P-au-P, 20 avril 06 [AlterPresse] --- L’hôpital de l’Université d’Etat d’Haïti (HUEH) présente depuis quelques jours l’image d’une maison abandonnée par ses occupants.
Plus rien ne fonctionne dans ce grand centre hospitalier du pays qui dessert une population de plus de 2 millions d’habitants, sans compter celles des zones excentrées d’Haïti. Un rationnement drastique du courant électrique ajoute à ce lot de problèmes qui débouche sur un arrêt de travail illimité, constate l’agence en ligne AlterPresse.
Une grève du personnel de santé et des membres du petit personnel de l’HUEH perdure. Certains grévistes exigent de meilleures conditions de travail, d’autres le paiement de plus de 5 mois d’arriérés de salaire.
« Quand ils (les responsables) veulent nous faire taire, ils lancent des tracts dans tous les coins de l’hôpital arguant qu’ils vont nous payer », affirme un protestataire.
Selon les informations obtenues par AlterPresse auprès des grévistes, les hauts fonctionnaires de l’HUEH brillent par leur absence depuis quelques jours. Le directeur médical se trouve lui-même à l’étranger pendant que l’administrateur abandonne son poste sous haute protection policière.
« La dernière fois que nous avons croisé l’administrateur c’était lundi dernier (17 avril), il s’était fait escorter par la police pour laisser l’hôpital », dit Milo Lévy Félix, président du Syndicat des travailleurs en santé (STS) à l’HUEH.
Hormis le service d’urgence, rétabli depuis le début de cette semaine, toutes les autres structures sont paralysées, selon les précisions de ce syndicaliste.
« Nous passerons toutes nos journées et, s’il le faut, toutes nos nuits à exiger le paiement de 5 à 7 mois d’arriérés de salaire », dit un jeune homme, l’air désabusé.
Mercredi 19 avril 2006, était le dernier délai que s’était accordé le Ministère de la santé publique et de la population (MSPP), pour fournir une réponse définitive concernant les revendications des employés de l’HUEH.
Selon Milo Lévy Félix, un accord a même été conclu avec le MSPP qui s’est engagé à payer au personnel de l’HUEH ses arriérés de salaires. « Nous nous étions entendus avec le Ministère de la santé publique pour la perception de nos salaires de misère, mais jusqu’à présent rien n’est clair », se plaint-il.
« Nous devons coûte que coûte percevoir notre salaire, car nous avons travaillé », ajoute une dame d’une quarantaine d’années et mère de famille.
Outre le paiement des arriérés de salaire remontant à l’exercice 2004-2005, les grévistes du petit personnel réclament la réintégration de Serge Volcimus (plombier) et Carlo Alcide (électricien), deux des leurs mis à l’écart.
« Des démarches auprès des autorités de tutelle en vue de leur réintégration restent jusqu’ici sans succès », déplore Milo Lévy Félix.
Par ailleurs, le réfectoire réservé aux médecins ne fonctionne pas depuis tantôt deux mois et « il n’y a même pas de médicaments, alors que l’hôpital dispose d’un budget de fonctionnement très élevé », s’insurge Milo Félix.
Le budget de la République pour l’exercice 2005-2006 accorde une enveloppe de 1, 27 milliards de gourdes (42,5 gourdes = un dollar américain) au Ministère de la santé publique.
Cette somme doit lui permettre en priorité de réhabiliter les infrastructures sanitaires de base et de construire des hôpitaux et centres de santé, dont une institution spécialisée dans la prise en charge du cancer, ainsi que par l’amélioration de ratio médecin/nombre d’habitants.
Plus de 166 millions de gourdes (166 437 038 gourdes) ont été allouées à l’hôpital général.
C’est dans ce contexte de crise qui affecte l’HUEH que le collectif d’organisations sociales qui luttent contre la cherté de la vie demande aux autorités concernées de respecter leur engagement pris le 12 avril dernier envers ces grévistes.
Le Collectif formule des recommandations en cinq points en vue de résoudre ce problème qui affecte gravement les malades.
Payer immédiatement les membres du petit personnel leurs arriérés de salaire, augmenter le salaire de tous les employés des hôpitaux publics, créer de meilleures conditions de travail, reconduire les employés révoqués et mettre à la disposition des patients des médicaments à un prix raisonnable, sont les cinq propositions soutenues par le collectif dans un document remis à AlterPresse.
Selon le rapport mondial 2006 sur la situation sanitaire dans le monde, publié le 6 avril dernier par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 57 pays, dont Haïti, font face à une pénurie en personnel de santé qui empêche les systèmes de santé de combattre efficacement les maladies chroniques, comme la grippe aviaire, et de faire des progrès sanitaires. [do apr 20/04/2006 10 :00]