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Haïti-Etat civil et nationalité : Appréhendés pour n’être pas en mesure de s’identifier

Le problème d’état civil et celui de la nationalité sont aujourd’hui encore des sujets préoccupants.

En dépit des efforts consentis en 2006 par le régime intérimaire, de nombreux nationaux sont aujourd’hui encore incapables de s’identifier. Tandis que le Décret du 1er juin 2005 relatif à l’identification de personne majeure est toujours en vigueur…

P-au-P, 03 mars 08 [AlterPresse] --- Joseph est Haïtien dans toutes ses veines et dans toutes ses racines. Il est né dans une section rurale du département du Sud-Est de parents haïtiens, à la fin de la dictature des Duvalier, au début des années 1980, selon les informations obtenues par l’agence en ligne AlterPresse.

Son statut est « Paysan » et cela est visible sur l’acte de naissance de tout Haïtien, né durant la dictature.

Rentré à Port-au-Prince pour des raisons d’étude, Joseph y est, depuis, resté. A cause de la situation socioéconomique désastreuse de sa famille, ce jeune ne pouvait achever ses études secondaires. Il est livré à lui-même.

A la capitale haïtienne où il vit piteusement, Joseph est privé de tout. Manque d’encadrement familial et étatique, Joseph n’est même pas en mesure de s’identifier. La décision des autorités électorales de doter, en 2006, les Haïtiens majeurs d’une Carte d’identification nationale (Cin), à la place de la traditionnelle carte électorale, constituait un ouf de soulagement pour ce jeune homme.

Malheureusement, à l’instar de bon nombre de citoyennes et citoyens haïtiens, Joseph a égaré sa précieuse pièce d’identité. Récemment, Joseph a été épinglé par la police pour n’avoir pas eu, en sa possession, de pièce d’identification.

S’identifier, une obligation citoyenne

L’identification de toutes les personnes majeures sur le territoire haïtien est désormais obligatoire, selon des dispositions adoptées sous l’ancienne administration intérimaire de Boniface Alexandre/Gérard Latortue.

Publié le jeudi 7 juillet 2005, dans les colonnes du Moniteur (Journal officiel de la République d’Haïti), le décret du 1er juin 2005 prévoit des sanctions pénales à toute personne majeure surprise sans sa Carte d’identification nationale.

« A partir du 1er janvier 2008, toute personne majeure, surprise sans sa Carte d’identification nationale, paiera une amende de cinq cents (500) gourdes sur procès-verbal dressé par un officier de police, prononcée séance tenante et toutes affaires cessantes par le tribunal de paix », lit-on à l’article 27 de ce décret adopté par le tandem Alexandre/Latortue.

Ce décret, relatif à la Carte d’identification nationale, qui semble avoir été jeté aux oubliettes, serait en cours d’application depuis un certain temps.

Dans certaines patrouilles de routine, la police a souvent procédé à l’arrestation de personnes incapables de s’identifier. Dernièrement, un jeune homme d’une vingtaine d’années a été retenu à Delmas, pendant plus d’une heure, dans un véhicule de la police, arrêté pour n’avoir détenu aucune pièce d’identification.

Le jeune homme a été relâché à la suite d’une supplication de sa grande sœur auprès des policiers.

Au dernier trimestre de 2007, deux coopérantes européennes ont passé plusieurs heures en garde à vue au commissariat de Pétion-Ville. Les deux jeunes femmes étaient en train de se promener, sans leur permis de séjour, lorsqu’elles ont été interpellées par une patrouille policière.

Enregistrement de nouvelles citoyennes et de nouveaux citoyens

La mission de recenser progressivement les nouvelles citoyennes et les nouveaux citoyens, qui deviendront des électeurs potentiels, est confiée à l’Office national d’identification (Oni). L’Organisation des Etats américains (Oea) supporte ce processus qui cible les Haïtiens en âge de voter.

Certaines personnes, dont les cartes ont été défectueuses, ont la chance de refaire cette pièce importante qui, selon toute vraisemblance, remplace la carte d’identité fiscale de la Direction générale des impôts (Dgi), disparue à la faveur d’un matricule fiscal.

Aux élections de 2006, 3,5 millions de citoyennes et citoyens ont été appelés aux urnes pour choisir les nouveaux dirigeants du pays.

Appliquer des sanctions à l’encontre de toute personne majeure est une chose, la doter de ses pièces d’identité en est une autre. L’Etat devrait d’abord résoudre le problème d’état civil dans le pays avant de mettre en vigueur une quelconque disposition, déclare un activiste de droits humains à AlterPresse.

A ce problème d’identification vient se greffer celui de la double nationalité qui crée des confusions au sein de la 48e Législature.

La double nationalité haïtienne et étrangère n’est admise dans aucun cas, selon la Constitution de 1987. Pourtant, des suspicions pèsent sur certains parlementaires (sénateurs et députés). Des ministres seraient également soupçonnés. [do rc apr 03/03/2008 0:30]