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Haiti : La coupe déborde ....

Débat

Par Rachelle Charlier Doucet

Soumis à AlterPresse le 19 janvier 2006

Les humiliations qui nous sont infligées, chez nous, et à l’extérieur d’Haïti ne se comptent plus. Je me contenterai, ici, de dénoncer les plus récentes qui nous viennent de la MINUSTAH [1] et de l’ONU.

Concernant l’épineux problème de cette force multinationale d’occupation qui ne dit pas son nom, les avis peuvent être partagés sur le bien-fondé de sa présence (actuelle et future) sur notre territoire. Cependant tout observateur impartial sur le terrain, tout en reconnaissant la complexité et la difficulté de la tâche à accomplir, ne pourrait que lui délivrer un “non-satisfecit†. Car en 18 mois de “pacification†, les résultats obtenus par cette force hétéroclite sont bien maigres ... n’en déplaise à Messieurs Valdes et Insulza.

Hier, à une émission de Radio Canada j’ai entendu le chef de la MINUSTAH en Haïti, M. Juan Gabriel Valdes avancer que les élections sont un préalable au désarmement des gangs et autres bandes armées. Selon le distingué chilien, seul un gouvernment haïtien légitime peut avoir du succès dans une telle entreprise. Alors, “messieurs-dames la société†, à bon entendeur, salut ! Comprenez cette logique si le vous pouvez, moi j’avoue y perdre mon latin. C’était la même logique qui faisait dire aux représentants de l’ONU, au tout début, que la population haïtienne devait attendre que les effectifs onusiens soient au complet avant qu’elle ne puisse bénéficier d’une protection efficace de la force dite de “maintien de la paix†. Les effectifs aujourd’hui dépassent 7,000 hommes, quels résultats, quelle protection pour les victimes, toutes classes sociales confondues ?

Et pour comble d’indécence, selon une note que je viens de lire dans le Nouvellliste (“Actualité en question†du 16 janvier), le Secrétaire général de l’ONU, M. Koffi Annan “demande au gouvernement haïtien de condamner publiquement une prétendue campagne de dénigrement que des secteurs de la population auraient menée contre la MINUSTAH et son chef en Haiti, le chilien Juan Gabriel Valdes†. Hier des flèches empoisonnées contre la presse, aujourd’hui le fouet pour la population dans son ensemble. On se croirait 200 ans en arrière, aux temps des commandeurs. Je préfère m’abstenir de commenter davantage une demande aussi insultante et grotesque.

Je voudrais plutôt adresser une requête au gouvernement haïtien. En tant que citoyenne haïtienne viscéralement attachée à cette Haïti mal-aimée, trop souvent bafouée par ses propres enfants, j’ose espérer que ce gouvernement sourd-muet, affligé de carences énormes en diginité et vision, ne s’empressera pas d’obtempérer, forçant ainsi la nation à courber l’échine avec lui.

Aujourd’hui, notre présent lamentable dément notre passé héroique. Misère, injustice, impunité, polarisation extrême, haine, violence, perte de valeurs, perte de notre dignité humaine et de notre fierté de peuple, sont autant d’abcès qui nous crèvent au visage. Mais, pour hideux et effrayant qu’il soit, ce présent ne doit pas nous emprisonner dans un sentiment d’impuissance. Au contraire, il doit nous stimuler à construire, ensemble, un futur meilleur pour notre pays. Resssaisis-toi, Haïti. Reprends confiance en toi et prends en main ton destin.

La coupe déborde, HAITI.


[1NDLR : Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haiti