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La consommation de jus naturel, un luxe à Port-au-Prince

P-au-P., 10 juin. 2003 [AlterPresse] --- « Les fruits sont si chers au petit marché du coin que je ne pense même pas à m’en procurer », se plaint une mère de famille à AlterPresse, alors qu’elle attend son enfant à la sortie d’une école au haut de Delmas, à l’est de Port-au-Prince.

La hausse vertigineuse et générale des prix, observée depuis plusieurs mois, n’épargne pas, en effet, les fruits tropicaux.

Les consommateurs paient la marmite de citrons de qualité à 90.00 gourdes, la douzaine de grenadias (fruit de la passion) à 35.00 gourdes, la douzaine d’oranges à 40.00 gourdes et la douzaine de chadèques à 60.00 gourdes, alors que le salaire minimum vient d’être fixé à 70.00 gourdes par le gouvernement.

Face au coût des fruits et ses obligations familiales, une mère a affirmé à AlterPresse qu’elle a recours à du jus artificiel en bouteille et à des boissons gazeuses.

Une autre a ajouté qu’elle préfère mettre dans la boite à lunch de sa fille du jus de carotte au lieu de jus artificiel. Si, à la rigueur, la fille trouve du jus de citron le matin, elle n’en trouvera pas au dîner, a ajouté cette mère.

En Haïti, les jus les plus prisés sont ceux de cerise, de papaye, de grenadia et des agrumes (oranges, citrons, chadèques, mandarines), selon l’avis des milieux agronomiques.

Il est bien connu que les agrumes sont particulièrement riches en vitamine C, qui aide à la croissance des enfants.

La vitamine C a également un effet anti-hémorragique et anti-infectieux. Elle est très efficace contre la grippe.

Agée de 70 ans, mais en pleine forme, Elianie, qui vit à l’est de la capitale, a confié à AlterPresse le secret de sa longévité, dans un pays où l’espérance de vie ne dépasse pas 53 ans.

« Quand j’étais petite, après mon repas, je buvais un bon jus de fruit, mais pas de l’eau acidulée ou de l’eau sucrée ».

Nostalgique du passé, Elanie se dit inquiète de la condition nutritionnelle de la jeune génération.

« Je n’oublierai jamais les après-midi de vacances passés à Jacmel » (Sud-Est), a dit un ressortissant de ce département, vivant à la capitale.

« Sous les orangers, mes camarades et moi, nous étions dans l’embarras du choix », a-til ajouté. Jacmel est en effet très réputée pour sa production d’oranges.

Deux oranges suffisent pour donner à une personne la quantité de vitamine C, nécessaire pour une journée. D’autres fruits, comme les citrons et grenadias sont appelés plantes de drainage.

Le jus de citron, dilué à jeun, aide à dégorger le foie. Mais la cerise bat tous les records. Elle est 65 fois plus riche en vitamine C que l’orange.

Tous ces fruits sont pratiquement inabordables pour les petites bourses aujourd’hui. Le sac de citrons coûte entre 500.00 et 600.00 gourdes, suivant la qualité de ce fruit et le sac de citrons précoces 350.00 gourdes, ont affirmé des marchandes à AlterPresse.

Elles obtiennent le sac de grenadias à 1,000.00 gourdes, malgré la mauvaise qualité de ce fruit en cette période. Le sac d’oranges coûte 600.00 gourdes et le sac de chadèques (pamplemousses) 150.00 gourdes.

Plusieurs de ces revendeuses ont toutefois déclaré aux reporters d’AlterPresse écouler rapidement leurs marchandises.

Elles usent d’astuces et se montrent flexibles sur les prix, ont-elles affirmé.

« Parfois j’ajoute un fruit sur le lot pour les acheteurs récalcitrants », a dit l’une d’entre elles.

Elles n’ont pas voulu cependant révéler leur marge de bénéfice. [ijb rv gp apr 10/06/2003 00:50]