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Haïti - Rép. Dominicaine : Situation lamentable des droits humains à la frontière, selon Solidarité Frontalière

Parallèlement, intensification du trafic d’illégaux haitiens

P-au-P, 26 juin 06 [AlterPresse] --- La situation des droits humains est très préoccupante sur la frontière haïtiano-dominicaine où le nombre de rapatriements s’accroît à un rythme accéléré, déplore Wooldy Edson Louidor de l’organisme « Solidarite Fwontalye » (Solidarité Frontalière), branche haïtienne du Service Jésuite aux Réfugiés et Migrants, basée à Ouanaminthe (nord - ville frontalière).

Dans une interview accordée à AlterPresse, le responsable de la section de communication et de plaidoyer de Solidarité Frontalière estime que le droit des Haïtiens est quotidiennement violé au niveau de la frontière. Wooldy Edson Louidor dénonce l’injustice sociale et les mauvais traitements infligés aux Haïtiens qui gagnent difficilement leur vie.

« Ces injustices sociales sont souvent constatées à Dajabón (ville dominicaine, frontalière avec Ouanaminthe) où fonctionne un marché binational. Les Dominicains violent les droits des petits commerçants haïtiens en leur imposant des taxes qui ne sont pas reconnues par l’Etat dominicain », s’insurge le militant des droits des migrants.

Edson Louidor indique, d’autre part, que les ouvriers haïtiens vendent leurs forces de travail à un prix dérisoire dans les entreprises dominicaines. Ce qui représente, selon lui, une injustice sociale qui mérite d’être prise en compte par les autorités étatiques des deux pays partageant l’àŽle.

Le responsable de Solidarité Frontalière attire l’attention sur les déportations massives d’Haïtiens qui s’effectuent à longueur de journée par les autorités dominicaines. Selon Edson Louidor, des citoyens dominicains sont souvent parmi les rapatriés.

Depuis les incidents de mai 2005, les rapatriements d’Haïtiens sont en nette progression.
« Entre août et novembre 2005, nous avons enregistré en moyenne 2000 rapatriés par mois », dit le militant des droits humains, qui souligne que les Dominicains veulent rendre les Haïtiens « responsables de tous les incidents qui se produisent là -bas ».

Du vendredi 13 au dimanche 15 mai 2005, l’Etat dominicain avait expulsé plus de 2000 Haïtiens, dominicains d’origine haïtienne et autres dominicains au teint foncé à Ouanaminthe - dont une majorité de femmes et d’enfants - causant ainsi une crise humanitaire.

A Ouanaminthe, la majorité des rapatriés étaient sales, en guenille, affamés, assoiffés, humiliés, souligne Louidor.

Cette situation devenait beaucoup plus compliquée avec l’assassinat, le 16 aout 2005, de trois jeunes Haïtiens : Willy Pierre, Gilbert Dominique et Paul Marc.

Les trois jeunes ressortissants haïtiens, qui se reposaient après leur journée de travail, avaient été attaqués à l’aube dans un atelier d’ébénisterie à Haina (périphérie sud de Santo Domingo). Les agresseurs avaient ligoté les jeunes et versé sur eux un liquide inflammable avant de mettre le feu.

En 2006, l’expulsion des Haïtiens se fait suivant « une autre formule. A l’heure actuelle, les Haïtiens sont expulsés en petit groupe et ne traversent pas la frontière principale », précise le porte-parole de Solidarité Frontalière.

De même, plusieurs points non officiels de migration illégale ont également été repertoriés. « Ouanaminthe constitue le premier point (officiel) où plus de voyages illégaux sont organisés ; le deuxième point (non officiel) est Méac, une section communale de Ferrier, ville frontalière avec Sanché (République Dominicaine) », signalait en mai dernier Solidarité Frontalière.

Chaque semaine, plus d’un millier de migrants provenant de tous les coins d’Haïti et accompagnés des réseaux de trafiquants dominico-haïtiens arrivent à Méac en vue de traverser vers le territoire voisin, souligne l’organisation.

Edson Louidor dénonce l’intensification de la traite et du trafic des personnes au niveau de la frontière. Il demande au Parlement haïtien de voter des lois visant à couper court à ces activités. [do gp apr 26/06/2006 13:20]