Débat
Par Gester Faustin
Soumis à AlterPresse le 10 février 2006
La démocratie est à l’œuvre en Haïti. Tel semble être l’aveu tant implicite qu’explicite de maints observateurs mobilisés pour le grand rendez-vous démocratique haïtien du 7 février dernier. Ces élections si attendues mais tellement redoutées ont, finalement, eu lieu et, de surcroît, avec l’empreinte massive de la caution populaire. En effet la surenchère médiatique de la psychose insécuritaire se la disputait férocement à l’impatience de tout un peuple otage de l’incurie politico-sociale. Heureusement l’espoir cultivé depuis tant d’années l’emporte sur tout et malgré tout au point que « l’exotisme pathétique » dont Haïti manque rarement l’occasion de gâter l’objectif habitué des caméras à sensation aura été très peu rentable pour certains médias étrangers. Et, pour cause, c’est avec une ferveur en demi-teinte, qu’est relayée la démonstration solennelle du peuple haïtien quant à sa détermination courageuse en faveur de l’avènement d’une société haïtienne réellement démocratique.
En réalité, les revendications populaires ne demandent qu’à être satisfaites loin de toute agitation populiste si bien qu’aucune bravoure n’a été actionnée pour plébisciter, avant l’heure, un quelconque favori. Le respect civique et citoyen de la discipline électorale s’est magistralement imposé. Le CEP, la PNH et la Minustah ne peuvent que s’en réjouir. Le peuple a honoré sa part du contrat civique et politique. Que son choix soit respecté !
Le peuple ne commande pas, le peuple délègue. Comme si, désormais, il s’était fait une raison, le peuple semble comprendre la nécessité de se conformer à ce principe de la réalité politique qui se révèle une évidence institutionnelle. Plus besoin de crier informellement victoire, il suffit que celle-ci s’impose dans les règles légales du jeu politique. A la classe politique de se monter à la hauteur de la mutation politique en cours. Car il n’est non plus question de faire marche arrière. L’avenir est à conquérir dans ce qu’il a de mieux à offrir pour le bonheur de chaque Haïtien. Il est là l’enjeu de la mutation dans la conquête de l’exercice du pouvoir. Un pouvoir à déprendre de tout traditionalisme paralysant pour, au contraire, l’inscrire dans la dynamique de l’innovation démocratique.
L’amorce de ce tournant décisif qui laisse augurer la probabilité accrue d’une véritable stabilisation politique du pays haïtien est le signe à la fois d’une crédibilisation de l’instance électorale qui de provisoire doit évoluer pour être une institution permanente afin d’asseoir davantage son autorité, de la nécessité de l’affirmation de la police nationale en tant que garant de l’ordre public et enfin de l’indispensable coopération solidaire de la communauté internationale dans l’intelligence des valeurs démocratiques. De plus, la compétition démocratique qui encourage le pluralisme politique n’enseigne pas moins que le regroupement en diverses plateformes électoralistes atteste la stricte nécessité, pour les partis politiques, de mieux se rassembler afin d’éviter l’éparpillement des voix électives et la dispersion des idéologies politiques communes. La pratique politique gagnera, dès lors, à se préserver de toute confusion des idéologies d’autant que les formations politiques se soumettent à une plus grande rationalisation tant structurelle qu’idéologique même.