P-au-P, 13 avril 06 [AlterPresse] --- Le chef de la Police nationale d’Haïti (Pnh), Mario Andrésol, avise, à qui veut l’entendre, que son institution reste déterminée à démanteler les gangs de tout poil, quel que soit le repaire où ils se cachent.
« Haïti est un pays de gangs, on les retrouve partout dans l’administration publique : les douanes, l’immigration, la Direction Générale des Impôts (plus connue sous le nom de « Contributions »), le service de la circulation routière et toutes les instances publiques. Sitôt terminé l’assainissement au sein de la Police (nous venons d’appréhender 3 policiers), nous allons nous mettre sur la piste des autres gangs », affirme Andrésol, s’exprimant devant la Presse en marge de l’extradition, via la frontière Malpasse / Jimani le mercredi 12 avril 2006, d’une ressortissante dominicaine, Maria Estella Fallardo, recherchée par les autorités voisines pour implication présumée dans l’assassinat en 2005 d’un professeur d’université.
La Pnh serait sur le point de mettre fin aux activités d’un gang spécialisé dans le vol de véhicules, sur lequel la capturée dominicaine aurait fait certaines révélations. Elle fera en sorte de "placer" tous les gangs hors d’état de nuire, promet-il.
Se déclarant conscient des remous que ses déclarations risquent de provoquer à nouveau dans le milieu, Andrésol estime du devoir de la génération actuelle de travailler à restaurer l’image d’Haïti, en faisant cesser les actes répréhensibles et en luttant contre l’impunité.
Il déplore, en ce sens, l’absence de suivi, du côté de l’appareil judiciaire, en ce qui concerne les dossiers du directeur général de Radio Haïti Inter Jean Léopold Dominique (assassiné le 3 avril 2000 en compagnie du gardien de la station Jean-Claude Louissaint) et du journaliste Brignol Lindor (exécuté le 3 décembre 2001).
Le directeur général de la Pnh n’a pas mâché ses mots vis-à -vis des « contrebandiers » qui feraient passer, par des moyens illicites à la frontière haïtiano-dominicaine (utilisation du Lac Azuei, qui touche les deux parties de la frontière Malpasse / Malpaso), des produits chimiques « dangereux », dont l’importation requiert une autorisation spéciale de ministères spécifiques.
Andrésol se réfère à la saisie, par les autorités douanières haïtiennes, d’une cargaison de méthanol emmagasiné dans des barils sous un autre label afin de donner le change et de ne pas payer les redevances dues à l’État haïtien.
« Il est temps que ces genres d’actions cessent dans le pays. Les premières informations font état de l’implication de beaucoup de gens ; les contrevenants, quels qu’ils soient, seront arrêtés et remis aux autorités judiciaires pour les suites légales », avertit le directeur général de la Pnh.
Jeantal Clervil, directeur de la douane haïtienne de Malpasse, à une quarantaine de kilomètres au nord-est de la capitale, explique la confiscation, le 11 avril 2006, d’un véhicule transportant 60 barils de méthanol apparemment abandonné dans la perspective de le faire transiter, vraisemblablement, par de petites embarcations sur le Lac Azuei « pour détourner la vigilance des agents et soustraire l’importateur des impôts requis ».
A rappeler qu’un rapport interne de la Direction Centrale de la Police Judiciaire, parvenu à la Presse Nationale au début de l’année 2006, a suscité du remue-ménage au sein de l’appareil judiciaire national, qui vient d’être doté, le 10 avril, d’un Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj) exclusivement composé de juges, dont l’un d’entre eux est accusé de « vendre la justice au plus offrant ».
Ce Cspj a vu le jour au lendemain des observations d’une commission d’investigation sur le degré de « corruption des juges » dans divers dossiers, dont la libération de kidnappeurs. Sans mentionner le mot « corruption » chez les juges « incriminés », la commission d’investigation a relevé des « irrégularités » dans les actes posés par les magistrats en question.
A l’intérieur du Cspj, les organismes de droits humains critiquent l’absence de représentants de la société haïtienne, en dehors des magistrats, contrairement aux recommandations faites par le Forum citoyen pour la réforme de la justice.
Le département d’État des États-Unis d’Amérique vient de dénoncer l’attitude du système judiciaire haïtien qui tendrait à garantir une « impunité légale » comme système judiciaire, suivant le constat dressé dans son « rapport 2005-2006 sur le soutien international aux droits humains et à la démocratie en Haïti ».
Depuis de nombreuses années, la population haïtienne, dont les revendications principales s’articulent autour de la quête d’une justice véritable contre l’impunité, n’est pas du tout tendre envers les juges qui, à ses yeux, se comportent plus en « association de malfaiteurs qui défendent les criminels » sur divers dossiers, dont la cession de propriété à des gens sans titres ni qualité ainsi que la libération de bandits sur la base de procédures soi-disant non respectées. [lf rc apr 13/04/2006 16:00]