Par Christophe Wargny
Le gouvernement français poursuit son objectif d’effectuer 25000 expulsions d’étrangers par an et de choisir les immigrés qui répondent aux besoins de la France. La multiplication des initiatives prises dans ce sens crée de plus en plus un climat de terreur anti-immigrés dans la France de Nicolas Sarkozy, selon l’historien francais Christophe Wargny, qui livre son analyse à AlterPresse.
Ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, avait multiplié les initiatives contre les étrangers en situation irrégulière, ou prétendue telle. En s’en prenant notamment aux enfants scolarisés. En France, un élève a le droit de fréquenter l’école, quelle que soit la situation de ses parents. Un mouvement d’opinion sans précédent l’avait obligé, en 2006, à en régulariser plusieurs milliers et à mettre en veilleuse les rafles, sous la pression notamment du Réseau Écoles sans frontières.
Élu président, grâce notamment aux voix de l’extrême droite xénophobe, Nicolas Sarkozy multiplie les textes et les initiatives. Avec un double but : renvoyer un maximum d’étrangers et choisir les immigrés professionnels dont la France à besoin. À cet effet, il a doté son gouvernement d’un puissant ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du co-développement. Une première depuis 70 ans et le régime de Vichy !
Prenons cette liste de mots à l’envers.
Co-développement ? Doter les émigrés qui rentrent au pays de moyens qui leur permettent d’investir ou de s’investir, l’idée est utile. À deux conditions. Disposer de moyens : formation, conseil, prêts ou dons, suivi… Quand on sait que la France a diminué de 15% son aide au développement en 2007, tournant le dos aux objectifs su Millénaire (la part du PNB de la France est passée de 0,47 à 0,39 %), on mesure le côté gadget.
Seconde condition : en finir avec « l’immigration choisie », qui vise à ponctionner les meilleurs professionnels des pays francophones et autres. Comment peut-on prétendre renvoyer des travailleurs mieux formés tout en encourageant l’exode des plus performants ? Haïti en sait quelque chose, souvent privé des ressources humaines indispensables à la construction du pays. Le prix de la fuite des cerveaux est sans commune mesure avec l’aide promise.
Intégration ? L’absence de mesures nouvelles, autres que policières ou administratives, en faveur des « quartiers difficiles », marque une volonté d’abandon. Le chef de l’Etat, qui avait promis jadis « un nettoyage au karcher » continue à préférer les yachts des milliardaires aux visites dans la banlieue nord de Paris.
Identité nationale ? On attend.
Immigration ? Là, on n’attend pas. Le gouvernement a une ambition. Il s’est fixé des objectifs qu’il peine à atteindre : 25 000 expulsions par an en métropole. Sans compter les milliers de reconduites à partir des départements d’outre-mer, principalement la Guyane et, plus encore Mayotte (océan Indien). Les préfets sont invités à faire du chiffre. Qu’importent les dossiers, ils ont, à la manière d’un cadre commercial, des objectifs à atteindre au plus vite. Ce qui, bien sûr, engendre des situations cauchemardesques.
Pour la seule semaine dernière, deux cas à la limite du soutenable. Une Béninoise est mariée à un Français. Elle a un emploi et son insertion est active dans la vie associative. Deux ans, après, son mari décède, sans qu’elle est encore la nationalité française. Jugeant que « la communauté de vie » était interrompue, la préfecture juge la veuve « expulsable ». Les réactions l’ont, in extremis, empêchée.
Un jeune Malien est sur le point d’être interpellé. Il a aussi un emploi, mais pas tous ses papiers. Il se jette dans la Seine, sous les yeux de son épouse. Et meurt de congestion.
Des immigrés, munis d’une proposition d’embauche et soutenus par leur employeur, n’osent pas se rendre auprès des services de l’état par peur d’être dénoncés ou arrêtés.
On pourrait, à l’envi, citer d’autres « faits divers », illustrations du climat de terreur anti-immigrés dans la France de Nicolas Sarkozy. Une telle politique ne facilite pas l’intégration ! Le quotidien Le Monde (centre gauche) du 8 avril, sous le titre Incohérence et injustice le résume ainsi : Il a fait adopter, pour la quatrième fois en quatre ans, une nouvelle loi sur l’immigration, qui définit les bases de l’immigration choisie. Le président de la République, qui s’est fait le chantre, au soir de son élection, des « valeurs de tolérance, de liberté, de démocratie et d’humanisme », prétend marier fermeté et justice : on perçoit bien la première, mais on cherche en vain la seconde.
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