La vie des paysans haïtiens n’est pas du tout facile. Dépourvus de moyens de se construire un avenir meilleur, ils sont nombreux à vivre dans la pauvreté. A la campagne l’électricité est rare. Dans les régions montagneuses, l’eau potable fait bien des fois défaut. En outre, la terre est souvent inapte à la culture en raison du relief accidenté, du dénuement des sols et du manque de possibilités d’irrigation. Il faut ajouter, à cela, la pression démographique dans les zones rurales haïtiennes, où la forte croissance de la population dépasse l’augmentation de la production, avec pour résultat une diminution des aliments disponibles par habitant. Cette évolution provoque un exode de la population rurale en direction des grandes villes, où les perspectives d’une vie meilleure aux travailleurs paysans non qualifiés ne sont pas toujours garanties. Tel est le constat dressé par Menno Ernst, pour l’agence en ligne AlterPresse, en parcourant différentes contrées d’Haïti.
Par Menno Ernst
Cap Rouge (Haïti), 08 août 07 [AlterPresse] --- Afin d’améliorer les conditions de vie de la population rurale, des organisations, comme la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Platfòm ayisyen kap plede pou yon devlòpman altènatif / Papda ), s’impliquent dans la recherche de possibilités d’accroître le capital des paysans de différentes manières, tout en respectant les ressources environnementales, suivant les observations faites par l’agence en ligne AlterPresse.
Ces organisations d’accompagnement et d’encadrement donnent des conseils, organisent des réunions et des formations, louent et vendent du matériel, accordent des crédits aux paysans pour leur permettre de faire des investissements.
A Cap-Rouge, une section communale de Cayes-Jacmel (Sud-Est d’Haïti) comptant quelques 18,000 habitants, la Papda collabore avec l’organisation paysanne locale Viv Espwa pou Devlopman Kap Wouj (Vedek).
D’un commun effort, Papda et Vedek s’appliquent à rassembler les paysans pour les convaincre des avantages du travail en coopération. De la sorte, non seulement elles transmettent des connaissances, mais elles créent des opportunités pour réaliser collectivement ce que les familles paysannes ne pourront pas atteindre individuellement, comme par exemple l’acquisition de matériel coûteux.
Dans des sessions de formation et meetings organisés sur des thèmes très divers, l’interaction entre paysans est considérée comme primordiale. Les discussions de groupe offrent aux paysans l’occasion de présenter eux-mêmes leurs problèmes et de chercher ensemble des solutions.
Les sessions de formations sont complétées par des cours pratiques. Lors des visites à plusieurs “fermes modèles”, l’accent est mis sur les caractéristiques spécifiques de l’environnement local et les possibilités et contraintes qu’il comporte.
L’importance des écosystèmes équilibrés et optimaux y est soulignée. En effet, tous les animaux, toutes les plantes et autres organismes à la ferme et aux environs s’influencent mutuellement et constituent ensemble une unité fonctionnelle. En sélectionnant soigneusement les combinaisons de plantes et d’animaux qui donnent des résultats positifs, les paysans parviennent à améliorer le rendement de la ferme.
Durant ces ateliers pratiques, des ingénieurs agronomes de la Papda donnent des conseils et renforcent les arguments sur l’importance d’une production écologique, de manière à endiguer la dégradation du milieu et garantir un développement durable.
Les difficultés d’orientation vers un développement durable
L’objectif d’assurer un développement durable semble le plus difficile à réaliser, parce qu’il nécessite au préalable un changement fondamental de la mentalité.
« Pourquoi nous ? On n’a déjà presque rien, et puis, ce sont les générations précédentes qui ont créé ces problèmes ! », avancent souvent les paysans.
Il n’est pas évident de faire passer le message et convaincre sur la nécessité d’une autre orientation dans les pratiques de cultures.
« Pour arrêter l’érosion progressive du sol, conformément aux principes de la Papda, il faut, pour chaque arbre coupé, en planter 10 nouveaux. Toutefois, la majorité des paysans n’en voient pas l’utilité, parce cela leur demanderait des investissements dont ils ne voient pas immédiatement comment ils en retireront des bénéfices », signale un ingénieur-agronome de la Papda, qui fréquente régulièrement Cap-Rouge.
Interrogé par AlterPresse, l’ingénieur-agronome explique combien, dans les travaux d’accompagnement des paysans, il se heurte souvent à l’assertion, selon laquelle “je serai mort depuis longtemps avant que cet arbre soit grand….”.
Cependant, dans la poursuite de ses objectifs, la Papda développe encore d’autres activités dans la région. A travers un projet en cours, financé par Oxfam Grande Bretagne et exécuté par Papda, Vedek et l’organisation non gouvernementale Presten, des poules pondeuses et des caprins sont fournis aux paysans, qui remboursent ces « prêts » après un certain temps.
Simultanément, une formation est dispensée à un des participants au projet, qui s’engage à être disponible en permanence pour aider à résoudre les problèmes éventuels. Dans ce contexte, les paysans bénéficient de conseils techniques nécessaires ainsi que de la location ou de l’acquisition du matériels agricoles. [me rc apr 08/07/2007 8:30]