1] L’Université publique haïtienne en crise 2] Tentative de mise en coupe réglée de l’Université d’Etat d’Haïti 3] Haïti 146ème au classement mondial sur le développement humain
AlterPresse part en vacances durant le mois d’Août. En conséquence, le prochain numéro d’HaitiWebdo paraîtra au cours de la première semaine de septembre.
1] L’UNIVERSITE PUBLIQUE HAITIENNE EN CRISE
C’est la crise à l’Université d’Etat d’Haïti. Le gouvernement, à travers le Ministère de l’éducation Nationale a décidé unilatéralement le 27 juillet de mettre fin aux fonctions du Conseil Exécutif de l’Université, qui avait été élu au second degré en 1998, dans le cadre de l’autonomie institutionnelle.
Cette mesure, reçue comme un coup de massue par des associations estudiantines et de nombreux professeurs, est venue après une série d’événements qui ont paralysé le processus électoral qui était en cours a l’université.
Le 24 avril, un petit groupe d’étudiants avait fait intrusion au local du Rectorat pour y entamer une grève de la faim contre la tenue le 26 avril des élections qui devaient permettre de renouveler le Conseil Exécutif. Ils s’etaient prononcé notamment contre la participation a ces élections du Recteur sortant Pierre-Marie Paquiot.
Le 26 avril, on a appris que les élections etaient renvoyées sine die. Entre-temps, le Ministre de l’éducation Nationale, Myrtho Celestin Saurel, a rendu visite le 25 avril aux étudiants grévistes. Au cours de cette visite, elle a annoncé que le Ministère allait prendre ses responsabilités dans le dossier.
La mesure gouvernementale a été précédée d’une ordonnance du Tribunal des Référés, a la demande d’un groupe d’étudiants agissant en leur nom propre et en celui des grévistes. Selon cette ordonnance, rédigée dans l’après-midi du 26 avril, le tribunal a constaté la caducité du Conseil Exécutif sortant et a accordé les pleins pouvoirs au Ministère de l’Education Nationale pour gérer la crise.
Le Recteur de l’Université a qualifie l’ordonnance d’"illégale" et de "scandaleux" et a considéré l’attitude du Ministre de l’éducation nationale comme une "imposture". En la personne du Recteur, le Conseil Exécutif de l’Université a formellement fait opposition à l’ordonnance de la justice par-devant les tribunaux.
La récente disposition gouvernementale constitue une "ingérence inacceptable", selon un communiqué du Conseil de l’Université, composé de 33 représentants des professeurs, des étudiants et du personnel administratif des 11 facultés de l’Université. Le Conseil a exigé le retrait de la mesure du Ministère de l’Education Nationale et a annoncé qu’il ne collaborera avec aucun Conseil Exécutif nommé par le gouvernement. Il a en outre lancé un appel à la solidarité de tous les secteurs.
Plus d’une cinquantaine de professeurs et d’étudiants ont déjà signé une pétition qui rejette toute intervention arbitraire au sein de l’université. La Fédération des Etudiants Universitaires Haïtiens (FEUH) a appelé à la mobilisation pour contrer les nouvelles dispositions gouvernementales. Dans la plupart des milieux universitaires, on craint fortement une tentative de mainmise politique sur l’Université publique haïtienne.
2] TENTATIVE DE MISE EN COUPE REGLEE DE L’UNIVERSITE D’ETAT D’HAà TI
Analyse - Par Ronald Colbert
Le régime lavalas au pouvoir en Haïti a mis en exécution le 27 juillet les premières étapes de son plan de contrôle de l’Université d’Etat d’Haïti (UEH), en renvoyant sine die la fin du processus électoral devant renouveler les membres du rectorat de l’enseignement supérieur public en Haïti.
Pour parvenir à leurs objectifs, les autorités issues du scrutin vicié de l’année 2000 ont bénéficié de la couverture du tribunal des référés du secteur judiciaire, qui enjoint au ministère de l’Education Nationale de prendre la gestion administrative de l’UEH, sous prétexte de la fin du mandat, depuis mai 2002, des membres du rectorat.
Aussi, le ministère de l’Education Nationale dirigé par Myrtho Célestin Saurel interdit-il au rectorat sortant de n’assumer aucune décision au nom de l’UEH.
Un comité provisoire sera nommé bientôt par les autorités lavalas pour assurer la direction de l’UEH, préparer les élections au rectorat et vraisemblablement entreprendre " des réformes " au sein de l’enseignement supérieur public.
La nouvelle situation créée par lavalas à l’UEH vient confirmer les rumeurs, circulant depuis quelques semaines dans le milieu universitaire public, sur la volonté du régime en place de s’accaparer concrètement l’Université d’Etat d’Haïti grâce au rapport de force judiciaire et policière qui lui est favorable.
Ainsi, s’expliqueraient : d’une part, la grève de faim entamée en début de semaine par 4 " étudiants " déclarés manipulés par les têtes de pont du régime, d’autre part la tentative d’un groupe dit d’ " étudiants " d’investir la Faculté des Sciences de l’UEH.
Les deux initiatives visaient à bloquer le processus électoral de renouvellement des membres du rectorat public : d’un côté, les protestataires grévistes, soutenus par les sénateurs contestés de 2000, s’étaient ouvertement prononcés contre la candidature du recteur sortant Pierre Marie Paquiot et en faveur d’un train de " réformes " avant toute élection ; d’un autre côté, la tentative d’investir la Faculté des Sciences ressemblait à une manœuvre pour empêcher la tenue du deuxième tour des élections dans l’enceinte de cette faculté le vendredi 26 juillet, que se serait proposé le rectorat sortant vu l’occupation " par les grévistes " du local du rectorat de l’UEH depuis le mardi 23 juillet 2002.
Les membres du rectorat sortant voulaient arriver au terme du processus électoral pour prévenir les velléités, non cachées, du pouvoir lavalas de faire une mainmise sur l’UEH, selon des informations obtenues cette semaine par Alter Presse.
Le régime lavalas aurait, dans ce contexte, ses propres candidats partageant sa vision d’aboutir à une prétendue " dépolitisation " de l’UEH qui serait aux mains de l’opposition politique, le regroupement appelé " Convergence Démocratique ", que les lavalassiens considèrent comme " ennemie jurée, pourfendeuse d’Haïti " dans leurs obsessions morbides du pouvoir, ont indiqué les même sources à Alter Presse.
Risques d’épreuve de force et d’affrontement
Après avoir condamné le mouvement de grève de faim initié au local du rectorat, le Conseil de l’Université d’Etat d’Haïti, composé de l’ensemble des directions ou décanats des facultés et écoles d’Etat d’enseignement supérieur, devrait faire entendre sa voix, dans les jours à venir, sur les nouveaux développements enregistrés à l’UEH, estiment les observateurs dans la capitale haïtienne.
A un moment de quasi-relâche au sein des facultés et écoles d’Etat d’enseignement supérieur et de l’approche des inscriptions de nouvelles promotions pour la prochaine année académique universitaire, des interrogations se posent sur l’attitude que vont observer doyens, cadres administratifs, et surtout professeurs et étudiants de l’UEH.
Ce sont ces quatre niveaux qui participent normalement aux élections dans les facultés et écoles supérieures, et au rectorat, selon des principes d’autonomie admis par l’ensemble des universitaires en attendant une loi spécifique appelée à définir les règles du jeu et les marges par rapport aux autorités.
Quoi qu’il en soit, les récentes décisions lavalas vont certainement provoquer des remous parmi professeurs et étudiants, qui se souviennent des luttes en faveur de l’autonomie menées spécialement en 1986 et 1987, des différents coups essuyés contre les démarches d’autonomie de 1991 à 1994 et des assauts de la dictature des Duvalier contre l’UEH durant les années 1960 qui semblent se reproduire en 2002, sous de nouvelles formes de totalitarisme.
De nombreux universitaires craignent de probables confrontations avec les anciens " gauchistes " aujourd’hui au pouvoir et convertis en défenseurs d’un système anachronique qu’ils réprouvaient fermement lorsqu’ils n’avaient pas encore investi les commandes du pays.
Ces universitaires se demandent est-ce qu’ils vont assister, les bras croisés, sans aucune mobilisation structurelle ni sectorielle, à la résurgence de la pensée unique, contre la pensée plurielle à l’université, et à celle du phénomène de pistons, courant sous les Duvalier et dont une illustration a été offerte en 2001 à la Faculté d’Ethnologie d’Etat avec l’intégration partisane d’ " étudiants " en dehors des normes académiques universitaires.
Ils rappellent également d’autres faits malheureux enregistrés à l’UEH : les différentes crises provoquées à l’Institut National d’Administration, de Gestion et des Hautes Etudes Internationales (INAGHEI) où le processus d’élection du décanat a échoué à maintes reprises ; la nomination d’un représentant lavalas chargé à la formation des futurs médecins à l’Hôpital de l’Université d’Etat d’Haïti (HUEH) ; les positions adoptées par des personnalités comme Jacques Edouard Alexis en ce qui concerne l’autonomie de l’UEH ; le mode de gestion de la coopération universitaire (notamment les bourses d’études dans ce pays) avec Cuba qui profiterait à des alliés du régime, etc.
Il y a quelques mois, circulait fortement à Port-au-Prince l’idée de la mise en place d’une " université dite populaire ", dont la définition, la mission et le fondement échappent à l’entendement, mais répondraient au vœu de la politique de "chimérisation" de toutes les institutions nationales, au mépris des droits humains et en violation des normes de gouvernance et de la gestion des fonds de l’Etat.
En revanche, plusieurs universitaires préconisent à leurs camarades de vaincre leurs peurs et anxiétés pour s’atteler véritablement aux tâches de construction d’alternatives pour barrer la route à la volonté de vassalisation de l’UEH et empêcher le retour à l’ordre ancien.
3] HAà TI 146ème AU CLASSEMENT MONDIAL SUR LE DEVELOPPEMENT HUMAIN
Le niveau du développement humain tarde à s’améliorer en Haïti. Le pays s’est retrouvé à la 146ème place sur 173 pays, dans le cadre du classement mondial réalisé par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
Le faible taux de développement humain en Haïti signifie qu’une proportion de 42 % de la population vit dans la misère. Ces couches pauvres n’ont aucun accès à l’eau potable et ont une espérance de vie ne dépassant pas 40 ans.
Pour le Premier Minsitre Yvon Neptune, les conclusions du Rapport sur le Développement 2002 montrent l’étendue du travail à accomplir en Haïti.