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Haiti-MINUSTAH-Abus sexuels : Une « conséquence directe de l’occupation du pays par les troupes étrangères »

Lettre ouverte de plusieurs organisations sociales aux ministres à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes, Marie Laurence J. Lassègue, de la Justice et de la Sécurité Publique, Me René Magloire

Document soumis à AlterPresse le 19 novembre 2007

Honorables Ministres,

La Plate-forme des Organisations Haïtiennes des Droits Humains (POHDH), la Plate-forme haïtienne de Plaidoyer pour un Développement Alternatif (PAPDA), la Plate-forme Interaméricaine des Droits humains, Démocratie et Développement (PIDHDD –Haïti) et les organisations Solidarité des Femmes Haïtiennes (SOFA) et Tèt Kole Ti Peyizan Ayisyen Ayisyen vous saluent et tiennent à exprimer leur indignation face au silence de Votre Gouvernement sur les cas d’abus sexuels perpétrés par des agents de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) contre plusieurs femmes et mineures de notre pays. Selon les informations rapportées par des médias, CENT HUIT (108) soldats et TROIS (3) officiers Sri lankais en sont les auteurs.

Vous n’êtes pas sans savoir, Madame et Monsieur les Ministres que pareils agissements sont coutumiers au personnel des Missions des Nations-Unies (ONU), en atteste l’organisation de réseaux de prostitution en ex-Yougoslavie, au Cambodge et en Mozambique. En Bosnie, tandis qu’elles effectuaient des missions de maintien de la paix, les Forces de protection des Nations-Unies (FORPRONU) ont violé des femmes bosniaques dans des camps, puis les ont traitées comme des prostituées.

En Haïti, plusieurs organisations haïtiennes dont la SOFA, ont à maintes reprises dénoncé et documenté par des rapports périodiques les abus sexuels dont ont été l’objet des femmes et des filles haïtiennes de la part des soldats, officiers civils, militaires et policiers des Nations Unies depuis l’arrivée de la MINUSTAH dans le pays. Il est donc évident que les agressions sexuelles dont sont victimes les femmes et mineures haïtiennes sont la conséquence directe de l’occupation du pays par les troupes étrangères.

Les Organisations signataires de la lettre condamnent fermement et sans réserve ces actes qu’elles qualifient d’atteinte grave à la dignité humaine de ces femmes et enfants et de violation flagrante des conventions internationales en la matière. Elles s’étonnent donc, Madame et Monsieur les Ministres à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes, de la Justice et de la Sécurité Publique, que les Ministères que vous dirigez :

1. N’aient jusqu’à présent élevé aucune protestation contre de tels agissements ;

2. N’aient ouvert aucune enquête pour faire toute la lumière sur ces informations ;

3. N’aient pas mis en place une cellule capable d’accompagner les victimes afin que justice leur soit rendue.

Réitérant leur engagement à lutter aux côtés du peuple haïtien pour le respect de ses droits garantis par les lois de la République et par les instruments internationaux, réaffirmant leur foi ardente dans les valeurs fondamentales des Droits de la Personne et compte tenu du fait que toute victime, quelque soit sa situation économique et son origine sociale, a droit à Justice et Réparation, les organisations signataires de la lettre vous demandent, Madame et Monsieur les Ministres à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes , de la Justice et de la Sécurité Publique :

1. De mettre en place une cellule d’accompagnement psychologique des victimes ;

2. De mettre en place une commission d’enquête mixte en vue de faire rapidement toute la lumière sur ces révélations ;

3. De rendre publics les résultats de cette enquête ;

4. D’exiger la publication des résultats des enquêtes menées par les Nations-Unies et par le pays d’origine des auteurs de ces actes ;

5. D’intenter rapidement une action en justice au niveau international contre les coupables afin de permettre aux victimes d’obtenir justice et réparation ;

6. De réclamer l’application de la politique dite ‘‘tolérance zéro’’ contre les soldats et officiers coupables d’abus sexuels à l’encontre des femmes et filles haïtiennes ;

7. De prendre les mesures qui s’imposent pour prévenir la répétition de tels actes ;

8. D’exiger le départ des troupes étrangères du pays.

Les organisations signataires de cette lettre espèrent, Honorables Ministres à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes, de la Justice et de la Sécurité Publique, qu’une suite célère sera donnée à cette demande et attendent que le Gouvernement haïtien, en particulier les Ministères que vous dirigez, prennent toute leur responsabilité dans ce dossier et agissent pour la sauvegarde de la dignité des victimes et de la Nation haïtienne toute entière.

Recevez nos salutations patriotiques.

Pour les organisations signataires :

Port-au-Prince, le 14 novembre 2007

PAPDA
Camille CHARLMERS

Carole P. JACOB
SOFA

PIDHDD-Haïti
Josué MERILIEN

Tèt Kole Ti Peyizan
Sylvain JEAN

POHDH
Marc-Arthur FILS- AIME

Cc : Monsieur Jacques Edouard ALEXIS, Premier Ministre
Monsieur Raynald CLERISME, Ministre des Affaires Etrangères
Monsieur Luc Echer JOSEPH, Secrétaire d’Etat à la Sécurité Publique
Monsieur Bam Ki Moon, Secrétaire des Nations Unies (ONU)
Commissions des Droits Humains (Sénat et Chambre des Députés)