Communiqué de l’UEH
Soumis à AlterPresse le 3 juin 2008
Le climat d’insécurité qui règne dans le pays depuis plusieurs années rentre dans la panoplie des phénomènes destructeurs de notre société. L’insécurité sème la mort, le viol physique et moral, la mise à sac d’entreprises, la perte brutale d’épargne durement accumulé. Elle provoque l’abandon de biens personnels dans certains quartiers et la fuite de cadres compétents, de citoyens honnêtes vers des pays étrangers.
Depuis quelque temps, le pays connaît une recrudescence de pratiques d’enlèvements avec versement de rançons et exécutions d’otages innocents qui appauvrissent et endeuillent plus d’une famille. Ce climat d’insécurité, renforcé par celui de l’impunité, révèle aussi l’effritement de la solidarité collective, l’une des valeurs de base de toute société. Combien de cas signalés où aucune assistance n’a été portée à un père ou une mère qui tentait désespérément d’arracher un fils ou une fille aux griffes des agresseurs ? Nous devons, plus que jamais, essayer de comprendre les causes de cette cassure sociale, chercher au-delà de l’argument facile de la peur, les raisons profondes de cette indifférence devant cette détresse de l’autre. Ne faut-il pas questionner les inégalités trop criantes, l’absence d’espace de vivre ensemble qui poussent les uns à regarder les autres comme ennemis et à créer un climat de méfiance généralisée ?
L’Université n’est pas épargnée par cette vague d’enlèvements. Rappelons le cas tragique de la jeune Natacha Farah Kerby Dessources, étudiante à l’Ecole Normale Supérieure, martyrisée et assassinée pour assouvir les instincts les plus bas d’individus pour qui l’avenir de notre jeunesse doit s’effacer devant la réalisation de leurs projets personnels. Nos facultés sont sérieusement handicapées pour administrer leurs programmes, devant fermer leurs portes dès la tombée de la nuit. L’insécurité n’empêche pas seulement la vie nocturne. Elle détruit la vie. La vie de nos jeunes. La vie sociale. Elle dilapide nos biens physiques et moraux par le vol, le viol et le kidnapping avec des conséquences psychologiques incalculables pour toute la société.
Dans ces circonstances, le Conseil Exécutif de l’UEH rappelle au Gouvernement, aux élus à tous les niveaux, leurs responsabilités vis-à-vis de la nation. L’insécurité met à nu la faiblesse de l’Etat haïtien. La tâche principale des responsables aujourd’hui est de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour reconstruire cet Etat qui seul a la capacité de protéger la collectivité contre la fureur des appétits individuels qui gangrène notre société et dont le kidnapping ne représente que la facette peut-être la plus abjecte. Dans le même ordre d’idées, l’UEH propose la mise en place de structures décentralisées et participatives faisant une large place à l’initiative collective, à la mobilisation et à la solidarité citoyennes avec l’encadrement de l’Etat.
Le Conseil Exécutif de l’Université d’État d’Haïti appuie, sans réserve, la marche du 4 juin 2008 contre l’insécurité et invite la communauté universitaire à y participer massivement.
Port-au-Prince le 2 juin 2008.
Conseil Exécutif de l’Université d’Etat d’Haïti