P-au-P., 14 avr. 08 [AlterPresse]--- Un calme apparent règne à Port-au-Prince, 48 heures après la mesure conjointe du président René Préval et des importateurs de diminution du prix du riz et le renvoi par le sénat du premier ministre Jacques Édouard Alexis.
Tot ce 14 avril, les rues de la capitale se sont progressivement remplies de gens se rendant à leur travail, de petits commerçants reprenant leurs activités habituelles au niveau du secteur informel et de chômeurs en quête de quelques moyens de subsistance, constate l’agence en ligne AlterPresse.
La présence des élèves a été moins remarquable que d’ordinaire, des parents ayant décidé d’observer encore la situation et de garder leurs enfants à la maison.
Les magasins, les banques et autres entreprises de service ont généralement rouvert leurs portes, sauf ceux qui ont été sérieusement affectés par les casses ayant accompagné les manifestations contre la vie chère de la semaine dernière, qui ont fait 6 morts et des dizaines de blessés.
A la place des vitres cassées sur les devantures de plusieurs magasins à Pétion-Ville (périphérie est), Delmas (secteur nord/nord-est) et au centre de Port-au-Prince, des feuilles de planches ont été installées afin de sécuriser les espaces et préserver, dans certains cas, ce qui reste de marchandises, de matériels et autres produits.
Les dégâts au niveau du secteur privé ne sont pas officiellement évalués, mais la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Haiti (CCIH) parle de « catastrophe ».
Les marchés publics fonctionnent également à Delmas, Pétion-Ville et Carrefour (Sud). Les fruits, légumes, céréales ainsi que d’autres produits de consommation courante sont disponibles dans l’atmosphère coutumière de négociation sans fin des prix.
Tot dans la matinée de ce 14 avril, il n’était pas possible d’évaluer l’impact de la baisse à 43 dollars du prix du sac du riz, diminué ainsi de 8 dollars, après une entente entre le président Préval et les importateurs de riz.
Le chef de l’État a exprimé le souhait que les distributeurs et détaillants s’arrangent pour que la baisse bénéficie au consommateur final.
Cependant, tout impact de cette mesure ne pourra être que de courte durée, la période de validité ayant été fixée à un mois.
La normalité pourra-t-elle aller au-delà des prochaines semaines, se demandent perplexes des habitants de la capitale, qui ne sont pas rassurés sur la possibilité de maintenir les prix à un niveau abordable sur le long terme.
Une éventuelle réduction du prix des engrais est envisagée afin de relancer la production agricole. Mais une telle mesure, si elle entre en vigueur prochainement, ne pourrait avoir des effets que vers la fin de l’année en cours, admet le secrétaire d’État à l’agriculture, Joanas Gué.
Ce dernier doit se rendre le 15 avril au Venezuela afin de discuter avec les autorités politiques à Caracas sur la vente à Haiti d’engrais à prix réduit.
Mais, dans l’immédiat, un important dossier politique attend d’être traité : celui de la nomination d’un nouveau premier ministre et la formation d’un autre gouvernement, dans un contexte où des groupes favorables à l’ancien président Jean Bertrand Aristide (actuellement en exil en Afrique du Sud) se montrent actifs, notamment à travers les mouvements de la semaine dernière.
« Il n’y a pas de temps à perdre », estiment des secteurs politiques et sociaux.
Mais, aucune information n’est encore disponible à propos des démarches que devrait entreprendre rapidement le président Préval pour doter le pays d’une nouvelle équipe gouvernementale.
Cet exercice peut se révéler difficile, tenant compte du fait qu’aucun parti ne dispose d’une majorité au parlement, alors qu’une majorité sénatoriale ponctuelle s’est constituée pour renverser le gouvernement de Alexis.
Les 16 sénateurs qui ont infligé un vote de censure au chef du gouvernement sortant paraissent opter pour un premier ministre « rassembleur ».
Cependant, un nouveau gouvernement ne constituerait qu’un pas vers le maintien de la stabilité politique, que le président Préval présente comme son ultime objectif politique.
Car, Haiti est en retard sur la tenue d’élections partielles pour renouveler 1/3 du sénat composé de 30 sénateurs. Actuellement, 27 sénateurs sont en fonction, après le décès d’un d’entre eux et la destitution de deux autres.
Une partie du groupe des 16 est concernée par les élections à venir, suite à l’expiration de leur mandat de 2 ans depuis début 2008.
Des élections indirectes au niveau des collectivités territoriales devraient, d’autre part, permettre d’achever la charpente institutionnelle d’Haiti.
Faudrait-il ajouter à cet agenda des démarches de révision constitutionnelle, ardemment souhaitée par Préval ? [gp 14/04/2008 13:00]