P-au-P, 25 Oct. 06 [AlterPresse] --- Le Premier Ministre Jacques Édouard Alexis a condamné, ce mardi 24 octobre 2006, les récents propos en République Dominicaine d’une cadre des Nations Unies, Johanna Mendelson, qualifiant Haïti d’État en faillite.
« Nous ne sommes pas contents au niveau du gouvernement de la déclaration de votre conseillère, faite en République dominicaine, où elle a eu à traiter le peuple haïtien d’une façon qui ne correspond pas du tout à la réalité », fustige le chef du gouvernement haïtien.
Intervenant à une cérémonie commémorant le 61e anniversaire de la création de l’ONU, Jacques Édouard Alexis, qui n’a pas voulu utiliser de « langue de bois », laisse comprendre que son gouvernement digère mal de telles assertions.
« Nous ne sommes une menace pour personne (…) Nous pouvons reconnaître que nous avons été handicapés dans notre naissance même, dans notre développement dès l’origine », indique le Premier Ministre haïtien.
Le 14 octobre 2006, en marge de la Conférence Internationale des Amériques, Johanna Mendelson (1) a déclaré que « pour la République Dominicaine, pays qui expérimente depuis les dix dernières années un fort taux de croissance économique et de progrès, la présence à ses côtés d’Haïti, un État en faillite, dont le nom figure sur la liste de la Banque Mondiale parmi les pays pauvres et en crise (pays LICUS), est un fait important à prendre en considération ».
Selon Mendelson, « l’échec d’Haïti aura un impact considérable sur l’avenir de la République dominicaine… Son instabilité a déjà entraîné un flux croissant de réfugiés économiques qui tentent d’échapper à la misère et à la violence et a occasionné la propagation du VIH/SIDA à la frontière ».
Le titre de l’intervention de Johanna Mendelson était le « Rôle de l’ONU face aux nouvelles menaces mondiales. Les pays de l’Amérique doivent-ils tolérer un État en faillite dans leur arrière-cour ? Un appel pour une action multilatérale ».
Les propos de Mendelson ont été condamnés par le Groupe d’Appui aux Réfugiés et Rapatriés (GARR), une plate-forme haïtienne évoluant en Haïti.
« Nous n’avons aucune raison de laisser un État en faillite continuer ainsi dans une région qui, pour le moins, est en voie de prospérité », a estimé la conseillère du chef civil de la Mission de paix de l’ONU en Haïti. Selon Johanna Mendelson, les pays des Caraïbes devraient réviser leur agenda politique afin d’éviter que le conflit en cours en Haïti soit répandu.
Le Premier Ministre Jacques Édouard Alexis invite tout un chacun à « être très prudent lorsqu’on se prononce sur Haïti. »
« Nous ne sommes pas un pays violent. Au contraire, si on essaie de faire le ratio, forces de sécurité, police et population, on se rend compte très vite que ce n’est pas en Haïti qu’on devra chercher une société violente, une société criminelle », rétorque le chef du gouvernement haïtien.
Pour le Premier Ministre, il y a des conditions objectives qui expliquent la situation dans laquelle Haïti se trouve à l’heure actuelle.
« Nous multiplions les efforts, nous nous mobilisons pour que, en ce qui concerne la gouvernance du pays, gouvernance politique, gouvernance économique, nous améliorions singulièrement la performance et le score du pays », promet Jacques Édouard Alexis.
Le chef du gouvernement réaffirme aussi la détermination de son équipe à faciliter l’accès à l’éducation des 500 mille enfants en âge scolaire qui ne vont pas à l’école.
« Nous devons trouver des solutions à ce genre de problème. Mais nous insistons également auprès de la communauté internationale pour qu’il y ait en Haïti une autre façon de coopération », soutient le Premier Ministre.
Jacques Édouard Alexis croit qu’il faut passer à un autre niveau de coopération avec Haïti si on veut réellement apporter une solution viable aux différents problèmes du pays. [do rc apr 25/10/2006 0:00]
NDLR (1)
Une recherche sur Internet indique que, depuis 2002, Johanna Mendelson-Forman a servi comme officière senior dans le cadre d’un programme pour la paix, la sécurité et les droits humains à la Fondation des Nations Unies, créée en 1998 avec un don d’un billion de dollars fourni par le philanthrope Ted Turner pour supporter les causes et activités onusiennes.
Avant de rejoindre la Fondation des Nations Unies, Johanna Mendelson a codirigé une commission bipartite de haut niveau sur la Reconstruction Post-Conflits, pour le compte de l’Association de l’Armée des Etats-Unis et le Centre pour les études stratégiques et internationales. Elle a également été responsable senior dans un programme de l’Association de l’Armée des Etats-Unis sur le rôle de la puissance militaire américaine au 21e siècle (RAMP).
Pendant les huit dernières années, elle a occupé des positions importantes à l’agence des Etats-Unis d’Amérique pour le développement international (USAID), dont la plus récente en tant que conseillère politique pour le Bureau aux Réponses Humanitaires, où elle était chargée de la politique de l’agence sur la Reconstruction Post-Conflits, la sécurité et le mode de gestion publique.
Entre 1998-1999, sous les auspices de l’USAID, elle a joué un rôle essentiel à l’unité Post-Conflits nouvellement créée à la Banque Mondiale. En 1994, elle a été nommée en tant que conseillère au bureau nouvellement créé autour des Initiatives de transition. Elle a été également, en 1997, l’une des fondatrices d’un Réseau de Prévention des Conflits, une coalition formée par les pays donateurs et les Nations Unies, oeuvrant ensemble pour coordonner et soutenir la reconstruction des sociétés déchirées par la guerre.