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Haïti : Plaidoyer pour le respect des droits de l’homme dans l’univers carcéral

Prise de position de Solidarité Fwontalye/Service Jésuites des Réfugiés et Migrants (SJRM)

Document soumis à AlterPresse le 29 octobre 2006

Les droits de l’homme sont des Droits inhérents à tout le monde indépendamment de son origine, sa nationalité, ses agissements, etc. Au préambule de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 il est fait mention : « …la reconnaissance de la dignité inhérente à tout les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Cette déclaration invite les Etats à se soucier de l’homme et à le protéger partout où il se trouve. En Haïti, nous n’ignorons pas l’intérêt manifesté par l’Etat pour ratifier certains traités internationaux relatifs aux droits de l’homme et les ajustements fait dans le droit interne. Cependant, dans la pratique, tous les Haïtiens ne jouissent pas encore de ces droits comme le veut la loi. Le traitement infligé aux prévenus et aux détenus offre déjà un tableau sombre et appelle l’attention des membres de la société civile. On assiste à des violations systématiques des droits de l’homme notamment la détention prolongée, l’absence de services hygiéniques, sanitaires et éducatifs, etc. Il faut dire que ces actes ne militent pas à la bonne distribution de la justice ni au respect des droits de la personne humaine dans le pays. Ces violations flagrantes invitent les organisations de défenses des droits de l’homme du pays à venir à la rescousse des prévenus ou prisonniers en posant des actes concrets en leur faveur.

Dans cet ordre d’idée, pour marquer la journée internationale des prisonniers le 29 octobre, dès le vendredi 27 octobre 2006, Solidarité Fwontalye/Service Jésuites des Réfugiés et Migrants (SJRM), Institution de Droits humains oeuvrant sur la frontière Nord haïtiano-dominicaine, a contribué au nettoyage de la garde-à-vue de Ouanaminthe. Cette activité a permis aux prévenus de respirer plus agréablement ce jour-là et d’apprécier la propreté de leurs cellules, comme ce devrait être le cas tous les jours. Cet acte profite positivement aussi aux policiers du commissariat de Ouanaminthe qui sont tous exposés à des maladies. À cette activité ont collaboré des élèves du Collège Oswald Durand et du Lycée National Capois-La-Mort. Ces jeunes se sont portés volontaires pour cette opération de nettoyage, justement parce qu’ils comprennent la nécessité, non pas d’accorder un traitement de faveur aux prisonniers, mais de les traiter avec le respect de leur dignité, peu importe les actes qu’ils auraient pu commettre. D’ailleurs, bon nombre d’entre eux sont reconnus innocents après une décision de justice.

La garde-à-vue de Ouanaminthe ne contient que deux cellules mesurant approximativement douze (12) mètres carrés où l’on incarcère souvent plus d’une douzaine de personnes par semaine. Ces mêmes cellules servent à la fois de salle à manger, de toilettes et de dortoir, car c’est là qu’ils font leurs besoins aux yeux de tous, et qu’ils s’endorment à même le sol, lorsqu’ils le peuvent, étant donné qu’ils n’ont pas de lit. Il est à remarquer que la commune de Ouanaminthe ne dispose même pas de 30 policiers pour une population approximative de 96.000 habitants, alors qu’elle est une ville frontalière se situant à proximité du marché de Dajabòn et qu’elle facilite l’échange commercial entre les deux Etats. De fait, de nombreux cas d’infractions à la loi sont enregistrés. Pour cette population, on ne dispose que de deux (2) juges de paix. Dans ces conditions, involontairement, le traitement des cas est lent. En conséquence, la garde-à-vue de Ouanaminthe prend l’allure d’une prison, puisque dans la plupart des cas, les prévenus y passent beaucoup de temps en attente d’une décision définitive du Tribunal de Paix de Ouanaminthe ou de leur transfert à la prison civile de Fort Liberté.

Solidarité Fwontalye/SJRM n’a pas voulu, par cette activité de nettoyage de la garde-à-vue de Ouanaminthe, remplacer l’Etat, mais plutôt attirer son attention sur ce qui est de son ressort en lui demandant d’assumer ses responsabilités vis-à-vis des prévenus et prisonniers qui ont des droits imprescriptibles et inaliénables en tant que personnes humaines. Solidarite Fwontalye/ SJRM veut, entre autres, rappeler aux concernés que le respect des Droits Humains est indispensable pour une bonne distribution de la justice non seulement en Haïti mais aussi dans le monde entier.

Somme toute, Solidarite Fwontalye/SJRM lance un appel à l’Etat haïtien, lui demandant :
- De respecter le droit à la santé des prévenus et des prisonniers, leur droit de vivre dans un lieu décent et propre, de se nourrir, de se récréer, etc.
- De les traiter avec justice et équité tant dans les procédures à suivre aux tribunaux que dans les garde-à-vue et les prisons.
- De rendre la justice plus dynamique et efficace.
- De fournir au personnel de la justice (commissaire du gouvernement, juges, policiers, etc.) les équipements nécessaires à l’exécution de leur travail.
- De faire des prisons un endroit effectif de correction et de réhabilitation sociale des délinquants.
- D’investiguer sur le mode de traitement infligé à la personne humaine dans tous les garde-à-vue et prison du pays pour une meilleure distribution de la justice.

Equipe des Droits de l’homme,
Solidarite Fwontalye/SJRM Ouanaminthe
27.10.2006

Contact : André IBREUS, av.
Tél : (509) 4960102.
E-mail : ibreusa@yahoo.fr