P-au-P., 14 mai 06 [AlterPresse] --- Des dizaines de prisonniers sur le toit du Pénitencier national depuis le petit matin, exhibant pour la plupart un corps apparemment sans vie ; un des leurs qui aurait été tué par balle.
D’autres montrant un maillot ensanglanté et arborant des pancartes comportant des slogans divers.
Dans les parages de la prison centrale, de nombreux agents de la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti (MINUSTAH) sont en faction, munis pour la plupart d’armes automatiques et de gourdins.
Des chars de la force ONUsienne et des véhicules de la Police Nationale d’Haïti (PNH) ainsi que des filets de sécurité constitués par des casques bleus servent de barrages dans les artères avoisinantes, à quelques dizaines de présumés proches des détenus qui tentent bruyamment d’approcher l’immeuble.
Des mutins qui s’agitent sur la toiture du « Titanic » (nom donné au bâtiment le plus spacieux de la principale prison d’Haïti) aux cris notamment de « Vive Préval » et « Liberté », le brouhaha des revendications et sanglots de quelques parents de détenus et partisans de l’ancien président Jean Bertrand Aristide postés à l’extérieur, des tirs sporadiques attribués par des riverains à des agents de la MNUSTAH et de l’Administration Pénitentiaire Nationale (APENA), des pourparlers incessants entre journalistes désirant capter la scène le plus près possible et des casques bleus jordaniens voulant les maintenir à distance.
Ce tableau se donnait à voir jusqu’à la mi-journée du dimanche 14 mai 2006, alors que, à plus de cinq cents mètres, le président élu d’Haïti, René Préval, allait faire son entrée au Palais Législatif pour le serment constitutionnel par-devant l’assemblée nationale.
Il est exactement onze heures cinquante minutes locales (16:50 GMT), quand des policiers de la Compagnie d’Intervention et de maintien de l’ordre (CIMO), munis seulement de bâton, et des agents de l’APENA parviennent à convaincre, pacifiquement, les mutins à regagner leurs cellules.
Aucun bilan officiel n’a été communiqué à date. Mais les spéculations allaient bon train dans les rangs des détenus.
Ces derniers sont allés jusqu’à avancer le chiffre de dix morts à travers une banderole qu’ils exhibaient aux journalistes massés en face de la prison centrale. Un bilan relayé aux micros des médias présents par les parents des détenus.
Parmi les parents de détenus qui manifestaient dans le voisinage du Pénitencier national figurait Kermly Antoine. Elle est l’épouse de Yvon Antoine dit « Yvon zapzap ».
Celui-ci est écroué pour son implication présumée, notamment dans le raid sanglant perpétré par des sbires du régime de Jean Bertrand Aristide contre le local de la Faculté des Sciences Humaines le 5 décembre 2003. Le recteur de l’Université d’Etat d’Haïti, Pierre Marie Paquiot, s’en était sorti avec les genoux fracturés.
Plus de quatre cents détenus s’étaient évadés du Pénitencier national, le 19 février 2005, à la faveur d’un raid effectué par des inconnus armés.
Le 1er janvier 2004, plus de six cents prisonniers, dont des criminels dangereux, s’étaient également échappés de la prison centrale, mais dans des conditions mystérieuses. Des organisations de droits humains avaient dénoncé, à l’époque, des complicités à l’intérieur du Pénitencier National qui auraient facilité cette évasion. [vs rc apr 14/05/06 15:30]