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Haïti – Personnes âgées : Inauguration d’un espace d’échange intergénérationnel

P-au-P, 26 juin 07 [AlterPresse] --- Une cinquantaine de personnes âgées ont participé, ce 26 juin 2007 à Carrefour-Feuilles (nord-est de la capitale), à l’inauguration d’un « espace intergénération » mis en place par l’Association pour la promotion de la santé intégrale de la famille (Aprosifa), a constaté sur place l’agence en ligne AlterPresse.

Femmes et hommes, qui aux cheveux blancs, qui la bouche édentée, ont échangé durant plusieurs heures avec les responsables de l’Aprosifa et les coopérants cubains qui prêtent main-forte à cette institution.

« Nous sommes en train de développer un partenariat avec la mission médicale cubaine qui consiste à entreprendre des actions communautaires à l’intention des personnes âgées », explique l’infirmière Rose Anne Auguste, membre fondatrice de l’Aprosifa.

Spécialiste en santé communautaire, Rose Anne Auguste estime nécessaire d’offrir un espace à ces personnes dont les conditions de vie sont déjà difficiles dans un pays où l’espérance de vie à la naissance ne dépasse pas une cinquantaine d’années.

Dorénavant, les personnes âgées peuvent se rendre, chaque jeudi, au local de l’Aprosifa pour se détendre et se faire consulter par des médecins cubains en mission en Haïti.

L’inauguration de l’« espace intergénération » a eu lieu en présence de médecins et infirmiers cubains et d’une cinquantaine de personnes en âge avancé.

Resserrer les liens entre les personnes âgées et les jeunes

« Les personnes âgées ont beaucoup à transmettre à nos jeunes. Nous avons le devoir d’encadrer ces personnes même si elles vont nous quitter, même si elles vont mourir », soutient Rose Anne Auguste.

Selon Rose Anne Auguste, les cliniques dont dispose l’Aprosifa ne sont pas suffisantes pour assister les personnes nécessiteuses. Voilà, pourquoi elle croit important de créer un espace d’échange intergénérationnel pour permettre aux jeunes de bénéficier des expériences de ces adultes.

« Nous inaugurons cet espace aujourd’hui, non seulement pour porter beaucoup plus d’attention sur les personnes âgées, mais aussi pour faciliter un espace de rencontre entre les personnes âgées, les enfants et les adolescents », indique la responsable de l’Aprosifa.

En Haïti, il existe différentes associations, y compris religieuses, étatiques, privées et caritatives, qui essaient d’encadrer les personnes dites du troisième âge en leur offrant des services gériatriques et certaines activités de loisirs dans des espaces appropriés, comme des asiles pour vieillards.

Traditionnellement, les personnes âgées en Haïti, qui aiment beaucoup la compagnie de leurs petits enfants, restent généralement dans le « cocon » familial ou parental qui les entoure d’une certaine affection et leur procure un minimum de soins adéquats.

Si à Cuba, les personnes âgées représentent une fraction de 18%, en Haïti (60 ans et plus) elles ne sont que 7.4% de l’ensemble de la population totale du pays, selon le dernier recensement de janvier 2003.

« Encadrer les personnes âgées pourrait avoir des conséquences positives sur l’espérance de vie à la naissance », pense le docteur Jorge Sosa Gallardo qui croit que ces personnes connaissent la vie dure, notamment dans leur foyer.

De l’avis des médecins cubains présents à l’inauguration de l’« espace intergénération » de l’Aprosifa ce mardi 26 juin 2007, seuls des programmes d’encadrement, d’assistance sociale et de loisirs peuvent permettre aux plus âgées de vivre plus longtemps.

« A cet âge, ces personnes doivent trouver l’assistance des institutions sociales et de l’Etat. Les gouvernements doivent allouer une partie de leur budget à la sécurité de ces personnes », affirme, pour sa part, l’infirmier cubain Damian Villiz Escobar.

A l’instar des enfants, Rose Anne Auguste estime, quant à elle, que les personnes âgées sont, elles aussi, victimes de la violence. Mais, cette violence dont parle la responsable de l’Aprosifa peut être d’ordre symbolique, mental ou psychologique.

Et le docteur Jorge Sosa Gallardo est d’avis que de tels agissements pourraient rendre ces personnes mélancoliques. Aussi, encourage-t-il l’Etat à soutenir les initiatives d’institutions non gouvernementales prises pour pallier les problèmes de cette tranche d’âge au sein de la population.

Outre les consultations qui seront offertes gratuitement au local de l’Aprosifa à Carrefour-Feuilles, les médecins cubains font des visites régulières au domicile des personnes âgées.

Cela s’inscrit dans le cadre d’un programme baptisé « Médecine intégrale familiale » qui a été développé à Cuba, souligne Rose Anne Auguste.

A l’inauguration de ce nouveau service, a observé AlterPresse, plusieurs personnes âgées souffrantes ont partagé leur douleur avec les spécialistes cubains. Ces derniers ont promis à ces vieillards de les accompagner gratuitement.

Invité à assister à l’inauguration de cet espace intergénérationnel, le conseil municipal de Port-au-Prince a brillé par son absence.

Bref historique de l’Aprosifa

Fondée à Carrefour-Feuilles en mai 1993, l’Aprosifa est une institution à but non lucratif qui donne des soins de santé quotidiennement à plus de deux cents personnes défavorisées venant des bidonvilles, de Carrefour Feuilles, tels : Caridad, Fort-Mercredi, Gran Ravin, Martissant (banlieue sud de Port-au-Prince).

Des enfants, souffrant de la malnutrition et autres complications liées au manque d’hygiène, y sont soignés quotidiennement. Les femmes enceintes reçoivent un suivi jusqu’à leur accouchement. Les personnes vivant avec le VIH sont prises en charge à différents niveaux.

L’organisme se lance également dans la lutte contre la violence par la mise sur pied d’un programme socioculturel, grâce auquel les jeunes issus des quartiers réputés fragiles modifient leurs comportements de manière positive.

A neuf reprises, depuis la fondation de l’institution, les locaux de l’Aprosifa ont été vandalisés, déplorent les responsables. [do rc apr 26/06/2007 15 :10]