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Canada : Le Professeur Samuel Pierre, d’origine haïtienne, honoré par Desjardins

Par Nancy Roc

Soumis à AlterPresse le 1er octobre 2008

Dans le cadre des activités qui se déroulent au Québec en marge de la Semaine québécoise des rencontres interculturelles, du 28 septembre au 5 octobre, Desjardins a tenu à souligner l’engagement, à plusieurs niveaux, de diverses personnalités issues des communautés culturelles, dont le Professeur Samuel Pierre, d’origine haïtienne.

Le 29 septembre, au cours d’un déjeuner officiel et sous l’orchestration de M. Denis Dubreuil Vice-président -Développement des affaires Ouest de Montréal et de M. Malek Badro - Directeur et Chef, Relations interculturelles -, quinze invités ont été publiquement honorés et remerciés.

Qu’ils soient médecins, musiciens, chefs d’entreprise ou journalistes, le point en commun de toutes ces personnes, est la passion qui les anime. Une passion qui les a poussées à se dépasser mais aussi à redistribuer ce qu’ils ont acquis, d’une manière ou d’une autre, dans leur communauté, au Québec et au Canada.

La quarantaine de personnes qui a eu le privilège d’assister à cet événement - un premier du genre – n’a pu qu’apprécier la sincérité des commentaires émis par les personnes honorées. En plus de reconnaître Desjardins comme un partenaire d’envergure dans leur réussite, elles ont en maintes fois remercié le Québec, « cette terre d’accueil qui leur a permis de devenir ce qu’elles sont aujourd’hui ».

Une première du genre

La Semaine québécoise des rencontres interculturelles, est l’occasion pour Desjardins de rappeler l’importance de la diversité dans la société québécoise. C’est la première fois que le Mouvement des caisses Desjardins, la plus importante institution financière du Québec, reconnaît l’engagement de personnalités issues des communautés culturelles. Cette institution est aussi l’une des plus importantes au Canada et l’une des 100 premières au monde avec un actif de 143 milliards de dollars.

À l’heure où la diversité est prônée dans les discours mais pas dans les actes de la société québécoise, le Mouvement des Caisses Desjardins fait preuve de pionnier en matière de reconnaissance des apports des communautés culturelles au développement économique du Québec.

« Vos valeurs sont celles qu’ont retrouvent au sein du Mouvement Desjardins : la solidarité sociale, pourvoir au mieux-être économique de ses semblables, le partage du savoir-faire par l’éducation et la formation, le leadership qui appelle au dépassement et au respect des différences et l’altruisme sous toutes ses formes », a déclaré M. Denis Dubreuil, Vice-président de la section Développement des affaires Ouest de Montréal, dans son discours de circonstance.

Ce dernier a remercié les personnalités honorées par Desjardins de « véhiculer ces valeurs humaines qui transcendent le temps car, en dépit des problèmes économiques qui affligent de nombreuses régions du monde- et pour certains d’entre vous, votre propre pays d’origine- vous avez su garder en vie ces valeurs humaines qui donnent le sens à une vie et les avez transmis à votre entourage ».

Samuel Pierre : un « mapou* » de la communauté haïtienne de Montréal

Questionné sur les critères de sélection des différentes personnalités choisies par Desjardins pour cet événement, M. Denis Dubreuil a fait savoir que chaque candidat a été choisi par sa propre communauté.

Il n’est donc pas surprenant que le Professeur Samuel Pierre ait été sélectionné pour recevoir par la communauté haïtienne de Montréal pour recevoir cette distinction du Mouvement Desjardins. En effet, la réputation de ce professeur et de cet humaniste a touché le cœur et l’esprit des haïtiens au-delà des frontières du Canada.

Samuel Pierre, ingénieur et Ph.D., a enseigné dans plusieurs universités québécoises et internationales parmi lesquelles l’Université du Québec à Montréal (UQAM), l’université Paris-7, l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne en Suisse. Il est actuellement professeur titulaire au Département de génie informatique de l’École Polytechnique de Montréal où il dirige le Laboratoire de recherche en réseautique et informatique mobile (LARIM) et le Groupe de recherche en réseautique et informatique mobile (GRIM). Il est également titulaire de la Chaire de recherche industrielle CRSNG/Ericsson en systèmes réseautiques mobiles de prochaines générations.

Samuel Pierre est un éminent spécialiste des réseaux de communication câblés et sans-fil, de l’informatique mobile et du télé-apprentissage. Ses travaux ont fait l’objet de plusieurs publications dans les revues les plus prestigieuses dans ce domaine, et ont été consacrés par plusieurs distinctions au Canada et à l’international. Il est le premier Noir à avoir été nommé à l’Académie Canadienne du Génie, le 23 juin dernier.

Ses idées novatrices ont été couronnées par deux demandes de brevets américains. Il est l’auteur de six ouvrages notamment, « Ces Québécois venus d’Haïti : contribution de la communauté haïtienne à l’édification du Québec moderne ». Ce dernier prouve, si cela était encore nécessaire, qu’au-delà de ses nombreuses activités professionnelles, le Professeur Samuel Pierre trouve toujours du temps pour partager ses connaissances avec son pays et le monde, à travers ce que la société haïtienne a de meilleur à offrir.

En recevant la distinction du Mouvement des Caisses Desjardins, le Professeur Samuel Pierre a souligné que la communauté haïtienne s’est installée depuis presque 30 ans (au mois de janvier prochain) au Québec. « À l’École de Polytechnique de l’Université de Montréal où j’exerce en génie informatique, mon mandat est d’essayer d’attirer les meilleurs esprits venus du monde entier qui accepteraient de venir au Québec pour faire des études universitaires notamment, au niveau de la maîtrise et du doctorat », a-t-il déclaré.
En ce sens, le Professeur Samuel Pierre a dit avoir eu l’opportunité, dans sa carrière, de former des élites venant de différents pays. « Je les ai reçues non seulement pour faire progresser la société d’où elles viennent mais aussi la société québécoise dans son ensemble », a-t-il ajouté. Il a conclu ses propos en remerciant, au nom de la communauté haïtienne de Montréal, le Mouvement des Caisses Desjardins d’avoir reconnu les valeurs des personnalités choisies parmi les communautés culturelles qui ont contribué à l’avancement du Québec et s’est dit heureux et fier de faire partie de ces valeureuses personnes.

La diversité, une dure réalité au Québec

Cela fait près de trois ans que la diversité culturelle est prônée dans les discours politiques au Québec sans être acceptée, de fait, par la société québécoise. Le taux de chômage des immigrants diplômés demeure le plus élevé dans la province québécoise, notamment parmi les Noirs ; soit près de 17% alors que les immigrants sont plus diplômés que les québécois dits « de souche ou pure laine », dont le taux de chômage ne dépasse pas 7%.

En matière d’entreprise, la diversité est devenue un impératif concurrentiel pour le Québec et le Canada. Déjà, lors de la 10ème conférence internationale Metropolis qui a eu lieu à Toronto le 20 octobre 2005, sous les auspices de la Banque Royale du Canada, il a été reconnu que la promotion de la diversité culturelle et l’apport des communautés visibles constituait une révolution sociale tant au Québec qu’au Canada.

En ce sens, il a été établi qu’au XXIème siècle, « l’efficacité de la gestion des défis de la diversité sera lourde de conséquences pour le succès social et économique du Canada, la qualité de ses communautés et la réussite de ses entreprises ».

Selon le rapport de cette conférence, « ne pas tirer pleinement parti du potentiel des immigrants et des femmes au travail peut se chiffrer rapidement en milliards de pertes de salaires, de productivité et de production ».

Pour comprendre les besoins et les aspirations de consommateurs de plus en plus diversifiés, et y répondre, le Canada doit donc désormais miser sur une main-d’œuvre également de plus en plus diversifiée.

L’enquête sur les perspectives des entreprises de la Banque du Canada présente les pénuries de main-d’œuvre comme un important frein pour les entreprises dans un futur proche.

Malgré ces constats et résultats d’enquête, l’intégration des nouveaux arrivants au Québec est devenue de plus en plus difficile voire parfois impossible, souvent sous le fallacieux prétexte de « surqualification ». Ainsi des médecins, ingénieurs, professeurs et journalistes, hautement qualifiés, se retrouvent sans emploi après avoir tout quitté derrière eux et avec une famille à nourrir. Si le Québec recrute les cerveaux les plus qualifiés à l’étranger, arrivés « au pays », ces cerveaux se retrouvent sur les trottoirs des minorités dites officiellement « visibles », mais qui demeurent, dans les faits, invisibles.

« Le multiculturalisme est une richesse et la coopération est une valeur sûre qui permet aux êtres humains de bâtir des assises solides », a lancé M. Denis Dubreuil Vice-président de la section, Développement des affaires Ouest de Montréal, du Mouvement des Caisses Desjardins, lors de ce déjeuner inédit dans la monde des affaires au Québec.

« Nous avons tous à gagner, à partager, à écouter, à aimer et à apprécier l’autre qui, comme nous, vit de grands bonheurs et des angoisses propres aux éléments circonstanciels qui meublent une vie. Peu importe la couleur de notre peau, je crois que nous devons reconnaître la main qui nous est tendue lors d’événements heureux et malheureux », a conclu M. Dubreuil.

Espérons, pour toutes les communautés culturelles du Québec, que ce vœu ne restera pas pieux dans la société québécoise !

(*) Arbre géant de la flore haïtienne