Pilate (Haïti), 17 Juil. 06 [AlterPresse] --- Plus d’une centaine d’actes d’état civil ont été remis ce 15 juillet 2006 à quelques résidents victimes des inondations meurtrières ayant ravagé, en septembre 2004 lors du passage du cyclone Jeanne, la zone de Pilate, à plus de 180 kilomètres au nord de la capitale.
Cette distribution s’inscrit dans un programme mis en place par le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) dans l’objectif de permettre à ces Haïtiens de reconstituer leurs pièces d’identité, a observé l’agence en ligne AlterPresse.
« Toute personne qui ne dispose d’aucune pièce d’identification vit dans un flou légal. Sans ces pièces, vous n’existez pas, même si vous vivez », rappelle, dans des propos de circonstance, Fito Lespérance du RNDDH qui demande aux bénéficiaires de ce programme de garder en lieu sûr leurs pièces importantes, surtout lorsqu’il pleut.
Pour sa part, Yolène Gilles du RNDDH suggère aux habitants de Pilate de photocopier les pièces reconstituées tout en mettant en pratique les conseils des autorités locales sur la gestion des risques et désastres.
« Posséder une pièce d’identification est l’un des droits les plus élémentaires. Vous n’avez rien à payer, ce que vous recevez aujourd’hui est un geste du RNDDH », souligne la militante des droits humains.
Dans la petite salle paroissiale Sainte Rose de Lima de Pilate, où a lieu cette distribution, des pères et mères de famille se sont montrés reconnaissants envers le Réseau National de Défense des Droits Humains pour avoir pris une telle initiative.
« Je ne sais pas comment remercier ces personnes pour avoir fait un si beau travail. Je n’avais aucun espoir d’avoir un autre acte de naissance, aujourd’hui je l’ai grâce à ces fils de Dieu », se réjouit Jacqueline Similien.
Née le 10 février 1966, Jacqueline Similien habite près de la grande rivière qui traverse le village de Pilate. « Lorsqu’il pleut, je me sens vraiment effrayée », dit-elle, le visage abîmé en dépit de ses quarante ans.
Recenser les survivants de Jeanne dans cette ville habitée par environ 30 mille personnes n’était pas du tout facile à l’organisme de promotion de droits humains. Certains habitants se sont montrés très réticents à fournir les informations sollicitées par Sœur Rosie François du Réseau Nord de Défense des Droits Humains (RENDH/RNDDH) en charge du dossier.
« J’ai fait des annonces à la radio, à l’église, malgré tout ils n’étaient pas disposés à nous rejoindre », indique la responsable des archives à l’église Sainte Rose de Lima de Pilate. « Pourtant, certains citoyens qui n’avaient pas d’acte de naissance en ont profité pour le retirer », poursuit-elle.
A Pilate, comme dans d’autres régions d’Haïti, nombreux sont les citoyens qui vivent dans ce flou légal. « Ici, je connais des gens âgés de plus de 40 ans qui n’ont jamais de pièce d’identité », précise l’archiviste à AlterPresse.
Pradieu Destiné, l’unique officier d’état civil de la ville, est privé de tous moyens logistiques.
« Je n’ai même pas de registre ni de machine à écrire, je fonctionne avec les moyens du bord », soupire ce courageux officier d’état civil qui occupe ce poste depuis le 28 octobre 1986.
« Mes supérieurs hiérarchiques ont promis de recruter deux secrétaires pour me seconder, rien de concret jusqu’à présent. Ils n’ont pas tenu leurs promesses », reproche-t-il.
Dans l’intervalle, Fito Lespérance s’engage à alerter les autorités compétentes sur la question en vue de permettre aux citoyenne et citoyens de s’identifier comme Haïtiennes et Haïtiens partout sur la planète Terre. [do rc apr 17/07/2006 10:00]