Español English French Kwéyol

Nicolas Sarkozy, un ami du tiers monde !

Les Franco-haitiens auraient tort de ne pas user de leur droit de vote contre qui ne leur fera demain aucun cadeau

Par Chrstophe Wargny [1]

Soumis à AlterPresse le 25 mars 2007

Nicolas Sarkozy est le candidat conservateur aux élections présidentielles françaises qui se déroulent dans un mois. Tour à tour ministre des Finances et de l’Intérieur, il représente la droite libérale et musclée en France. Des douze candidats, il est le seul à s’être volontairement déplacé pour rencontrer Georges Bush.
C’est lui qui propose une conférence sur Haïti, comme nous le rapporte AlterPresse. Sarkozy a une réponse pour tout le monde : des sans domiciles fixes aux vedettes du show-biz qui se plaignent de payer trop d’impôts, il est à l’écoute de tous, persuadé, plus que la majorité de ses onze concurrents, que les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Va pour Haïti comme pour le reste !

Il faut donc le juger sur ses actes comme ministre de l’intérieur ou sur les propositions annoncées en même temps que sa candidature.

Durant les cinq ans du ministre d’Etat :

- multiplication des contrôles au faciès.

- augmentation des « quotas » de reconduite aux frontières.

- provocations dans les quartiers occupés en partie par les étrangers, et notamment les jeunes chômeurs, dégénérant en révolte des banlieues (automne 2005).

- achat de chefs d’Etat africains pour les encourager à retenir les candidats à l’exil.

Le pire se déroule depuis quelques semaines : arrestation par la police (Sarkozy est le chef de la police) de familles d’élèves venues chercher un élève à la sortie de l’école. En France, tout enfant, même en situation irrégulière peut aller à l’école. Ce sont les premières fois qu’on profite de sorties d’école pour arrêter, devant les enfants, des adultes en situation irrégulière. Dernière en date : un grand-père chinois venu chercher sa petite-fille est menotté, l’institutrice mise en garde à vue pour s’être interposée.

Quant à ses propositions, elles ont le mérite de la clarté !

- Créer un « ministère de l’Immigration et de l’identité nationale », les deux mots accolés renvoyant aux pires périodes de notre histoire (Occupation française en 1940, guerres coloniales menées par la France…) Avec l’espoir de mordre sur la candidature xénophobe de Le Pen.

- Rendre quasi-impossible le regroupement familial pour les étrangers, surtout s’il y a des enfants.

- Procéder à une « immigration choisie ». On a changé d’époque : on ne regardera plus la qualité des dents et des muscles, mais les profils qui sont utiles à nos besoins du moment, sans se soucier de ceux du pays d’origine.

- Refuser toute régularisation de sans-papiers.

- Multiplier les « traités » pour encourager les autorités africaines à bloquer l’émigration.

Si les Haïtiens ont peu à attendre des élections françaises, ils n’ont rien à espérer de Nicolas Sarkozy. Deux candidats placent les inégalités Nord-Sud parmi leurs priorités : Dominique Voynet (les Verts), ancienne ministre de l’environnement et José Bové, ancien syndicaliste paysan et militant altermondialiste. Tous deux militent pour l’indépendance alimentaire et la transformation des termes de l’échange. Ils n’ont malheureusement aucune chance de figurer dans le duel final. La principale challengère de Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal (Parti socialiste), a pris le contre-pied des propositions ci-dessus. Elle prône le co-développement avec les pays du Sud, sans préciser quelle en serait l’ampleur.

Les Haïtiens (ou franco-haïtiens) sont 60 000 à Paris, le double en Guadeloupe et Guyane réunies. Ils auraient tort de ne pas user de leur droit de vote contre qui ne leur fera demain aucun cadeau.


[1Collaborateur du Monde diplomatique, auteur de Haïti n’existe pas, éd. Autrement