Par Solidarite Fwontalye / Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti)
Transmis à AlterPresse le 9 avril 2008
Tôt dans la matinée de ce mercredi 9 avril 2008, les tensions ont véritablement commencé à Ouanaminthe. Partout dans les rues et les quartiers, on voit brûler des pneus. Les flammes font peur et obligent presque toutes les écoles ainsi que les banques à fermer temporairement afin d’éviter d’être victimes d’actes de vandalisme et de pillage des groupes en colère.
La présence des agents de la PNH et de la MINUSTAH est remarquée dans certains endroits de la ville et spécialement devant les locaux abritant la douane de Ouanaminthe. La brigarde douanière semble ciblée par des membres de la population qui l’accusent de rendre difficiles les transactions douanières, alors qu’au fond, elle joue la carte de la corruption, déclarent-ils.
Une marchande déclare à Radio Power que des brigardiers ont déjà confisqué ses marchandises supposément interdites (oeufs, poules, et autres) pour les lui remettre après la fermeture du travail, c’est-à-dire le soir, loin des regards ou pour les négocier avec d’autres commerçants. Pour éviter le pire avec une population en colère, les agents de la PNH effectuent des patrouilles dans des zones sensibles.
À la base de cette situation : la montée vertigineuse des prix des produits de première nécessité. Cette situation qui règne actuellement à Ouanaminthe ne constitue pas un fait isolé, mais s’inscrit dans le cadre du soulèvement qui semble général dans le pays comme pour protester contre l’inaction du gouvernement sur la hausse des prix des produits de base pour la consommation.
Dans le Nord-est, la majorité des familles se trouve dans l’impossibilité de satisfaire ses besoins les plus élémentaires, comme la nourriture, les vêtements, etc.. La région a perdu depuis longtemps de sa potentialité en matière de développement agricole. Les paysans préfèrent vendre leurs forces de travail aux cultivateurs dominicains au lieu de travailler leurs petits lopins de terre. Ils sont découragés parce qu’ils ne trouvent aucun encadrement de la part des responsables de l’Etat. Et pourtant, nous ne cessons pas de dire qu’Haïti est un pays essentiellement agricole.
Et comme résultat : la population du Nord-Est dépend pour une grande part des produits que fournit la République Dominicaine. On se demande s’il existe une politique de développement agricole en Haïti ; si c’est le cas, quel rôle y joue le ministère de l’agriculture et quelles sont les actions concrètes qu’il a déjà entreprises pour augmenter la capacité du pays au niveau de la production ? Aujourd’hui, c’est un scandale qu’après plus de 200 ans de notre indépendance, les Haïtiens continuent de crier famine.
Si rien n’est fait dans l’immédiat pour palier à cette situation de misère et de détresse, le pays sera intenable. "Solidarite Fwontalye / Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants", organisation de droits humains siégant à Ouanaminthe, lance un appel à l’investissement à grande échelle dans le secteur agricole en vue de relancer la production nationale et de procéder à la création d’emplois à haute intensité. Cet appel est d’abord adressé aux responsables de l’Etat et du gouvernement, et ensuite à tous les entrepreneurs du secteur privé qui croient et veulent un développement durable pour Haïti.
Solidarite Fwontalye / Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (Haïti)
Communication de la Section Migration.