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Haïti – Sida : Valoriser la médecine traditionnelle

Pour une cohabitation entre médecine traditionnelle et médecine conventionnelle

Actualisé le 4 décembre 2006 à 11 :00

Kenscoff (Haiti), 1er Déc. 06 [AlterPresse] --- L’utilisation des plantes médicinales pour assister les personnes vivant avec le Sida (PVVIH) était au centre des débats, ce 30 novembre 2006, à Belot (petite localité de Kenscoff située à l’Est de Port-au-Prince), lors d’une table ronde convoquée par l’organisation ActionAid sur les stratégies caribéennes d’habilitation des PVVIH, a observé l’agence en ligne AlterPresse.

Le Tradipraticien Docteur Lamour, l’Infirmière Rose Anne Auguste et l’épidémiologiste cubaine Maria Elena Alonzo Gomez intervenaient sur les « Controverses sur les différentes approches scientifiques » relatives au virus du Sida.

Dans son intervention, Lamour explique que la médecine traditionnelle ne touche pas seulement le côté curatif de la question. Selon lui, c’est toute une approche qui pose les problèmes nutritionnels, sanitaires et environnementaux.

Le Tradipraticien, qui croit qu’il faut rechercher les causes de la maladie du Sida dans la nature, juge nécessaire de développer une certaine relation entre la médecine traditionnelle et la médecine conventionnelle. Pour cela, il énumère, à l’attention de l’assistance, une liste assez longue de plantes qui peuvent aider dans la recherche de solution à cette maladie endémique.

« La médecine traditionnelle n’a pas toutes les solutions possibles », estime-t-il, tout en saluant les efforts consentis jusqu’ici par la médecine conventionnelle.

Une PVVIH, membre de l’Association de Solidarité nationale avec les personnes vivant avec le virus du Sida et les personnes affectées (ASON), qualifie d’extraordinaire l’apport des plantes médicinales dans ce domaine. Infectée elle aussi, Rose Laure Janvier sait utiliser des recettes à base de miel et d’aloès, en lieu et place des anti-rétroviraux qu’elle utilisait depuis quatre ans.

« C’est extraordinaire, et je vous encourage à œuvrer dans cette voie », dit la jeune femme à ce « doktè fèy » (médecin traditionnel) qui affirme travailler avec 50 PVVIH de 1986 à ce jour.

De ces 50 personnes, seulement 12 ont passé de vie à trépas. Docteur Lamour précise que ses patients ont une préférence pour la médecine traditionnelle.

Un autre participant dit rencontrer des cas de patients qui n’ont pas survécu, en dépit du fait qu’ils ont utilisé les recettes proposées par les tradipraticiens.

« Pour la médecine traditionnelle, nous n’avons pas une seule formule ; nous avons une formule pour chacun des cas qui nous sont présentés. Chaque patient, suivant son cas, a un régime différent », indique Docteur Lamour en réponse à une question qui lui a été adressée en la circonstance.

Lamour indique avoir travaillé, au début, avec des médecins conventionnels qui, au fil des années, ont dû emprunter d’autres voies « pour des raisons économiques. »

Selon Rose Anne Auguste, Infirmière de formation, il y a un manque de valorisation de la médecine traditionnelle dans la gestion du Sida en Haïti.

« La médecine par les plantes médicinales existe partout en Haïti, et c’est quelque chose de très familial. L’État devra se doter de moyens pour encourager des recherches dans ce domaine », pense la spécialiste en santé publique.

Rose Anne Auguste plaide en faveur d’une cohabitation entre la médecine traditionnelle et la médecine scientifique, en instituant l’organisation de forums annuels de médecins feuilles de toutes les Caraïbes.

Une soixantaine de personnes, dont épidémiologistes, infectiologues, PVVIH, responsables de la Croix-Rouge Haïtienne, de secteurs intéressés par la question du Sida, fonctionnaires de l’Organisation des États Américains (OEA), participent à cette table ronde organisée par la ActionAid en prélude à la Journée mondiale du Sida, ce 1er décembre 2006. [do rc apr 1er/12/2006 7:20]