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Haïti/ Canada : Lancement du projet « Repenser Haïti avec la jeunesse haïtienne »

Par Cindy Drogue

P-au-P., 12 mars. 08 [AlterPresse] --- L’Association des Ingénieurs et Scientifiques Haïtiano-Canadiens (AIHC) lancera, Le 15 mars 2008, un projet inédit de visioconférences entre Haïti et sa diaspora (canadienne).

D’après le document de référence, le projet consiste à organiser et diffuser 10
visioconférences entre Montréal, Port-au-Prince et différentes villes de provinces
( Hinche et Jacmel pour la première conférence), sous le thème générique « Repenser Haïti avec la jeunesse haïtienne ».

L’hôte des visioconférences à Port-au-Prince sera la Faculté des Sciences de l’Université d’Etat d’Haïti et l’École de Polytechnique de l’Université de Montréal au Cananda.

AlterPresse a interrogé (par tchat) la coordonnatrice du projet, la journaliste Nancy Roc.

AlterPresse : Pouvez-vous nous préciser ce qui vous a motivé dans la conception de
ce projet ?

Nancy Roc : D’abord, depuis mon arrivée au Québec, je me suis rendue compte de
l’importance du rôle que peut jouer la diaspora en particulier à Montréal qui est
un véritable « trésor de cerveaux » ; ceci, malgré une absence de vision
gouvernementale sur l’apport concret de la diaspora au-delà des limites de la
Constitution.

De plus, suite au dernier concert de Wyclef Jean à Port au Prince, j’ai constaté
que les 100.00 jeunes présents ont chanté en anglais pendant deux heures de
temps...dans un pays soit-disant à 60% d’analphabètes et je me suis rendue compte
que l’on ne connaissait sans doute pas la jeunesse haïtienne aujourd’hui dans ses
véritables composantes.

De ce constat, j’ai proposé cette idée de mieux explorer les donnes de la jeunesse
au professeur Samuel Pierre qui a poursuivi l’idée en me proposant de mettre sur
pied une série de visioconférences.

Apr : Avez-vous rencontré des obstacles dans l’élaboration du projet ?

N. Roc : Pour réaliser ce projet, l’Association des Ingénieurs et Scientifiques
Haïtiano-Canadiens (AIHC) a du mettre sur pied un Comité de Coordination
International, un Comité de Pilotage National ainsi que des comités locaux
d’organisation dans chaque ville de province.

Les organisateurs de l’événement du 15 mars prochain ont dû faire preuve d’une
détermination et d’une persévérance exemplaires pour pouvoir lancer le projet de
ces visioconférences. En effet, ils ont fait face à de nombreux obstacles pour
arriver à leur but : des obstacles d’ordre sociologique, des obstacles
technologiques et financiers.

Pour l’ingénieur et Professeur Raymond Noël, président du Comité National de
Pilotage, les obstacles sociologiques, qui selon lui ont été les plus importants « 
renvoient au scepticisme grandissant dans notre société, qui s’enferme hélas trop
dans une culture de l’échec. Les réflexes qui s’en dégagent laissent peu de place
à l’imagination, aux idées nouvelles, et bien entendu au goût du risque. Dans un
tel contexte, la mobilisation de partenaires institutionnels et individuels est
loin d’être aisée ».

D’autre part, dans un pays connu pour sa déficience en infrastructures, la mise en
œuvre du projet comme prévu, dans les différentes villes ciblées, a vite fait face
aux déficiences du pays en matière de pénétration des technologies de
l’information : absence de fournisseurs d’accès Internet dans des villes, mauvaise
qualité ou inexistence du signal de la TNH dans d’autres, indisponibilité de
terminaux de visioconférence, limitation du réseau téléphonique, insuffisance du
débit du signal Internet pour la visioconférence, etc.

Selon M. Raymond Noël, cela a amené dans un premier temps à réduire le nombre de
villes participantes et risque de compromettre l’extension des visioconférences
dans les provinces.

Toutefois, les organisateurs restent optimistes car pour le Professeur Samuel
Pierre, « cette expérience unique qui consiste à mettre en situation de dialogue
différentes villes du pays et un segment de la diaspora, par l’intermédiaire de
ces technologies, constitue une démonstration éloquente de ce que le pays pourrait
faire en termes de pratique démocratique (e-democracy), de formation à distance
(e-learning), de commerce électronique (e-commerce), de télétravail et de
télésanté.

Apr : Les jeunes qui auront la parole pendant les conférences, comment
ont-ils été "choisis" ?

N. Roc : en demandant aux nombreuses organisations de jeunes à Montréal aussi
bien qu’en Haïti de participer et de choisir des intervenants. Nous avons fait des
partenariats avec de nombreuses associations de jeunes parmi lesquelles :
l’Association Haïtienne pour le développement des TIC (AHTIC), Jeune Haïti /
Fondation Espoir, l’École Supérieure d’Infotronic d’Haïti (ESIH), FOKAL, Réseau
Citadelle- Cap Haïtien, IDEJEN, Jeunes unis pour la protection de l’environnement
et le développement (JUPED), Mouvement Paysans Papaye (MPP) de Hinche.

A Montréal il y aura les jeunes de la Chaire de recherche industrielle en systèmes
réseautiques mobiles de prochaines générations de l’École Polytechnique de
l’Université de Montréal, de la Fondation Québec-Haïti pour une scolarisation
universelle de qualité (QHASUQ), de la Fondation Canado-Haïtienne pour la
promotion de l’excellence en éducation (FOCHAPEE), de la Jeune Chambre de Commerce Haïtienne et de la Maison d’Haïti. La visoconférence aura lieu à l’École de
polytechnique de l’Université de Montréal et nous n’avons plus une place qui nous
reste.

Apr : Pouvez-vous nous donner une idée du nombre de jeunes que vous
envisagez de toucher ?

N. Roc : Pour la première visioconférence, nous allons toucher ( en transmission
direct par satellite) 1.000 jeunes ( mille) : 200 à la Faculté des Sciences, 200 à
Jacmel à travers l’Alliance française et 600 à Hinche. Le MPP a fait un travail
extraordinaire de mobilisation pour ce projet. C’est ce que nous voulions car il
faut que les villes s’approprient le projet pour être sélectionnées. Nous appelons
à la participation et non à assister la population.

Le but principal de ce projet étant de donner la parole aux jeunes haitiens, les
écouter et receuillir leurs revendications et idées dans une banque de données. À
cet effet, il y aura aussi la tenue d’ateliers de travail dans chaque ville après
les conférences et les comité locaux d’organisation (CLO) nous transmettront les
travaux, ceux-ci seront analysés et ensuite distribuer à la presse à la fin de
l’année.

Nous espérons que la réussite de cette première visioconférence encouragera
d’autres partenaires à nous rejoindre, en particulier la communauté internationale
qui n’a pas répondu à l’appel, sauf pour le PNUD et le Ministère des Relations
Extérieures du Québec.

Apr : A ce propos, quels sont les bailleurs du projet ?

N. Roc : Le CONATEL, le Ministère de l’Éducation et de la Formation
Professionnelle (MENFP), le Ministère des Haïtiens vivant à l’étranger (MHAVE), le
Ministère de la Condition Féminine et aux Droits de la Femme (MCFDF), Ministère
de la Santé et de la Population (MSPP)

Apr : Vous avez l’appui de nombreux médias également, c’est bien cela ?

N. Roc : Oui la presse a été formidable et nous avons l’appui de plusieurs
médias dont : la Télévision Nationale d’Haïti (TNH), Télé Haïti, Télémax, Le
Matin, Le Nouvelliste, Radio Métropole, Radio Vision 2000, Signal FM et Radio
CKUT à Montréal avec Raymond Laurent qui nous a offert de retransmettre la
visioconférence en direct sur www.ckut.ca.

La TNH s’est montrée formidable et nous tenons à remercier son directeur général,
Pradel Henriquez. [1]

Apr : Quels résultats concrets attendez-vous de ce projet ?

N. Roc : L’objectif principal de ce projet est de contribuer à redonner l’espoir
à une jeunesse exclue et à rendre Haïti plus attractif comme pays pour ses jeunes.
Cette initiative permettra de mieux appréhender les attentes d’une jeunesse exclue
des débats médiatiques et sociopolitiques autant de permettre un transfert de
connaissances, à moindres coûts, vers la terre natale afin que cette génération ne
soit pas sacrifiée comme les générations précédentes et qu’elle puisse avoir
d’autres opportunités grâce à l’apport des TICs de l’extérieur.

Le projet « Repenser Haïti avec la jeunesse haïtienne » devrait permettre aux
Haïtiens et Haïtiennes, restés au pays et dans la diaspora, de se faire une idée
plus réaliste des attentes de la jeunesse haïtienne autant que de lui offrir des
opportunités en matière de transferts de connaissance et de débouchés
professionnels.

Nous espérons qu’un tel dispositif pourra à l’avenir servir à reconnecter le pays,
dans ses composantes internes et externes, donnant ainsi corps à une « Haïti
virtuel » qui déborderait le simple cadre des frontières nationales, l’Haïti du
21e siècle. Il permettrait également à ces diverses composantes de pouvoir
débattre plus facilement des grands enjeux de la vie nationale, dans une quête de
compréhension commune considérée comme passage obligé vers la cohésion sociale et
point de départ de l’action concertée.

Nous espérons que les potentiels partenaires locaux et internationaux
comprendront les enjeux inhérents à la réussite de ce projet pilote inédit. Il
faut que les gens se rendent compte de l’importance du transfert des connaissances
dans un pays où 83% des cadres se trouvent à l’étranger

Apr : Merci.

N. Roc : Merci beaucoup à vous et nous tenons particulièrement à remercier tous
nos partenaires et invitons les autres à nous rejoindre sinon le projet ne pourra
pas se poursuivre sur toute l’année. Ce serait une grande perte pour la jeunesse
surtout que c’est une action civique et citoyenne et nous avons, tant à Montréal
qu’à Port au Prince donné notre temps gratuitement pour ce projet.

Je tiens aussi à saluer la détermination du Professeur Samuel Pierre et celle des
membres du Comité National de Pilotage sans lesquels nous aurions été découragés
par la quantité d’obstacles qu’il fallait surmonter.

Apr : Merci.

La téléconférence du 15 mars sera retransmise en direct (1O h AM) sur la Télévision
Nationale d’Haïti à travers le pays et sur www.ckut.ca à partir de 11hAM. Le
champion du monde de boxe des super mi-moyens de la WBA, Joachim Alcine et la
vedette internationale Wyclef Jean contribueront au lancement de cette première
téléconférence.

Les programmes de la conférence du 15 mars et des suivantes sont disponibles sur
le site du projet : http://www.haiti-quebec.ca/. [cd gp apr 12/03/2008 20:00]


[1NDLR : AlterPresse est aussi partenaire du projet