % des recettes douanières de Malpasse (chiffrées mensuellement à 60 millions de gourdes) dans l’aménagement des aires frontalières de Fonds Parisien et de Ganthier ?
Que perdra l’Etat Haïtien en accédant à la demande des hôteliers du Nord d’éliminer le visa d’entrée pour les ressortissants dominicains et les touristes séjournant en République Dominicaine et en favorisant le développement du tourisme inter frontalier (Nos voisins dominicains sont en avance en éliminant le visa pour les Haïtiens détenteurs de visas américains et canadiens) ?
Que perdra l’Etat Haïtien dans la mise en place d’une zone touristique de libre commerce au niveau de l’axe Malpasse‐ Lac Azuei‐ Fonds Parisien pour contourner le protectionnisme dominicain, en permettant la libre circulation des dominicains jusqu’à Ganthier tous les week-ends ?
Cette mesure, ajoutée à la mise en place d’activités artistiques, sportives et culturelles autour du Lac Azuei, permettrait d’attirer nos voisins qui seraient servis hors taxes par des comptoirs de vente de produits haïtiens (rhum, clairin, boissons gazeuses, artisanat etc.) mis en place en collaboration avec le secteur privé sur le parcours de ce périmètre contrôlé par la police, les douanes et l’immigration.
Un projet novateur donc pour le Centre de promotion des investissements et le Ministère du commerce !
D’aucuns diront que je délire……
des idées ……….
Mais après … qui aura la capacité de les transformer en réalité pour le bien être commun.