P-au-P, 9 Mars 07 [AlterPresse] --- Plus de 200 ans après son indépendance en 1804, Haïti dispose d’un État qui ne se soucie véritablement pas des principales revendications du secteur populaire, c’est le constat fait par la militante féministe Éveline Larrieux de l’organisation Solidarité des Femmes Haïtiennes (SOFA).
Coordinatrice sortante de la SOFA, Éveline Larrieux estime que les femmes représentent la fraction de la population haïtienne la plus touchée par ce système d’exclusion sociale qui caractérise l’État haïtien.
« Nous constatons que, deux cents ans après, nous avons un État qui exclut le secteur populaire, particulièrement les femmes, un État dépendant des pays impérialistes, un État irresponsable, un État en mal de développement qui ne dispose d’aucun programme adressant les revendications des couches populaires », indique Éveline Larrieux qui intervenait à un cocktail de clôture d’une assemblée de SOFA, organisée ce 8 mars 2007, à l’occasion de la Journée internationale des femmes.
Selon Larrieux, le fonctionnement de l’État haïtien renforce davantage le système patriarcal et ouvre la voie aux politiques néolibérales qui sont défavorables au secteur populaire.
Éveline Larrieux n’était pas la seule responsable de la Solidarité des Femmes Haïtiennes à dénoncer le caractère excluant de l’État haïtien. Marie Frantz Joachim, ancienne coordonnatrice de SOFA et trésorière sortante, exige des actions concrètes des autorités en vue de divorcer d’avec les pratiques discriminatoires et d’exclusion à l’égard des femmes.
« Le gouvernement doit cesser de faire de beaux discours concernant son programme de politique sociale, il doit passer à l’action », affirme Marie Frantz Joachim devant une assistance composée de femmes de diverses couches sociales, de petits et hauts fonctionnaires de l’Etat, dont la Ministre à la condition féminine, Marie Laurence Jocelyn Lassègue.
La question de la violence faite aux femmes était également à l’ordre du jour. Marie Frantz Joachim s’insurge devant ce qu’elle considère comme « une banalisation de la violence faite aux femmes » tout et estime que « le corps de la femme se transforme aujourd’hui en territoire de guerre ». La militante féministe demande aux parlementaires de plancher sur les conventions internationales garantissant le respect des droits de la personne humaine, particulièrement ceux des femmes.
La participation des femmes aux différentes sphères de décision a été abordée lors de cette activité. Selon Marie Frantz Joachim, l’accès au pouvoir reste « le terrain des hommes, les femmes sont très peu représentées sur la scène politique. »
« Nous continuons à lutter contre les systèmes capitaliste et patriarcal et nous allons lutter contre le système néolibéral », indique, pour sa part, Éveline Larrieux.
La SOFA a profité de ce 8 mars pour récompenser quelques figures féminines qui ont marqué d’une pierre blanche la lutte des femmes haïtiennes. Il s’agit de l’Historienne Suzy Castor, de la Journaliste Lilyanne Pierre-Paul, de la militante paysanne Carmita Estiverne et de la féministe Anne Marie Coriolan.
Fondée le 22 février 1986, la SOFA est une « organisation féministe socialiste populaire » qui a pour objectif, entre autres, de sensibiliser et mobiliser les femmes par l’éducation en vue de garantir une autonomie et un leadership leur permettant de lutter pour un changement réel et efficace de leur condition et de leur situation de vie ; d’établir des liens de solidarité entre différentes organisations de femmes au niveau de la société haïtienne. La SOFA a un credo : « La lutte des femmes c’est la lutte de tout le peuple ». [do apr 09/03/2007 9 :30]