Solidarite Fwontalye/ Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti)
Soumis à AlterPresse le 09 juin 2008
Au début de la matinée du vendredi 6 juin 2008, vers 9:00 environ, un passeur, à la fois trafiquant d’enfants, a été surpris en flagrant délit à Dajabon [Ndlr : frontière commune avec la ville de Ouanaminthe, Nord-Est d’Haïti] avec quatre enfants de 2, 3, 4 et 6 ans.
Solidarite Fwontalye/ Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti) a été sur les lieux pour identifier le passeur, les enfants ainsi que la maison où ils se trouvaient.
Le passeur, qui les fit entrer dans le territoire voisin irrégulièrement et avec la complicité de certaines autorités dominicaines, s’appelle Jean-Paul Frandominique. Placé en garde-à-vue, il a affirmé avoir payé 150 pesos à un capitaine de l’Immigration Dominicaine pour traverser la rivière Massacre avec ces enfants.
Le trafic de personnes est une activité criminelle quotidienne bien organisée, enregistrée à Ouanaminthe et dans beaucoup d’autres communautés environnantes.
Les trafiquants, qui se concentraient autrefois sur les hommes, sont maintenant à la recherche de tout type de personnes, surtout des femmes. Même les enfants n’en sont pas épargnés.
De janvier à avril 2008, nous avons recensé 1,353 enfants trafiqués en République Dominicaine à partir des villes frontalières suivantes : Mellac, Fort-Liberté, Ferrier, Acul-des-Pins, Ouanaminthe, Capotille et Mont-Organisé.
Nous reconnaissons que ce chiffre n’est qu’une approximation de la quantité réelle d’enfants haïtiens, victimes du trafic organisé par les délinquants désirant s’enrichir malhonnêtement aux dépens des personnes sans défense. Car, les trafiquants utilisent toutes sortes de stratégies pour camoufler leur sale besogne et détourner l’attention des autorités et des observateurs de droits humains présents dans la zone et intéressés à cette question.
Solidarite Fwontalye/ Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti) manifeste son indignation devant le sort des enfants.
Lorsqu’on trafique des adultes, nous ne faisons qu’observer la situation, mais quand il s’agit du trafic d’enfants, Solidarite Fwontalye (Haïti) ne saurait y être indifférente. Notre devoir est de signaler ces faits aux autorités haïtiennes sur place pour empêcher les trafiquants de partir avec eux en République Dominicaine.
Le problème est qu’il n’y a pas un suivi sérieux, donné à ce genre de cas sur la frontière haïtiano-dominicaine. Ce n’est pas étonnant que ce trafiquant d’enfants, remis aux agents de la Police nationale d’Haiti (Pnh) soit relâché sans coup férir ; car la justice dans le Nord-Est laisse à désirer et la population de ce département a très peu de confiance en elle.
Les trafiquants fonctionnent en réseaux de gangs, composés d’Haïtiens et de Dominicains. La demande d’enfants semble très forte dans le marché dominicain : c’est ce qui donne du boulot aux trafiquants haïtiens qui collaborent à cette sale besogne pour gagner de l’argent.
Solidarite Fwontalye a remarqué la présence d’une pick-up rouge, de temps en temps, à Dajabon, qui recrute les fillettes haïtiennes pour les amener à la traite dans d’autres villes dominicaines.
Nous allons nous mettre sur le terrain et travailler de manière à identifier son numéro d’immatriculation pour le publier aux fins de dénoncer cette activité illicite et illégale.
Solidarite Fwontalye/ Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti) invite l’Etat haïtien et l’Etat dominicain à investiguer pour savoir quelle est la destination finale et à quelle fin ces enfants sont conduits en République Dominicaine.
Que l’Etat haïtien prenne des mesures sévères pour freiner le trafic de migrants et spécialement celui des enfants, car son devoir est de protéger la population. C’est injuste, immoral et criminel que des enfants soient arrachés de leurs familles, de leur milieu pour aller en République Dominicaine.
En ce sens, il serait bon que l’Etat organise des séances de formation pour les autorités concernées, car le trafic des mineurs représente un grave danger pour la société en général.
Nous invitons la Pnh à être vigilante et à se montrer comme une force de protection et une institution en qui la population peut avoir confiance.
Nous invitons le Commissaire du gouvernement du département du Nord-Est à mettre l’action publique en branle contre tous les malfaiteurs trafiquants, vendeurs d’enfants et d’Haïtiens, pour qu’ils répondent correctement de leurs actes.
Si les autorités se résolvaient à agir ensemble, avec la plus grande fermeté, contre le trafic de personnes sur la frontière, le nombre de migrants en partance pour la République Dominicaine diminuerait considérablement, et par conséquent le nombre de déportations vers Haïti aussi baisserait.
Ce serait un signe clair de tolérance zéro (dans le vrai sens de l’expression), donné aux gangs de trafiquants de mineurs.
Solidarite Fwontalye/ Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti)