P-au-P, 04 juin 08 [AlterPresse] --- Ils étaient plusieurs milliers de citoyennes et citoyens à exprimer leur ras-le-bol, ce mercredi 4 juin 2008, devant la montée incessante du phénomène du kidnapping qui a beaucoup appauvri les familles haïtiennes au cours des quatre dernières années, a observé l’agence en ligne AlterPresse.
Cette « mobilisation totale contre le kidnapping », selon le message que d’aucuns pouvaient lire sur les t-shirts que portaient les manifestants, a démarré à 9:30 locales (14:30 gmt) devant l’église du Sacré-Cœur de Turgeau, ce 4 juin 2008.
Munis de pancartes, sur lesquelles sont inscrits des messages contre les enlèvements crapuleux de personnes, les protestataires ont sillonné au moins trois rues de la capitale avant d’aboutir devant le Palais de justice de Port-au-Prince.
A l’avenue Charles Summer, où se trouve le siège du ministère de la justice, les manifestants anti-kidnapping ont fait escale pendant une demi-heure. Entre-temps, les principaux chefs de file de ce mouvement se trouvaient à l’intérieur pour remettre une lettre au titulaire sortant de la justice.
Au milieu d’un important dispositif de sécurité, Arnold Antonin, Jean Robert Argant, Ashley Laraque, ont pénétré l’enceinte du ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP).
Plus agressifs que jamais, les journalistes ont dû se mettre en quatre devant le refus des policiers à leur laisser un passage pour assister à la remise de cette lettre.
A l’intérieur, il n’y avait que la secrétaire du ministre et quelques employés de ce bureau public. Ni le titulaire sortant du MJSP, René Magloire ni son directeur général, Josué Pierre-Louis, n’étaient disponibles.
Le secrétaire d’Etat à la justice, Daniel Jean, n’était pas non plus à son bureau.
« Aucune des autorités judiciaires n’est disposée à nous recevoir. Personne ! Cela prouve que les autorités concernées ne nous prennent pas au sérieux », se lamente l’industriel Ashley Laraque du Groupe de citoyens concernés (GCC).
Laraque dit prendre note de l’attitude affichée par les responsables de la justice et de la sécurité dans ce pays.
L’économiste Arnold Antonin, du collectif « Lutte nationale contre le kidnapping (LUNAK) », a quand bien même remis la lettre à la secrétaire de René Magloire, membre du gouvernement démissionnaire de Jacques Edouard Alexis.
Entouré d’une pluie de journalistes, Antonin a pu lire cette lettre dans laquelle les organisateurs de cette marche somment les autorités haïtiennes d’assumer leurs responsabilités en vue de couper court à ce fléau.
« Depuis l’apparition brutale dans notre pays du phénomène du kidnapping, les instances chargées de la sécurité nationale n’ont pas mobilisé toutes les ressources disponibles », constatent, dans cette correspondance, les initiateurs de ce mouvement pacifique contre les enlèvements de personnes.
Arnold Antonin précise que les autorités policières, de leur côté, n’ont pas pu utiliser les témoignages des victimes du kidnapping pour déployer des stratégies visant à mettre les bandits hors d’état de nuire.
Après ce message, les manifestantes et manifestants ont continué leur parcours jusqu’à la rue Saint Honoré, au Champ de Mars, non loin du Palais présidentiel, où une correspondance a été remise au commissariat de Port-au-Prince, situé à proximité.
Conscient de l’ampleur du phénomène du kidnapping, le commissaire Michel Ange Gédéon annonce la poursuite des activités policières en vue de contrer les bandits qui terrorisent la population haïtienne.
« Nous sommes plus que jamais déterminés à travailler contre l’insécurité dans le pays. Nous continuerons à remplir notre mission, appréhender les bandits et les conduire devant la justice », affirme le commissaire Gédéon.
Le responsable policier invite les instances concernées à assumer leurs responsabilités.
Sur tout le parcours de la marche pacifique, les protestataires ont scandé des slogans anti-kidnapping.
« Nous ne pouvons pas empêcher aux gens de dire ce qu’ils ont ressenti. Mais notre marche est avant tout pacifique et silencieuse », précise Ashley Laraque.
Malgré la forte présence policière, certains individus ont tenté de faire passer d’autres revendications, en lançant à tort et à travers des propos favorables au retour de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide.
« Je suis totalement satisfaite et je ne m’attendais pas à cette foule immense. Les gens ont compris la nécessité de faire valoir leurs mécontentements par rapport aux actes du kidnapping », s’exclame la Sociologue Danièle Magloire.
La dirigeante féministe a salué le travail de la police qui, selon elle, a pu sécuriser ces milliers de gens qui marchaient contre le kidnapping, parmi eux des anciens otages et des parlementaires.
Devant le Palais de Justice, les protestataires se sont agenouillés pendant quelques minutes avant de mettre un terme à cette marche dont l’objectif était de dire « non au kidnapping, non au commerce des êtres humains, non à l’argent du sang et de la douleur ». [do rc apr 04/06/2008 14 :00]