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Minorité haïtienne en Floride

La marge de manœuvre d’un élu haïtiano-américain

Ohio (Etats-Unis d’Amérique), 3 mars 03 [AlterPresse] --- Comme représentant de la Floride, Ronald Brisé participe au vote du budget annuel de son État, à l’élaboration de projets de loi, à la révision de certaines lois concernant la Floride, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.

Son district comporte pas moins de cent trente-cinq mille habitants et comprend, entre autres, Miami, Airport Town, Miami Shores, Biscayne Part, North Miami et une partie de Dade Miami County.

Faire le pont …

Investi dans ses fonctions en 2008, cet élu haïtiano-américain a un droit de regard sur toutes ces villes et entretient des relations privilégiées avec les différents élus locaux.

Ronald Brisé se doit d’être attentif aux requêtes de ces derniers en vue de les représenter valablement à la Chambre des représentants de la Floride basée à Tallahassee, la capitale de cet État.

Ronald Brisé est en situation de faire le pont entre l’État fédéral, les élus locaux et les différentes communautés. Mais arrive-t-il à influencer certaines décisions fédérales en faveur de celles-ci, en particulier (en faveur de) la minorité haïtienne et haïtiano-américaine ?

Influence sur les décisions fédérales

« Mon influence sur les sénateurs fédéraux dépendra en grande partie de mon influence sur la politique locale », explique le représentant de l’État de Floride.

« Quand les élus fédéraux veulent s’informer sur les différentes communautés ou rendre visite à celles-ci, ils recueillent d’abord l’avis du représentant (de l’État de Floride) », insiste Ronald Brisé.

La minorité haïtienne et haïtiano-américaine constitue la plus forte communauté (en nombre) dans l’État de Floride, après les cubains et les noirs américains.

Cette importance démographique confère à la communauté (haïtiano-américaine) un pouvoir politique certain. On peut même parler de « force économique », notamment pour les trois comtés où l’on retrouve beaucoup d’Haïtiens et d’Haïtiano-américains, à savoir Miami Dade, Broward et North Miami Beach.

Ronald Brisé et le Parti démocrate

En plus du poids démographique de la communauté, la fonction de Ronald Brisé dans le parti démocrate lui donne un pouvoir consultatif important pour tout ce qui concerne les différentes communautés de Floride, en particulier la minorité haïtienne et haïtiano-américaine.

« Je préside une section au sein du parti. Avant tout vote concernant l’État de la Floride et ses communautés, les élus démocrates doivent me consulter. Cela me donne un certain pouvoir. Ça fait partie du (sens de) leadership du parti démocrate », explique Ronald Brisé.

L’actuel représentant de l’État de Floride est de surcroît le vice-président du « Black Caucus », qui a justement « la responsabilité de gérer les affaires des communautés noires ».

Statut temporaire pour les sans papiers

La marge de manœuvre de Ronald Brisé paraît toutefois assez réduite à propos de certains sujets de grande préoccupation pour la communauté haïtienne. C’est le cas, par exemple, du statut temporaire pour les sans papiers ( en anglais « TPS » ) dont ne bénéficient pas les illégaux haïtiens.

Le président René Préval a écrit récemment à son homologue américain pour solliciter l’application de cette disposition (légale) en faveur des « illégaux » haïtiens.

« Divers groupes au sein de la communauté haïtienne et haïtiano-américaine travaillent fortement sur cette question. Plusieurs sénateurs fédéraux, favorables à l’octroi du TPS aux Haïtiens, l’ont réclamé par écrit au président Georges Walker Bush », souligne le représentant de l’État de Floride.

Ronald Brisé dit chercher également le support du gouverneur de Floride, Charlie Crist, précisant qu’ « il faut trouver un moyen de convaincre le président Bush ».

Pieds mouillés pieds séchés

Un autre sujet de préoccupation pour les Haïtiens de Floride, et pour lequel les efforts du représentant de la Floride peuvent ressembler à des coups d’épée dans l’eau, c’est la fameuse question de "pieds mouillés pieds séchés" (en anglais « Wet foot dry foot ») qui s’applique seulement aux réfugiés cubains ayant réussi à fouler le sol des Etats-Unis d’Amérique.

Bien que l’on ne soit plus en période de guerre froide, Ronald Brisé juge la question très sensible et ne croit pas que cette disposition sera étendue, dans le court ou moyen terme, aux autres réfugiés (aux ressortissants d’autres pays). à moins que survienne un changement politique radical à Cuba, estime-t-il.

« L’état de Floride ne peut rien faire à ce sujet, c’est fédéral. Mais nous tentons quand même », martèle l’élu haïtiano-américain.

Officiellement, le statut « Wet foot dry foot » a été (jadis) mis en application en conformité avec le « Cuban Readjustment Act ».

« C’est une disposition spéciale pour un groupe de gens à un moment où les Etats-Unis d’Amérique pensaient qu’ils pouvaient être attaqués par la Russie Soviétique à travers Cuba », rappelle Ronald Brisé.

Projet de loi sur l’immigration

Autre question de préoccupation pour la communauté haïtienne : le projet de loi sur l’immigration - destiné à régulariser plus de onze mille sans papiers - qui n’a toujours pas été voté.

Ronald Brisé fait du mieux qu’il peut pour sensibiliser des élus fédéraux sur la question. Mais le dossier est complexe.

Histoire de deux pays

« Les États-Unis, c’est une histoire de deux pays : les grands États - tels que New York, Floride, Texas, Californie, Arizona, Nevada - qui tolèrent les immigrants et beaucoup d’autres États (ceux du milieu notamment) qui ne les digèrent pas ».

L’hostilité de ces États s’expliquerait par le fait que ces derniers croient que les immigrants viennent leur enlever des opportunités d’emplois et de meilleures conditions de vie.

Un État fait d’immigrants

Ronald Brisé rappelle que les Etats-Unis sont un pays qui a été bâti par les immigrants et que « l’État de Floride est fait d’immigrants ».

La Floride pratique donc une politique assez souple à l’égard des immigrants sur bien des points, comme par exemple dans les cas de personnes qui sont détentrices d’un permis de conduire alors qu’elles sont en situation irrégulière aux États-Unis. Des milliers d’Haïtiens se retrouveraient dans cette situation.

Selon Ronald Brisé, « même pour des raisons de sécurité, il est préférable qu’on permette aux sans papiers d’avoir accès à un permis de conduire. Car, on peut alors mieux contrôler leurs déplacements ».

L’actuel représentant de l’État de Floride est né à Port-au-Prince (la capitale d’Haïti) en 1974. Il est rentré aux Etats-Unis à l’âge de sept ans. Il est détenteur d’un MBA en management et télécommunications respectivement. Il fut respectivement joueur et entraîneur de basket-ball au collège (à l’université). [vs apr 03/03/08 1:00]

Note : Notre collaborateur Vario Sérant, directeur de l’information à Télé Haïti, est aux Etats-Unis dans le cadre de la couverture des prochaines élections primaires dans l’Ohio. La tournée de l’équipe de reportage de Télé Haïti est facilitée par « US Public Diplomacy ».

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