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Haïti : Les femmes quasi absentes au gouvernement complété d’Alexis

Une administration publique toujours monopolisée par les hommes

Analyse

Actualisée le 10 septembre à 15:00

P-au-P, 08 sept. 06 [AlterPresse] --- Le gouvernement du Premier Ministre Jacques Edouard Alexis n’a pas tenu sa promesse d’intégrer des femmes dans les directions générales de l’administration publique en Haïti, constate l’agence en ligne AlterPresse.

Aucune femme n’a été choisie parmi les 13 nouveaux directeurs généraux installés par le gouvernement. Seule une déléguée du ministère à la condition féminine et aux droits des femmes (MCFDF), Me Dilia Lemaire, est nommée comme membre dans une nouvelle commission sur le désarmement.

Le quota des femmes dans les postes de responsabilité reste très faible dans le remaniement opéré le 7 septembre 2006, portant à 5 le nombre des secrétaires d’Etat (tous des hommes) dans l’actuel gouvernement, composé, entre autres, de 18 ministres, dont 2 femmes.

Cette situation laisse percevoir un manque de sensibilité à la cause des femmes, au lendemain de la présentation du rapport mondial population 2006, faisant valoir l’apport considérable des ressources féminines dans le développement international.

Faut-il rappeler que les Nations Unies avaient placé la journée internationale des femmes, le 8 mars 2006, sous le thème « le rôle des femmes dans les prises de décision ».

N’y aurait-il pas de femmes compétentes en matière politique en Haïti ?

C’est la question que se posent aujourd’hui divers secteurs nationaux au regard du panorama de la présence insignifiante des femmes aux instances de décision publique en Haïti.

Au total, seulement deux femmes sur 23 postes ministériels figurent dans le cabinet Alexis II (après la période 1999-2001), en l’occurrence Marie Laurence Jocelyn Lassègue à la Condition féminine et aux droits des femmes et Maguy Durcé au Commerce et à l’industrie.

Côté Parlement, on compte 4 sénateures (Huguette Lamour, département des Nippes ; Edmonde Supplice Beauzile, Plateau Central ; Céméphise Gilles, Nord ; Evelyne Chéron, Ouest) sur 26 membres du Grand Corps et 2 députées (Jossie Etienne, circonscription de Milot et Cluny Dumay, Croix des Bouquets) sur 84 membres de la Chambre Basse.

Au Conseil Electoral Provisoire (CEP), il y a seulement 1 femme (Josefa Raymond Gauthier) sur les 9 conseillers.

Voilà donc le tableau actuel de la présence des femmes aux instances de décision en Haïti, sans compter les quelques rares femmes retrouvées dans certains organismes autonomes et quelques cartels municipaux.

Pour les observateurs, la réalité du quota très faible de femmes à l’actuel gouvernement marque un léger recul par rapport au nombre de femmes retenues dans le premier gouvernement de l’ex-Premier Ministre Gérard Latortue en mars 2004.

4 femmes, sur 18 postes ministériels, ont alors été choisies, respectivement au ministère du commerce et de l’industrie (Danielle Saint-Lot), à la santé publique et à la population (Josette Bijoux), au MCFDF (Adeline Magloire Chancy), à la culture et à la communication (Magali Comeau Denis).

A rappeler qu’en février 2005, l’Exécutif intérimaire était revenu sur le choix de Marie Claude Bayard, Présidente de l’Association des Industries d’Haïti (ADIH), comme ministre du commerce, à cause de sa double nationalité (haïtienne et américaine). Le 22 juin 2005, Cécile Coulanges Banatte a été nommée Secrétaire d’Etat aux Affaires Sociales.

Les mouvements féministes ont toujours souhaité une plus forte présence de femmes dans les postes publics de commande afin de prévenir les décisions sexistes et autres comportements attentatoires à la cause des femmes.

La promotion, à la fin de 2005 de l’ancienne porte-parole de la Police Nationale d’Haïti, Gessie Cameau Coicou, au poste d’inspectrice générale de l’institution (qu’elle occupe encore), n’était pas passée inaperçue.

Dans une lettre ouverte adressée le 13 mars 2004 au Premier Ministre Gérard Latortue, la Coordination Nationale de Plaidoyer pour les Droits des Femmes (CONAP) avait recommandé le principe du quota d’un tiers, dans la constitution du gouvernement et de l’appareil d’Etat. Ce quota a été préconisé comme « une mesure minimale, puisque très loin du pourcentage de 52% que représentent les femmes dans la société haïtienne ».

Pour une population nationale estimée à 2,302,875 femmes contre 2,145,890 hommes, le CEP fait état d’un nombre de 1,738, 715 femmes inscrites sur le registre électoral en décembre 2005 contre 1,794, 715 hommes à la même date. L’Ouest et l’Artibonite sont les départements géographiques à avoir enregistré le plus grand nombre d’électrices potentielles.

L’agence en ligne AlterPresse n’a pas pu obtenir le pourcentage de femmes briguant les postes électifs aux futures consultations territoriales annoncées pour le 3 décembre 2006. Seulement, officiellement, il n’existe qu’un parti politique dirigé par une femme, le Regroupement Patriotique pour le Renouveau Haïtien (REPAREN) de Judie C. Roy, qui a pris part aux dernières présidentielles.

Faudrait-il conclure que l’intégration des femmes aux instances de pouvoir dans la République caribéenne prendra encore beaucoup de temps à être matérialisée ?

« Le renforcement du pouvoir d’action des femmes et leur pleine participation sur un pied d’égalité à tous les domaines de la vie sociale, y compris aux prises de décisions et leur accès au pouvoir, sont des conditions essentielles à l’égalité, au développement et à la paix », soulignait le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, lors de la célébration de la date du 8 mars 2006, journée internationale des femmes, consacrée au thème « le rôle des femmes dans les prises de décision ». [rc gp apr 08/09/2006 15 :00]