P-au-P., 19 sept. 03 [AlterPresse] --- Le vagin emplissant les planches, les cours, les esprits et les
conversations. Le vagin sous toutes les formes et situations. Le vagin
devenant verbe pour dire ses délices enivrantes et amertumes.
« Les Monologues du Vagin » de l’américaine Eve Ensler, le 18 septembre, au
Forum Eldorado, pour ouvrir le premier festival de Port-au-Prince baptisé «
Les Quatre Chemins ».
Salle comble. Assistance silencieuse au début. Et au fur et à mesure moins
discrète et agitée quelque peu par l’intensité des monologues qui se
succèdent. Deux cents entretiens avec des femmes : jeunes, agées, mères de
familles, dactylos, PDG, prostituées, noires, hispaniques, asiatiques,
bosniaques, indiennes, juives, blanches, etc.
Proximité, stricte intimité, anxiété, hilarité et drôlerie. Le mot vagin
répété cent vingt-quatre fois pour conjurer l’interdit, l’embarras et
susciter ré-appropriation. Ré-appropriation par la femme de son vagin, en
tant que partie du corps, comme les organes des sens, mais plus que cela, en
tant que soi-même, en tant que lieu doué de vertues insoupçonnées comme
celles du cour et du cerveau.
Les spectateurs ont su apprécier la maestria avec laquelle la
belgo-rwandaise Estelle Marion a interprété les monologues. Une présence
scénique hors pair qui a fait oublier la modestie du décor. Une verve et une
gestualité bien maitrisées ayant transporté le spectateur, sans heurt, dans
des situations diamétralement opposées, dans différents univers vaginaux.
Parler du vagin abondamment sans tomber dans la trivialité et la
pornographie : le pari réussi par Eve Ensler sur une mise en scène de Tilly.
Se mettre sur les planches en plein dans le vagin, sans provocation et en
suscitant réflexion : la gageure réussie par la comédienne Estelle Marion,
ce jeudi, au Forum Eldorado.
De l’apprentissage de la sexualité à la maternité, du machisme ambiant à la
nouvelle liberté amoureuse : autant de séquences exécutées avec brio par
Estelle Marion.
C’est pour la première fois que les Monologues du Vagin sont présentés à
Port-au-Prince, en partenariat avec l’organisation féministe Enfofanm. La
représentation a été suivie d’un débat très animé, sous la direction des
responsables de Enfofanm.
Les Monologues du Vagin ont déjà été proposés dans de nombreux pays, plus de
trois cents fois par exemple en communauté française de Belgique par le
Théatre de Poche.
Le festival de théatre de Port-au-Prince durera, rappelons-le, jusqu’au 27
septembre 2003. Les autres représentations prévues sont succesivement « Nuit
Publique » écrit par Gary Victor et mis en scène par Daniel Marcelin, «
Haïti, Cri d’espoir » de Georges Béleck, « Kavalye Polka » de Sito Cavé, «
L’Exception et la Règle » écrit par Bertolt Brecht et mis en scène par
Piétro Varrasso, « Service Violence-Série » des créations Nous, « Thérèse en
Mille Morceaux » écrit par Lionel Trouillot et mis en scène par Maurice
Levêque.
Outre des représentations théatrales, il est prévu des lectures scéniques,
débats et conférences.
La première édition du festival « Les 4 Chemins » est dédiée à la mémoire du
belge Max Porfondry et de trois illustres artistes haïtiens disparus, Hervé
Denis, Théodore Beaubrun dit Languichatte et Félix morisseau Leroy.
[vs apr 19/09/2003 10 :00]