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Haïti : L’emprisonnement du chef de l’investigation financière embarrasse

P-au-P., 26 mai 06 [AlterPresse] --- Le directeur général de l’Unité Centrale de Renseignements financiers (UCREF) passe ce 26 mai sa cinquième nuit en prison.

Le juge d’instruction Jean Pérez Paul a décidé de transférer le dossier au Parquet du tribunal civil de Port-au-Prince pour le réquisitoire définitif.

Entre-temps, des organisations de droits humains et diverses associations de la société civile haïtienne continuent de réclamer la libération de Jean-Yves Noà« l.

Des employés de l’UCREF se disent indignés de l’arrestation de leur directeur, suivi d’emprisonnement prolongé. En guise de protestation et de solidarité, ils ont décidé « d’observer une suspension des activités relatives aux investigations en cours jusqu’à sa mise en liberté ».

Le président René Préval a rencontré le 25 mai plusieurs ministres du gouvernement ainsi que le responsable de l’Unité de lutte contre le trafic de la drogue et le blanchiment d’argent autour de cette affaire.

Dans un communiqué très lapidaire signé de Joseph Jasmin, chef de cabinet de Préval, la Présidence a invité les concernés à fournir des explications publiques concernant cette affaire et réaffirmé la détermination du nouveau chef d’Etat à combattre la corruption et l’impunité.

Pour sa part, le ministre sortant de la justice a fait appel au sens de la responsabilité des autorités judiciaires qui doivent être en mesure d’apprécier à tout moment la portée de leurs décisions.

Henri Marge Dorléans en appelle également au sens de la responsabilité de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux administratif pour que ses membres donnent suite aux rapports reçus, tant de l’UCREF que de la Commission d’enquêtes administratives.

« Les titulaires des comptes bloqués dans le cadre de ces enquêtes ont, eux aussi, droit à la justice. Les comptes ne peuvent pas être indéfiniment bloqués à partir des mesures conservatoires », souligne Dorléans.

Rappelant que l’Etat ne pourra pas fonctionner si les différentes entités qui le constituent ne jouent pas, chacune, sa partition, le ministre de la justice dit attendre « des responsables qu’ils prennent justement leurs responsabilités avec courage et engagement envers le bien commun ».

Jean-Yves Noà« l a été appréhendé par la police à son bureau dans l’après-midi du 22 mai 2006, puis conduit à la prison civile de la capitale dans le cadre d’un conflit qui l’oppose à un huissier du nom de Réginald Saint-Jean.

Selon les informations disponibles, le principal responsable de l’UCREF, qui faisait l’objet d’un mandat d’amener décerné par le juge d’instruction Jean Pérez Paul, est accusé d’ « arrestation illégale, enlèvement et séquestration sur la personne du huissier Réginald Saint-Jean ».

Réginald Saint-Jean, le huissier en question, a été dénoncé en mars 2006 pour usage de faux par Me. Harycidas Auguste, substitut du commissaire du gouvernement près le Tribunal de première instance de Port-au-Prince.

« C’est cet huissier qui a été accusé pour usage de faux, c’est lui qui avait tenté de délivrer des faux papiers pour permettre à certaines personnalités, dont les fonds ont été gelés par une décision de l’UCREF, de rentrer en possession de ces fonds dans des conditions obscures », a rappelé un responsable de droits humains, Pierre Espérance.
L’arrestation de Jean-Yves Noà« l est intervenue quelques semaines après une disposition des autorités judiciaires tendant à débloquer les fonds de personnalités proches de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide, parmi elles le nommé Ricardo Sanon et ses apparentés.

Le directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains (RNDDH), Pierre Espérance, peine à comprendre pourquoi les autorités concernées n’ont pas pris en compte les nombreux rapports, produits par l’UCREF, sur les dirigeants de l’ancien régime Lavalas impliqués dans la corruption et la dilapidation des caisses de l’Etat. [vs do rc apr 26/05/06 19:20]