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Vie syndicale : Nouvelle norme de prêt de la SFI liée aux droits du travail

Effets sur les droits des travailleurs haïtiens en zone franche

P-au-P, 24 févr. 06 [AlterPresse] --- La Confédération Internationale des syndicats libres (CISL) salue la récente adoption d’une nouvelle norme liant l’accès aux prêts à la performance en matière de droits du travail et de conditions de travail.

Cette décision vient d’être prise par la Société financière internationale (SFI), une filiale de la Banque mondiale chargée des prêts au secteur privé.

Selon un communiqué de la CISL, une fois que la nouvelle norme entrera en vigueur dans les prochaines semaines, toute entreprise qui empruntera auprès de la SFI sera tenue de se conformer aux normes internationales du travail (NIT), telles qu’elles sont définies par l’Organisation internationale du travail (OIT)

Les NIT prohibent tout recours au travail forcé, au travail des enfants et aux pratiques discriminatoires et exigent le plein respect de la liberté d’association et du droit de négociation collective.

En vertu de la nouvelle norme, les clients de la SFI sont également tenus de se conformer à une série d’autres normes de base, notamment en matière de santé et de sécurité et de protection de la main-d’œuvre contractuelle.

Elle exige en outre l’application d’une politique pour une gestion efficace des suppressions d’emplois.

« Cette décision est susceptible de joueur en faveur de milliers de travailleurs employés dans des projets financés par la SFI et devrait, nous en sommes convaincus, créer un précédent dans le domaine des prêts internationaux, aussi bien dans le secteur privé que public », a déclaré Guy Ryder, Secrétaire général de la CISL.

« Chaque année, la Banque mondiale octroie des prêts à hauteur de plusieurs milliards de dollars à des projets de développement et nous nous efforcerons de veiller à ce que cette décision s’applique à tous les échelons de ses activités. Pour l’heure, nous avons proposé de coopérer avec la SFI à la mise en œuvre de cette nouvelle norme », a-t-il ajouté.

Dans ce communiqué, la CISL met beaucoup l’accent sur la situation des ouvriers haïtiens en République dominicaine. La confédération affirme avoir formulé une proposition à la SFI qui a accepté d’intégrer, il y a deux ans, une clause liée aux NIT aux conditions de prêt imposées à la société dominicaine de confection Grupo M. 

Selon la CISL, le prêt en question était destiné à l’ouverture d’une nouvelle unité de production en Haïti. La réaction initiale de la société lorsque les travailleurs ont tenté de mettre sur pied un syndicat fut de les congédier par centaines.

Il a fallu plusieurs mois d’action collective par le syndicat haïtien et une mobilisation internationale de syndicats et autres organisations civiles avant que l’entreprise n’accepte de réintégrer les travailleurs mis à pied et de reconnaître le syndicat.

En décembre 2005, rappelle la confédération basée à Bruxelles, Grupo M et le syndicat haïtien ont signé le premier accord collectif prévoyant l’amélioration des salaires et des conditions de travail.

Dans le 15e numéro du Monde Syndical consacré à la situation des ouvrières et ouvriers haïtiens dans les zones franches d’exportation (ZFE) dominicaines et haïtiennes, la CISL exposait la réalité de l’exploitation et de la répression anti-syndicale, ainsi que la non syndicalisation dans ces ZFE.

« Licenciements à la pelle, augmentation des cadences, poussée d’hostilité antisyndicale parfois violente... le modèle des zones franches dominicaines bat de l’aile, tout en se délocalisant vers Haïti pour cause de salaires encore moins chers », souligne la CISL dans sa publication du mois de novembre 2005.

Dans sa livraison de ce 22 février, la Confédération internationale des syndicats libres indique que l’exemple haïtien illustre bien les difficultés, de même que les possibilités engendrées par la nouvelle norme de la SFI et, plus particulièrement, le fait qu’il est primordial de pouvoir disposer d’une procédure d’application efficace.

Une norme NIT s’appuyant sur un mécanisme efficace de mise en œuvre est susceptible d’avoir une incidence très positive sur les conditions de vie et de travail des travailleurs. Ceci est particulièrement vrai dans le cas d’un pays comme Haïti où les droits des travailleurs ont été bafoués et les pauvres marginalisés depuis si longtemps.

Le Secrétaire général de la CISL estime que c’est désormais aux autres filiales de la Banque mondiale, à savoir les filiales chargées des prêts au secteur public, qu’il incombe d’emboîter le pas à la SFI.

« Il ne s’agit pas de demander à la Banque d’assumer les tâches de l’OIT, des gouvernements ou de qui que ce soit d’autre. Il s’agit simplement de demander à la Banque de veiller à ce que toutes ses opérations soient conformes aux normes sur les droits des travailleurs reconnues à l’échelon international », affirme Guy Ryder

La CISL représente 155 millions de travailleurs dans 236 organisations affiliées dans 154 pays et territoires. [do gp apr 24/02/2006 06 :50]