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Haïti : La privatisation n’est pas la meilleure formule, selon l’économiste Fritz Deshommes

P-au-P, 17 juil. 07 [AlterPresse] --- L’économiste haïtien Fritz Deshommes affirme n’être pas favorable au processus de privatisation des entreprises publiques, que compte lancer le gouvernement à travers son programme de modernisation de ces entreprises.

Des secteurs vitaux de la vie nationale n’ont pas été contactés pour donner leur point de vue autour d’une telle démarche, fait remarquer Deshommes, vice-recteur à la recherche à l’Université d’Etat d’Haïti.

La compagnie nationale des télécommunications (Téléco), l’Office national d’assurance vieillesse (Ona), la Banque nationale de crédit (Bnc) sont, entre autres, les organismes publics à privatiser, selon les rumeurs qui circulent à Port-au-Prince.

Dans de multiples déclarations à la Presse, ces dernières semaines, le directeur général de la Téléco, Michel Présumé, a souligné la nécessité de rendre l’institution beaucoup plus compétitive.

A preuve, plusieurs centaines d’employés ont reçu leurs lettres de licenciement. Cette mesure est déjà en exécution dans plusieurs villes haïtiennes, comme Port-au-Prince et Cap-Haïtien.

Dans ce dossier de privatisation, Fritz Deshommes estime que les autorités haïtiennes n’ont pas tenu compte des critères fondamentaux, qui concernent également les besoins du pays et sont relatifs à la question de la pauvreté, aux inégalités de revenus, aux faiblesses et à la dépendance de l’Etat.

La question de la rentabilité financière serait à l’origine de cette velléité de privatiser la Téléco. Les avoirs de l’entreprise se trouvant aux mains de l’Etat, les dettes des abonnés qui n’ont pas payé leurs bordereaux ainsi que celles de compagnies opératrices internationales et locales se chiffrent à plusieurs millions de dollars américains, selon Fritz Deshommes qui cite le directeur général de la Téléco.

L’Etat, à lui seul, doit à la Téléco 600 millions de gourdes, les abonnés 400 millions de gourdes ; ce qui fait un total d’un milliard de gourdes (34 gourdes pour un dollar américain).

« La question financière n’est pas la bonne raison pour expliquer ce processus de privatisation », dont le processus remonte à 1986 en Haïti, pense l’économiste Fritz Deshommes.

Pour Deshommes, qui a déjà publié plusieurs ouvrages sur la question, il y avait une certaine transparence dans la privatisation des entreprises, comme la cimenterie nationale et la minoterie. Mais, pour ce qui a trait à la Téléco, il évoque une certaine opacité.

Deshommes laisse croire qu’il y a une certaine velléité de la communauté internationale à privatiser les entreprises publiques et à donner une nouvelle orientation économique au pays.

« Très certainement, il y a des pressions de secteurs nationaux et internationaux » concernant la privatisation de ces entreprises, soutient-il.

Fritz Deshommes fait appel à la loi sur la modernisation des entreprises publiques qui, rappelle-t-il, ne définit pas sur quelles bases une entreprise publique doit être privatisée.

L’Etat pourrait être majoritaire dans ces entreprises, suivant cette loi, mais minoritaire au niveau du conseil d’administration, explique l’économiste Fritz Deshommes, précisant que les résultats de la privatisation sont jusqu’ici décevants. [do rc apr 17/07/2007 13:00]