P-au-P, 28 juin 06 [AlterPresse] --- Près d’une cinquantaine de ressortissants haïtiens, dont 8 femmes, ont été expulsés par les autorités dominicaines à la frontière de Belladère (au nord-est de Port-au-Prince, à proximité de Elias Pina), dans l’après-midi du 27 juin 2006, apprend l’agence en ligne AlterPresse.
La plupart de ces 48 Haïtiens, parmi eux des pères et mères de famille résidant en République Dominicaine ainsi que des femmes enceintes, ont été appréhendés au moment où ils vaquaient à leurs activités quotidiennes, indiquent les victimes dans des témoignages fournis à la plate-forme haïtienne Groupe d’Appui aux Réfugiés et Rapatriés (GARR).
Les rapatriés du 27 juin 2006 ont tous été interceptés en différents endroits par des militaires dominicains qui ont opéré des razzias partout en vue de remplir l’autobus devant les ramener au point frontalier de Belladère.
Au cours du processus de rapatriement, des tentatives de viol des femmes capturées de force auraient été effectuées. Les agents de l’immigration ont aussi refusé à une femme enceinte l’accès à des toilettes pour faire ses besoins physiologiques, rapportent les rapatriés.
« Nous avons exhibé nos pièces d’identification, pourtant ils n’en ont pas tenu compte. En nous arrêtant, ils ont volé nos biens », souligne Pierre Paul, originaire de Jacmel, dans le Sud-est d’Haïti, mais connu en République Dominicaine sous le nom de Johnny.
« Les Dominicains ne peuvent pas prononcer nos noms et prénoms, voilà pourquoi ils nous appellent comme ils veulent », affirme-t-il.
Pierre Paul demande aux autorités haïtiennes de mettre sur pied un programme de création d’emplois en vue de permettre aux nationaux de rester dans leur pays.
« C’est la cherté du coût de la vie dans notre pays qui nous pousse vers la République Dominicaine », indique un autre rapatrié.
« Ils nous ont humilié en foulant aux pieds nos droits, même les plus élémentaires. A Malpasse [sur la frontière haïtiano-domincaine], même nos compatriotes haïtiens nous ridiculisent », soutient-il.
Ce ressortissant haïtien, qui vit en République Dominicaine depuis 9 ans, affirme disposer de ses pièces légales lorsqu’il a été intercepté par la migration dominicaine. Avec son rapatriement forcé de Santo Domingo, il laisse un enfant de 9 mois.
« Je ne sais pas encore quoi faire pour rejoindre ma famille là -bas, parce que je n’ai pas un sou pour le moment », se plaint-il.
« On m’a arrêtée à 9 heures du matin, puis on m’a refoulée en Haïti. J’ai laissé des enfants en République Dominicaine et mon mari ne sait pas si je suis rapatriée », déclare une jeune femme.
Une jeune étudiante, qui figure dans le groupe des rapatriés du 27 juin 2006, assure qu’elle vit en République Dominicaine depuis plusieurs années. Elle a pu faire ses études secondaires grâce à une petite activité commerciale.
« Je vends au détail des habits pour hommes et femmes, les bénéfices m’ont permis de payer mon écolage. D’ici au mois de juillet, je dois coûte que coûte entrer à l’université », dit-elle tout en se promettant de retourner à Santo Domingo.
Le rapatriement de ressortissants haïtiens par les autorités dominicaines a connu une proportion alarmante durant ces deux derniers mois. Au moins 800 Haïtiens ont été expulsés de la République dominicaine de la fin mai au 18 juin 2006, selon un décompte de laplate-forme GARR.
Ces expulsions ou rapatriements ont lieu en 2006 suivant « une autre formule », l’expulsion par petits groupes de personnes et en des points différents de la frontière principale, rapportait récemment à AlterPresse Wooldy Edson Louidor de Solidarité Frontalière de Ouanaminthe (Nord-Est d’Haïti), une branche du Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants (SJRM).
Plusieurs points non officiels de migration irrégulière, vers la République Dominicaine, ont également été répertoriés.
« Ouanaminthe constitue le premier point (officiel) où plus de voyages illégaux sont organisés ; le deuxième point (non officiel) est Méac, une section communale de Ferrier (Nord-Est), ville frontalière avec Sanchez (République Dominicaine) », signalait en mai dernier Solidarité Frontalière. [do rc apr 28/06/2006 16 :35]