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Le rôle des médias vis à vis des processus de développement économique et social

Médias / Définitions

Médias au pluriel réfère au nom générique donné à l’ensemble des moyens de communication de masse : presse, radio, télévision, livres populaires, etc.

Au singulier, un média – au lieu de médium – renvoie à l’un de ces moyens en particulier.

Ces définitions nous sont proposées par le « Lexique des termes de presse » revu et corrigé par Madeleine Aslangul et publié par le Centre de formation et de perfectionnement des journalistes (CFPJ) basé en France.

Pour sa part, le « Dictionnaire de la radio » de Robert Prot nous propose la définition suivante : « Terme latin (neutre pluriel) adopté par les Anglo-Saxons pour désigner un vecteur de diffusion de masse, tel que la presse, la radio, la télévision, le cinéma, l’affiche ou l’ensemble de ces moyens de communication ». Bien que média soit du pluriel, il est employé au singulier dans le même sens.

A quelques nuances près, on peut dire que les définitions proposées par le « Lexique des termes de presse » et le « Dictionnaire de la radio » de Robert Prot recoupent la même réalité.

Dans le cadre de ce texte, nous assimilerons le concept médias à celui très prisé également de la presse. Celle-ci réfère à la grande famille des journalistes et des organes de presse.

Nous avons voulu partager avec vous ces définitions, non par parade intellectuelle, mais pour bien planter le décor. Car les définitions que nous vous avions proposées tiennent compte du facteur rayonnement des médias donnant lieu, à travers le temps et l’espace à un autre type d’homme : l’homme de masse, l’homme planétaire.

Pour pousser la réflexion plus loin, nous pourrions opposer les médias de masse aux médias thématiques qui permettraient, selon certains auteurs, l’individualisation de la communication. Cette approche nous amènerait à dialoguer entre autres avec Dominique Wolton (qui était récemment en Haïti) à travers son livre intitulé « Penser la communication ».

Une telle approche nous amènerait aussi à dialoguer avec Régis Debray, fondateur du concept médiologie. L’objectif de la médiologie, nous dit-il, est l’étude des conditions matérielles de la diffusion des messages.

Pour sa part, Daniel Bougnoux nous dit, dans un texte intitulé « Pourquoi des médiologues ? », ceci : « Pour les médiologues, l’étude des supports de transmission permet de comprendre l’efficacité de certaines idées et le pouvoir des mots. L’auteur se livre ainsi à un vibrant plaidoyer en faveur de cette sensibilité nouvelle que représente la médiologie.

Rôle et enjeux des médias

Peu importe sa nature, on reconnaît généralement à la presse les fonctions suivantes : la fonction de recherche et de diffusion de l’information, celle d’expression, celle de formation et d’éducation, celles de divertissement et de psychothérapie et la fonction idéologique.

Dans le débat sur les médias, on capitalise le plus souvent sur la personne du journaliste. Ceci est dû à son importante fonction sociale, à la possibilité qu’il a d’influencer les idées et opinions. Le journalisme devient une mission autant qu’une profession.

Ce n’est pas pour rien que dans de nombreux récits et fictions de la culture de masse, le héros principal, redresseur de torts et justicier, est un journaliste. Superman lui-même (le reporter Ken Clark) n’est-il pas journaliste, tout comme Spiderman (le photo-reporter Peter Parker) ou Tintin ?

Selon Fernand Terrou, « l’information n’est plus seulement l’exercice d’un droit, une liberté individuelle, condition de toutes les autres libertés individuelles ; elle n’est pas seulement un instrument d’action politique. Elle est devenue dans la société industrielle l’instrument de tout développement économique et culturel. Elle est sous toutes ses formes multipliées par la progression des techniques de publicité, de relations publiques, de propagande, le support de toute action sociale, et tout naturellement de l’action de l’État ».

D’un point de vue informationnel, la presse devrait se donner prioritairement pour rôle de fournir au public les outils devant lui permettre de se faire une idée, de forger son avis, de se faire une opinion sur toutes les questions qui le concernent, qui concernent son entourage médiat et immédiat, qui concernent le monde.

À mon humble avis, une fois que le public sera en possession de ses outils. Il sera mieux à même de prendre des décisions, d’agir sur son milieu, soit dans le sens d’une meilleure intégration ou au contraire d’une mise en question.

Bien entendu, je ne conçois pas la presse comme une institution qui doit s’ériger en maître à penser pour forger les opinions, mais plutôt pour donner aux gens les outils susceptibles de leur permettre de se faire une idée et ensuite d’agir.

L’instauration de la démocratie et la sauvegarde des droits humains pris au sens large requièrent de la part des citoyens de la vigilance et un sens aigu de responsabilité. Et les citoyens ne peuvent être responsables que s’ils connaissent leurs droits et leurs devoirs, que s’ils disposent aussi de repères consistants pour mieux s’intégrer dans leur environnement où à défaut le changer.

L’information la plus apte à donner ses repères aux citoyens, c’est celle qui est perçue comme un bien social, celle qui s’adresse aux véritables préoccupations de la population, celle qui met le public en face de vérités, celle qui, au besoin, dérange.

Fernand Terrou considère l’information comme un ferment de démocratisation. Et la démocratisation ne se conçoit pas sans une référence claire aux droits humains.

Dans son acception large, les droits humains réfèrent non seulement aux droits civils et politiques (c’est-à-dire droit à la liberté d’opinion et d’expression, droits à la liberté de religion et de conscience, à la liberté d’association et de réunion, à la vie, à la liberté physique, à un procès équitable, droit à une peine ou à un traitement humain), mais aussi aux droits sociaux et économiques.

Cette catégorie de droits se réfère à des besoins fondamentaux de l’être humain qui doivent être assouvis pour qu’il puisse vivre et se développer. On peut citer, à titre d’exemples, les droits à la nourriture, à l’éducation, à la vie, au logement, à la santé, au travail, au salaire et aux loisirs.

On peut même inclure dans cette catégorie le droit au développement. La « déclaration sur le droit au développement » a été adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies, le 4 décembre 1986.

L’article 4.2 de cette déclaration - à laquelle a souscrit Haïti - met l’accent sur les droits collectifs, les droits des peuples à choisir leur propre développement et insiste sur la coopération internationale entre les États, une coopération qui ne saurait se résumer à l’assistance internationale, bien qu’elle soit jugée essentielle.

Le développement économique et social

Le développement est un terme valise. Pour bien le cerner, il nous faudrait analyser les grands courants ayant marqué la réflexion sur ce concept. Ces grands courants concernent notamment la théorie de la mondialisation, celle de la dépendance influencée par le marxisme et la tendance critique qui participe de l’interdisciplinarité et des adaptations locales.

Nous vous faisons grâce d’une présentation détaillée de ces grandes théories. Nous nous en tiendrons, dans le cadre de ce texte, à la définition présentant le développement comme « un processus de changement avant d’être un objectif ou un niveau atteint au cours de l’évolution sociale ».

C’est sur la base de cette définition qu’on renonce de plus en plus à parler de « pays sous-développé » - qui indique un état - pour utiliser de préférence le terme « pays en voie de développement (PVD) ou son synonyme "pays en développement" (PED).

L’économiste français François Perroux nous dit que « le développement est bien autre chose que la croissance ». Il décrit l’expansion comme un phénomène quantitatif et conjoncturel qui entraîne des améliorations au niveau des revenus et de l’emploi. S’agissant de la croissance, il nous la présente comme un phénomène quantitatif et structurel qui entraîne une hausse variable du niveau de vie. Quant au développement, il réfère, selon lui, à un phénomène qualitatif et irréversible marqué à la fois par des changements de structures et des changements mentaux et sociaux qui entraînent l’aptitude à une croissance durable et cumulative.

À côté de l’approche « développement comme processus de changement social et économique » définie par Perroux, des organisations internationales, comme l’ONU, la Banque mondiale et le Bureau international du travail (BIT), proposent des notions complémentaires, à savoir le développement humain et le développement durable (ou soutenable).

Suivant cette seconde approche, le développement (développement humain s’entend) vise la satisfaction des besoins fondamentaux de l’homme. Ce développement a un caractère universel, c’est-à-dire, il doit toucher l’ensemble des populations.

Ce développement humain suppose aussi la réduction des inégalités entre et à l’intérieur des pays. Et pour que le développement soit durable ou soutenable, la croissance doit être compatible avec la sauvegarde de l’environnement. Et on allie de plus en plus les deux notions en parlant de développement humain durable.

Le rôle des médias vis à vis des processus de développement économique et social

`A cette phase, j’aimerais rappeler ce commentaire de Dominique Leglou à propos du journaliste de télévision : « Jadis, celui-ci était jugé par ses pairs, ses rédacteurs en chef, son directeur. Aujourd’hui, Médiamétrie a force de loi. D’un jugement qualitatif, subjectif, mais humain, le regard sur le travail du journaliste est passé à un jugement purement quantitatif. Plus le nombre de téléspectateurs est élevé, plus on a tendance à considérer que le travail est bien fait ».

Cette remarque judicieuse doit interpeller les patrons de médias et les porter à être plus sensible au critère de qualité, en ne prenant pas seulement l’indice médiamétrique comme le seul instrument de mesure. Il est vrai que dans le cas d’Haïti, cet indice médiamétrique, que nous évoquons, paraît assez virtuel et peut ne relever que de la perception, à défaut d’institutions spécialisées dans l’étude de la part de marché et du taux de pénétration des médias.

Les médias se devraient de prendre certaines dispositions pour sortir de l’information purement institutionnelle et explorer d’autres thèmes et champs qui sont à leur portée.

Les médias doivent s’évertuer à trouver un bon dosage entre (l’exploitation de) l’actualité immédiate, l’actualité au jour le jour, l’information événementielle et l’information lointaine, l’information qui se situe dans des limites temporelles moins étroites (coût de la vie, érosion, sécurité alimentaire, etc.).

Pour jouer pleinement son rôle par rapport aux processus de développement économique et social, les médias gagneraient à avoir en ligne de mire dans le cadre de leur stratégie de couverture informationnelle les indicateurs d’Haïti concernant notamment la pauvreté, la faim, l’éducation, l’égalité des sexes, la mortalité infanto-juvénile, la santé maternelle, la lutte contre le VIH-Sida, le paludisme et les autres grandes maladies, la visibilité de l’environnement. L’encrage sur ces indicateurs peut porter les médias à rapprocher leur contenu le plus près possible du vécu des gens et de leurs préoccupations.

Jean-Jacques Jespers oppose, dans son livre intitulé « Méthodologie du journalisme télévisuel », deux conceptions du journalisme, celle d’une information-produit, choisie et diffusée en fonction de sa valeur marchande, et celle d’une information-service.

Dans la première conception, « l’information a pour but de répondre à des besoins psychiques solvables : curiosité, besoins de participation symbolique à un événement ou besoin d’identification à une personne prestigieuse, soif d’émotions fortes. Alors que dans la deuxième conception, l’information a pour objectif, selon Jespers, de répondre à des besoins sociaux ou civiques : aider à l’action individuelle ou collective de l’homme, dans le monde ou éclairer ses choix.

Faut-il choisir entre la conception marchande du rôle de l’information et la conception volontariste du rôle de l’information ? Ou de préférence, faut-il trouver une position mitoyenne, c’est-à-dire se situant à mi-chemin entre les deux conceptions. À mon humble avis, on ne peut pas faire l’économie d’un tel débat quand on aborde la problématique du rôle des médias vis-à-vis des processus de développement économique et social.

Références bibliographiques

AGNES, Yves : Manuel de journalisme (Ecrire pour le journal), Ed. La Découverte, Paris 2002

http://www.ebu.ch/CMSimages/fr/WEMF_29juillet03_FR_tcm-8484.pdf

http://portal.unesco.org/ci/fr/ev.php-URL_ID=16793&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html

http://www.clemi.org/formation/conferences/cassagne99.html

http://www.ac-versailles.fr/PEDAGOGI/ses/reserve/pages/ter-intro2.htm

http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9cession_%C3%A9conomique

http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/citoyen/enjeux/media-democratie/medias-contribuent-ils-au-debat-democratique.html

JESPERS, Jean-Jacques : Méthodologie du journalisme télévisuel, PUB, 1997

« Lexique des termes de presse », revu et complété par Madeleine Aslangul, CFPJ, Paris 1991

RAMONET, Ignacio : La tyrannie de la communication, Ed. Galilée, Paris 1999

ROBERT, Prot : Dictionnaire de la radio, Presses Universitaires de Grenoble et Institut National de l’Audiovisuel (INA), Fév. 1998

SÉRANT, Vario, Sauver l’information en Haïti, Imp. Média-Texte, P-au-P, Avril 2007

TERROU, Fernand, L’Information, Coll. Que Sais-je ? PUF, Paris, 1962, 1ère éd.

WOLTON, Dominique, Penser la communication, Éd. Flammarion, Paris 1997