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Par Wooldy Edson Louidor
P-au-P., 22 févr. 08 [AlterPresse] --- Dans leurs différentes interventions publiques réalisées en ce début d´année 2008, l´actuel président haïtien René Garcia Préval et son premier ministre Jacques Édouard Alexis n´ont cessé d´affirmer qu´ils ne promettent pas de « solutions miracles » aux différents problèmes auxquels Haïti est confronté.
La hausse du coût de la vie, le chômage, la misère, l´absence de services sociaux et d´infrastructures de base pour la majorité de la population : autant de problèmes dans le pays qui exigent une solution urgente !
Notre chef d´état n´est pas porté à faire des promesses, même lors de sa campagne électorale. Cependant, il s´est présenté sous la bannière de l´ « espoir » (à la fois nom de son parti politique et mot magique de sa campagne) qu´il incarnait pour la majorité du peuple haïtien qui a vécu une longue période d´instabilité politique, de terreur et d´explosion sociale sous la deuxième version du régime de Jean-Bertrand Aristide et au cours de la transition assurée par le tandem Boniface Alexandre- Gérard Latortue.
Cet espoir s´est converti peu à peu en désespoir, ce qui représente pour plus d´un le vrai miracle opéré par l´administration Préval-Alexis, fortement questionnée ces jours-ci par le parlement.
Un bilan pas trop brillant pour l’année 2007
Il est évident que le bilan de l´actuel gouvernement haïtien n´est pas brillant.
Bien sûr, il peut se réjouir de la stabilisation des indicateurs macroéconomiques, concrètement pour l´année 2007 : le Produit Intérieur Brut est en hausse (de 2,7 pour cent en 2006 à 3,7 pour cent en 2007), l´inflation réduite considérablement (de 46% en 2004 à environ 8 ½ % jusqu´à la mi-mai 2007), le taux de change du dollar américain stabilisé par rapport à la gourde (monnaie locale) et les investissements en croissance (3.1%).
Cependant, cette stabilisation des indicateurs macroéconomiques ne s´est pas reflétée dans le niveau, la qualité de vie et le bien-être de la population. Les prix des produits de première nécessité grimpent (allant de 20 à 50 % à la fin de l´année 2007, selon l´agence en ligne AlterPresse).
Et qu´en-est il de la production nationale dont l´augmentation pourrait contribuer à alimenter la population ou une bonne partie d´elle ? Au lieu de bénéficier de subventions de la part de l´État, les secteurs agricoles se trouvent asphyxiés par la compétition déloyale des pays riches ou plus compétitifs qui, par le truchement des accords de libre échange, envahissent notre marché avec des produits (moins chers que les nôtres) sans limitation de tarifs et quotas.
Certains de ces accords, comme la Loi Hope (Hemispheric Opportunity Trought Patnership Encouragement Act) votée par le parlement américain en décembre 2006, promettaient la création d’emplois dans le pays. Jusqu´ici, le peuple attend encore les 100 000 emplois ou du moins les 20 000 emplois espérés pour les premiers mois de l´année 2007.
Au contraire, le processus de « modernisation » des entreprises publiques annoncée par l´actuel gouvernement le 23 juin 2007 a envoyé au chômage plus d´un millier d´employés de la compagnie nationale de télécommunications (Teleco), la première entreprise publique à être frappée depuis la Minoterie et le Ciment d’Haïti !
Comme conséquences de la misère, du chômage, de la vie chère et du désespoir qui découle de cette situation, nos paysans fuient de plus en plus leurs terres pour augmenter le nombre de pauvres dans les bidonvilles des grandes villes ou pour émigrer de manière clandestine vers la République Dominicaine, les autres îles de la Caraïbe ou les États-Unis d´Amérique en risquant la déportation et même leurs vies dans des embarcations de fortune ou dans des voyages irréguliers vers le pays voisin.
Les jours passent, et l’actuel gouvernement se met au travail : il a déjà finalisé son Document de Stratégie pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (DSCRP), mais attend une bonne partie des aides promises par les bailleurs de fonds internationaux. Entretemps, la misère continue à frapper les familles pauvres et de la classe moyenne qui est en voie de disparition. Une commission présidentielle a été formée fin décembre 2007 pour réfléchir sur la question de la vie chère. Le peuple attend encore.
Un autre exploit de l´actuelle administration consiste en l´amélioration du climat sécuritaire du pays au cours de l´année 2007 rendue possible par la détermination du président Préval et de son équipe gouvernementale de neutraliser les bandits et ravisseurs d´otage retranchés dans des quartiers réputés de non droit et dans d´autres zones, par la performance des forces de l´ordre nationales et internationales et par les dispositions du pouvoir judiciaire pour juger et punir les bandits.
Cependant, vers la fin de la même année, il y eut une recrudescence de l´insécurité à la capitale haïtienne qui frappait surtout les enfants. Plus d´une dizaine d´enfants ont été kidnappés et quelques uns vilement assassinés, dont Schneider Hervil (7 ans) qui a été tué par ses ravisseurs à Cabaret (à une trentaine de kilomètres de la capitale) parce que ses parents ne pouvaient payer la rançon exigée par ceux-ci.
On se demande quand le pays disposera enfin d´une force publique nationale chargée de la sécurité des vies et des biens de la population ? Car, le climat d´insécurité réapparaît par moments parce que les gangs armés tendent perpétuellement à se reconstituer. Ces moments ponctués par la recrudescence de l´insécurité suffisent à endeuiller des familles et la population haïtienne. Ne faudrait-il pas plutôt appliquer ce sage conseil « prévenir vaut mieux que guérir » en créant cette force publique nationale ? Donc, la question centrale se pose : faut-il remobiliser l´ancienne force armée d´Haïti, ou renforcer la Police Nationale, ou encore créer une gendarmerie nationale ?
Une commission composée de 5 experts a été installée par l´actuel gouvernement depuis le 9 octobre 2007 pour réfléchir sur cette question. Les citoyennes et citoyens attendent encore.
Une espérance à toute épreuve
Heureusement, le peuple haïtien cultive la vertu de l´espérance. Pour ce, il a voté en faveur de l´espoir et espère encore malgré vents et marées et en dépit des discours défaitistes des autorités du pays.
Si non, ne serait-on pas tenté de créer une commission (présidentielle ou parlementaire) pour renouveler son espoir et le maintenir ? [wel gp apr 22/02/2008 13:00]