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Un an après l’assassinat du poète-journaliste Jacques Roche, la peur tend à refaire surface en Haïti

P-au-P, 10 Juil. 06 [AlterPresse] --- Une année après l’enlèvement suivi de l’exécution du poète-journaliste Jacques Roche, la peur revient chez la population de Port-au-Prince (capitale d’Haïti) qui exige de l’Etat de meilleures conditions de sécurité, selon plusieurs témoignages à l’agence en ligne AlterPresse.

Dans la matinée de ce 10 juillet 2006, qui ramène le premier anniversaire de l’assassinat de Jacques Roche, l’angoisse tend à étreindre la population, presque de manière semblable à la situation qui a prévalu en juillet 2005. Les habitants observent beaucoup de prudence à gagner les rues pour vaquer à leurs occupations coutumières, tant le niveau des actes de banditisme, y compris d’enlèvement et de séquestration, paraît élevé depuis mai 2006.

Les détenteurs d’armes ont annoncé les couleurs dès les premiers jours de juillet 2006. Entre jeudi et vendredi (6 et 7 juillet), au moins 20 personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées dans des affrontements entre bandes armées rivales à Martissant, banlieue sud de la capitale.

Au Bel-Air (quartier populaire au nord-est, où avait débuté l’ « opération Bagadad » en septembre 2005) et à Cité Soleil (grande agglomération sous contrôle de gangs armés à la sortie nord de Port-au-Prince), des membres d’organisations populaires (OP), réputées proches de l’ancien Président Jean-Bertrand Aristide, réclament haut et fort leur intégration au sein de l’administration publique. Dans le cas contraire, ces membres d’OP promettent de passer à l’action et annoncent déjà le début d’une nouvelle opération dénommée « chauve-souris ».

Entre-temps, l’industrie du kidnapping continue de fonctionner, notamment à Carrefour (banlieue sud), selon des riverains interrogés par AlterPresse. Une jeune employée d’une banque commerciale haïtienne a été prise en otage pour être relâchée par la suite en échange de rançons.

Dans ce même secteur, des tirs d’armes automatiques ont été entendus durant toute la journée du jeudi 6 juillet jusqu’à l’aube du vendredi 7 juillet. Les malfrats, qui disposent d’armes de gros calibre, entre autres AK-47, Kalachnikov, opèrent à visage découvert, selon les témoignages recueillis sur place par AlterPresse.

« De nombreuses gens ont fui la zone, j’ai entendu à longueur de journée des rafales d’armes automatiques et le son des cartouches m’effraie », dit une jeune Secrétaire d’une entreprise privée résidant dans la périphérie de Martissant.

Suivant les informations disponibles à AlterPresse, les forfaits et autres actes répréhensibles, perpétrés, particulièrement dans la zone de Martissant, sont aussi l’œuvre de jeunes ressortissants haïtiens déportés des Etats-Unis d’Amérique, qui, en plus d’être armés, consommeraient de la drogue et s’adonneraient au trafic des stupéfiants.

Ces exactions touchent tous les secteurs de la population haïtienne.

La Police Nationale d’Haïti (PNH) a procédé à la libération successive, à la fin de la semaine dernière, de trois personnes, dont une ressortissante américaine et une écolière enlevée par des bandits armés alors qu’elle se rendait à son siège d’examens d’Etat dans le cadre de la session ordinaire du baccalauréat deuxième partie.

« L’insécurité n’est pas seulement à Martissant ou à Cité Soleil. A Frères [un quartier huppé de Pétion-Ville, est de Port-au-Prince), la tension monte d’un cran, le phénomène du kidnapping bat son plein », rapporte une jeune fille.

A l’occasion du premier anniversaire de l’enlèvement suivi d’assassinat du poète-journaliste Jacques Roche, un débat sur le kidnapping se tient à Port-au-Prince à l’initiative d’organismes de droits humains et d’organisations politiques.

Le chroniqueur culturel et poète Jacques Roche a été enlevé le 10 juillet 2005 dans le quartier de Nazon (nord-est de la capitale) par des individus armés. Les ravisseurs exigeaient une rançon de 250,000 dollars américains en échange de sa libération.

Quatre jours plus tard, soit le 14 juillet, et malgré le versement de 10 mille dollars américains par ses proches, le corps du journaliste a été retrouvé mutilé, torse nu, à Delmas 4, au nord-est de Port-au-Prince.

A date, deux présumés auteurs de l’assassinat de Jacques Roche seraient aux ordres de la Justice, alors que le prêtre lavalas Gérard Jean-Juste, arrêté à Pétionville (est de la capitale) au moment des funérailles du poète-journaliste le 21 juillet 2005 en relation avec le dossier, a été libéré et admis le dimanche 29 janvier 2006 au Jackson Memorial Hospital à Miami (Etats-Unis d’Amérique), « après avoir été autorisé par la justice haïtienne à se faire soigner à l’étranger » pour une leucémie.

Un communiqué du gouvernement intérimaire de l’époque informait qu’à cause de « la menace » pour la vie de Jean Juste, le président de la cour d’appel de Port-au-Prince a autorisé son départ vers un pays où il peut être soigné.

Selon le même communiqué, Jean-Juste n’a pas pu être admis dans un hôpital de Port-au-Prince, en raison du manque de structures adéquates.

La décision de la cour d’appel ne lève pas les charges qui pèsent contre le prêtre, selon le communiqué gouvernemental. Il devra, dès que son état le permet, répondre des faits qui lui sont reprochés, indiquait le gouvernement intérimaire. Depuis lors, rien ne filtre sur l’état de santé du prêtre lavalas.

Proche de l’ex président Jean Bertrand Aristide, Jean-Juste a été désigné en septembre 2005 comme candidat à la présidence de l’ancien parti gouvernemental Fanmi Lavalas. Le 26 septembre 2005, l’Archidiocèse de Port-au-Prince (de l’église catholique romaine) a décidé de suspendre le prêtre de ses fonctions sacerdotales pour avoir violé, selon les autorités religieuses, les règlements de l’église interdisant aux prêtres de s’immiscer dans les affaires politiques. [do rc apr 10/07/2006 11:50]