P-au-P, 1er oct. 08 [AlterPresse] --- Plusieurs secteurs culturels et artistiques haïtiens expriment leur solidarité envers la comédienne Natacha Jeune Saintil victime, il y a une semaine, de brutalités policières, à Carrefour (sortie sud de Port-au-Prince).
« Nous ne voulons plus de barbarie dans notre pays ! », écrivent les créateurs Gary Victor, Kettly Mars et Barbara Prézeau-Stephenson dans une lettre de protestation.
Tabassée à 9:30 du soir (heure locale) le 24 septembre 2008, par des policiers affectés au commissariat de Carrefour (municipalité dans la banlieue sud de la capitale), Natacha Jeune Saintil a été transportée, le lendemain, à un centre hospitalier où elle a subi une première intervention chirurgicale.
« Souffrante, saignant, les policiers agresseurs l’ont, ensuite, arrêtée et conduite au Commissariat de Carrefour sous le fallacieux prétexte qu’elle n’avait pas obtempéré à une ‘’injonction policière’’, expliquent les créateurs Victor, Mars et Prézeau-Stephenson.
Les policiers voulaient procéder à l’arrestation du frère de la victime.
« Dans une société si délabrée où le moindre souffle de vent, la moindre larme du ciel, emporte terre et vies humaines, nous ne saurions accepter que la santé physique et mentale d’un jeune talent soit détruite par les hordes de barbares infiltrés dans toutes nos institutions », écrivent-ils dans cette note transmise à AlterPresse.
Pour sa part, soulignant que la mère de Natacha Jeune Saintil a, elle aussi, été agressée en leur domicile à l’occasion, l’Association internationale des Critiques d’Arts (AICA Sud Caraïbes) demande aux autorités judiciaires de « prendre toutes les mesures pour mettre hors d’état de nuire les auteurs de cet acte ».
« Chaque fois qu’un artiste, qu’un journaliste sont victimes, c’est Jacques Roche [1] qu’on assassine de nouveau », paraphrase l’AICA Sud Caraïbes.
La compagnie de théâtre Nife proteste, elle aussi, contre ces brutalités policières infligées à Natacha Jeune Saintil. La compagnie Nife ainsi que la Fondation AfricAmérica réclament justice pour la victime internée dans un hôpital de Médecins Sans Frontières.
« Ne laissons pas fuir les coupables, et ne tolérons pas cette pratique, n’encourageons pas l’impunité. Faisons face aux bourreaux, même s’ils portent des uniformes et des armes et sont sans foi ni loi », indique la compagnie Nife.
Ministre à la condition féminine et aux droits des femmes (Mcfdf), Marie Laurence Jocelyn Lassègue a visité, sur son lit d’hôpital, la jeune comédienne du Petit Conservatoire.
Jocelyn Lassègue condamne cet acte et espère que ces « bavures déplorables, inconcevables dans l’Etat démocratique qui est le nôtre » n’atteignent pas d’autres personnes à l’avenir.
Les policiers, selon la ministre des femmes, doivent faire leur travail dans le respect des droits de la personne humaine.
Entre temps, quatre policiers soupçonnés d’implication dans ce dossier ont été placés en isolement.
L’inspection générale de la police haïtienne devrait bientôt soumettre le dossier au Parquet de Port-au-Prince qui, à son tour, mobilisera l’action publique contre les coupables, selon l’avocat de la victime, Samuel Madistin, cité par Le Nouvelliste. [do rc apr 01/10/2008 10 :20]
[1] le journaliste Jacques Roche a été assassiné après 4 jours de séquestration en juillet 2005 à Port-au-Prince