Montrouis (Haïti), 29 août 07 [AlterPresse] --- Plusieurs dizaines de représentantes d’organisations de femmes d’Haïti et de l’étranger, dont des personnes vivant avec le virus du Sida (Pvvih), ont participé, le 28 août 2007, à Montrouis (nord de la capitale) à un atelier sur la féminisation du Vih/Sida, un fléau qui secoue le monde depuis plus d’une vingtaine d’années.
Convoqué par l’organisation internationale non gouvernementale Action Aid, cet atelier de deux jours qui s’est tenu sur l’habitation coloniale Moulin sur Mer, entre dans le cadre des preparatifs de lancement en Haïti d’une campagne contre la propagation de cette pandémie.
Débutée en 2006, notamment au Guatemala avec le soutient financier de la Action Aid, cette campagne, qui touche l’Amérique latine et la Caraïbe, vise à réfléchir sur des solutions aux problèmes de la violence faite aux femmes liés au Vih/Sida.
« Par cette campagne, nous voulons donner une visibilité à la violence faite aux femmes, montrer que ce problème est en étroite relation avec le Vih/Sida », affirme Alejandra Scampini de la Action Aid Brésil.
« Nous voulons que les femmes vivant avec le Vih soient impliquées dans les prises de décision », confie-t-elle à l’agence AlterPresse.
« Fanm pap tann », « Women won’t wait », « Mulheres NÃO esperam mais », « Las Mujeres no esperamos », littéralement « Les femmes ne peuvent pas attendre », est le principal slogan de cette campagne.
Un autre objectif signalé par Alejandra Scampini c’est l’élaboration d’un plan national de financement pour les programmes consacrés à la violence faite aux femmes et au Vih/Sida.
Un contexte fragilisant
« La violence sexuelle constitue un problème de société assez grave en Haïti », estime Rose Anne Auguste, spécialiste en santé communautaire.
D’autre part, chiffres à l’appui, Rose Anne Auguste évoque un ensemble d’éléments qui fragilisent la vie d’une Pvvih en Haïti. Il s’agit, selon elle, du manque d’accès aux antirétroviraux (Arv), de l’aliénation économique, des tabous sexuels, du déni, de la stigmatisation, de l’irresponsabilité de l’Etat, des bouleversements et violences politiques ainsi que de l’absence de politiques de soins appropriés.
Consultante à l’organisation internationale non gouvernementale Action Aid, Rose Anne Auguste a également fait référence à la non-valorisation de la médecine traditionnelle par l’Etat et les universités haïtiennes dans les recherches de solutions à la pandémie du SIDA.
Les analyses de Rose Anne Auguste ont été construites à partir de documents nationaux consultés, dont une étude réalisée par la firme de consultation Geo Consultants pour le compte du Ministère de la santé publique. Auguste regrette que les résultats de cette enquête n’aient pas été divulgués par les autorités haïtiennes.
Des témoignages émouvants
L’atelier à Moulin sur Mer a été l’occasion pour certaines femmes vivant avec le virus du Sida de partager leurs expériences avec l’assistance.
Mère de deux enfants – non contaminés – une Pvvih dit être aujourd’hui en mesure de mieux comprendre la société dans laquelle elle évolue. Très courageuse, elle invite les autres Pvvih à ne pas donner raison à ce fléau, si menaçant soit-il.
« Comme tout le monde, j’ai droit à la vie. Je peux être candidate à la députation comme tout le monde », indique-t-elle, ovationnée par l’assistance.
Une militante du Réseau des femmes candidates pour gagner (Rfcg), n’a pu contrôler ses émotions lorsque l’intervenante a fait savoir que le virus lui a été transmis par son concubin, le beau-père de ses deux enfants.
Une autre Pvvih a sévèrement dénoncé la mauvaise utilisation faite, selon elle, par certaines organisations des fonds dédiés aux programmes d’assistance aux personnes infectées.
Rendez-vous à Jacmel, Thiotte, Lascahobas, Jérémie et Port-au-Prince
Jacmel, Thiotte, Lascahobas, Jérémie et Port-au-Prince sont les cinq villes haïtiennes retenues pour ces activités. A Port-au-Prince, un grand rassemblement est prévu le 30 novembre 2007, selon la Consultante Rose Anne Auguste.
A date, les résultats enregistrés depuis le lancement de la campagne en Amérique du Sud sont satisfaisants, se réjouit Alejandra Scampini qui estime que, grâce à ce programme, les femmes infectées ont aujourd’hui un espace d’échange sur les relations qui existent entre la violence sexuelle et le Vih/Sida.
Action Aid déclare vouloir « changer les conduites, éradiquer les préjugés culturels, les stéréotypes sexuels à l’égard des femmes. Nous voulons éliminer la stigmatisation et la discrimination », ajoute Alejandra Scampini. [do apr 29/08/2007 10 :45]