AlterPresse] --- Le week-end de mobilisation contre la guerre a eu des échos à Port-au-Prince, où un rassemblement a été convoqué le 18 mars par la Plate-forme Haïtienne pour un Développement Alternatif (PAPDA), afin de demander le départ des troupes onusiennes déployées en Haïti.
A la faculté des Sciences Humaines (FASCH), plusieurs dizaines d’Haïtiens ont produit de nombreuses réflexions sur des thèmes divers, dont la militarisation d’Haïti, la guerre états-unienne en Irak, la lutte des classes, la sécurité, la paix et la refondation nationale.
Cette activité organisée en prélude à la Journée Anti-militariste du 19 mars et qui a été réalisée dans le cadre de l’Initiative globale pour la paix, a drainé des militants de gauche, syndicalistes, dirigeants paysans, résidents des quartiers populaires de Port-au-Prince et quelques dizaines d’étudiants de la FASCH étaient présents.
« C’est une journée pour dénoncer les exactions commises par les militaires de la Mission de Stabilisation des Nations Unies en Haïti (MINUSTAH), pour dénoncer la guerre et la domination étrangère sur les pays du Sud », précise Josué Vaval de la PAPDA.
Ansy Vixamar de l’organisation Tet Kole Ti Peyizan (Union des Petits Paysans), souligne que l’occupation américaine de 1915 à 1934 « et qui continue jusqu’à présent », a coûté la vie à quelques deux mille paysans haïtiens.
« Ils ont massacré deux mille paysans à Marchaterre (Sud) en 1919 et ont assassiné un nombre indéterminé de personnes dans la prison du Cap-Haïtien (Nord) de 1922 à 1929 », affirme le dirigeant paysan.
Vixamar appelle les Haïtiens à faire front commun en vue de défendre la souveraineté du pays et de créer les moyens permettant aux familles haïtiennes de pourvoir aux besoins de leurs enfants.
« L’heure est venue de contraindre les militaires étrangers à se retirer, nous laissant le soin de construire des universités au bénéfice de tous les fils d’Haïti », martèle-t-il.
Durant toute la journée, une bande de rara venue de Martissant (banlieue sud) a assuré, en partie, l’animation musicale en chantant sur un rythme endiablé : « Il faut que la MINUSTAH parte, elle doit partir immédiatement ».
Le président élu d’Haiti, René Préval, prône le maintien des troupes de la MINUSTAH sur le terrain. Le pays « a besoin de la présence de la MINUSTAH », qui compte 7.300 militaires et environ 1.700 policiers de plusieurs pays, a déclaré Préval lors d’une visite en Argentine le 13 mars.
Préval souhaite, toutefois, qu’ « une nouvelle orientation » soit donnée au mandat de la MINUSTAH, sans se prononcer sur la durée de ce mandat.
Durant le rassemblement du 18 mars, Marc Arthur Fils-Aimé de l’Institut Culturel Karl Levêque (ICKL) a, pour sa part, relevé les conséquences néfastes de l’occupation américaine de 1915 sur les institutions haïtiennes.
« Ils ont détruit la paysannerie agricole, contraints les paysans à se réfugier en République Dominicaine et à Cuba, ils ont dissout notre armée, l’armée indigène, pour nous donner une armée soumise, ils ont pillé notre économie et donné naissance à une classe dirigeante sans scrupule », relève Marc Arthur Fils-Aimé.
La reconstitution de l’armée, dissoute de fait par l’ancien président Jean Bertrand Aristide à son retour d’exil après le coup d’Etat militaire de 1991-1994, est au centre d’un débat médiatique depuis que Préval a fait part récemment de son projet d’amendement de la constitution pour abolir l’armée.
Préval estime irréaliste de reconstituer l’armée et prévoit la mise en place d’une gendarmerie. Une commission gouvernementale recommande la mise en place d’une nouvelle armée.
Plusieurs autres personnalités ont pris part à la journée de mobilisation du 18 mars à la FASCH. On a noté la présence du professeur Yves Dorestal, doyen de la Faculté d’Ethnologie, du syndicaliste Didier Dominique, de l’organisation Batay Ouvriye (Lutte Ouvrière) et de Georges Joseph, directeur de la Société d’Animation et de Communication Sociale (SAKS).
Intervenant sur l’apport de la culture populaire à la lutte pour la libération d’Haïti, Georges déclare qu’il n’existe pas de peuple sans culture. « Les forces d’Haïti, aujourd’hui, résident dans sa culture. Le vodou permet de parler d’Haïti partout dans le monde, nous devons nous accrocher à nos valeurs culturelles », soutient-il.
La journée a été ponctuée de musique enregistrée, de chants patriotiques, de textes poétiques et de projections de documentaires. [do gp apr 20/03/2006 09:00]