Tandis que les acteurs sociaux continuent de prôner une « éducation pour tous », les frais d’entrée et de scolarité mensuelle ne cessent d’augmenter à l’approche de chaque nouvelle rentrée académique, surtout dans les écoles privées qui contrôlent 80% de l’éducation en Haïti. Certaines écoles privées ont même fixé des frais en devise étrangère : le dollar américain. Le député Jean Beauvoir Dorsonne appelle à la prudence.
P-au-P, 10 juil. 07 [AlterPresse] --- Le dossier de l’indexation des frais en dollars américains, au niveau de certains établissements scolaires, reste un dossier très délicat qui mérite d’être abordé avec tact par les différents acteurs de l’éducation nationale, selon le député de Verrettes, Jean Beauvoir Dorsonne.
Interrogé par l’agence en ligne AlterPresse, en marge de l’atelier sur les stéréotypes sexuels dans l’éducation tenu du 5 au 7 juillet dernier, le parlementaire estime qu’il faut d’abord poser le problème de la hausse des frais scolaires au niveau de certaines écoles avant de poser celui de la fixation de frais en dollars américains.
A côté des frais de scolarité mensuelle déjà exorbitants, des écoles privées haïtiennes, notamment à la capitale Port-au-Prince, exigent aux parents d’élèves d’autres frais en dollars américains. Ces pratiques sont souvent dénoncées par des organisations sociales, telles le Mouvement démocratique populaire (Modep).
« Nous avons rencontré plusieurs acteurs de l’éducation, dont des responsables de l’Etat. Nous pensons que c’est un problème très difficile à cerner, c’est un dossier délicat », déclare à AlterPresse Jean Beauvoir Dorsonne de la commission de l’éducation au niveau de la Chambre basse.
Au niveau des écoles dites « bourgeoises », c’est le même son de cloche. Des frais pour le sport sont même exigés des parents par des écoles qui ne disposent même pas de structures permettant aux élèves de développer leurs aptitudes physiques.
Le député de Verrettes annonce que les discussions autour de ce dossier vont se poursuivre en vue de voir comment l’Etat pourrait intervenir au niveau de la fixation de ces frais.
Mais, le plus important, dit-il, c’est de prendre les dispositions nécessaires pour faciliter l’accès à l’éducation aux enfants d’Haïti.
La monnaie nationale de la République d’Haïti est la gourde. Cependant, des entreprises de la place n’ont aucun malaise pour afficher leurs prix en dollars américains. Une pratique qui a déjà attiré l’attention des autorités étatiques.
Le dossier des « écoles borlettes »
Jean Beauvoir Dorsonne affirme déceler un véritable désordre au niveau du système éducatif haïtien, au point où le ministère de l’éducation n’arrive pas à contrôler totalement les éléments du système.
« Dans le cadre de sa gouvernance scolaire, le ministère [de l’éducation nationale] doit nous dire ce qu’il va faire avec les écoles dites « borlettes », va-t-il fermer leurs portes » ?, s’interroge le parlementaire.
En Haïti, les « écoles borlettes » sont des écoles, dépourvues de structures adéquates et où, la plupart du temps, les élèves ne sont pas à même de réussir aux examens officiels d’Etat.
Nombre de ces écoles fonctionnent dans des conditions précaires, certains élèves ne respectent même pas l’ordre établi. Sur la cour de l’établissement et même sur des places publiques, ils pratiquent l’école buissonnière, pendant que leurs parents se cassent la tête pour payer leur scolarité.
Aux dernières épreuves de baccalauréat de juin et juillet 2007, plus de 10 mille candidats sur les 170 mille inscrits, dont les dossiers sont entachés d’irrégularités, étaient exclus.
Les dossiers de ces milliers d’élèves ne sont pas validés pour, entre autres, usage de faux, irresponsabilité de certains directeurs d’écoles ayant accepté de recevoir, en classes supérieures, des écolières et écoliers n’ayant pas réussi en 9e année fondamentale ou en classe de seconde.
En mai 2006, quelque 23 établissements scolaires suspectés de fraude ont été sanctionnés par le ministère de l’éducation nationale. Ces établissements n’étaient pas autorisés à constituer des classes terminales, pendant deux années consécutives, et à participer aux examens officiels du Baccalauréat.
Cette mesure devait être effective à partir de l’année académique 2006-2007 et devrait durer jusqu’à 2008. Quatre-vingt quinze (95) élèves, jugés fautifs, auraient dû être refoulés en classe de Seconde, selon une note à l’époque du ministère de l’éducation nationale.
Des bâtiments pour loger les nouveaux lycées
Durant la dernière décennie du 20e siècle, de nouveaux lycées nationaux ont vu le jour dans plusieurs collectivités territoriales, sans aucune provision budgétaire pour la disponibilité d’enseignantes et d’enseignants à ces établissements publics.
Ces établissements scolaires ont été jetés un peu partout. Sauf dans l’Île de la Tortue et d’autres communes traitées en parent pauvre, chacune des collectivités territoriales communales dispose d’un lycée national dépourvu de moyens de fonctionnement. Ces lycées, qui n’existent que de nom, sont logés dans des écoles nationales et fonctionnent le soir.
« Nous avons demandé à chacun de nos collègues de faire un état des lieux dans leur circonscription respective pour étudier ce qui devrait être fait pour doter ces lycées de leur propre local », indique le député Dorsonne.
Le parlementaire affirme avoir discuté avec les autorités concernées, lesquelles ont promis de budgétiser ce besoin de construction de bâtiments pour abriter ces écoles publiques.
A noter que pour l’exercice fiscal 2006-2007, une enveloppe de plus de 5 milliards de gourdes (5 694 383 612) est allouée, dans le budget national, au ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle dans une perspective de garantir un meilleur accès à l’éducation. [do rc apr 10/07/2007 10 :50]