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HaitiWebdo numéro 65

Quelques aspects de la communication durant la campagne pour les élections de février 2006 en Haiti

La campagne électorale en vue des élections prévues pour le 7 février 2006 est longue. Programmée pour durer environ un mois, elle devra durer autour de 4 mois, en raison de multiples reports du premier tour du scrutin présidentiel et législatif.

La longueur de la campagne est-elle synonyme de richesse en terme de communication ?

QUELQUES ASPECTS DE LA COMMUNICATION DURANT LA CAMPAGNE POUR LES ELECTIONS DE FEVRIER 2006 EN HAITI

Des spots électoraux affluent sur les ondes des stations de radio et de télévision de la capitale et des villes de province depuis le lancement, en octobre 2005, de la campagne pour les prochaines élections, nouvellement fixées au 7 février 2006.

Les appréhensions de certains partis politiques quant à la possibilité de réalisation effective de ces consultations dans le délai arrêté, n’ont en rien entamé l’ardeur de bon nombre de candidats dans l’utilisation systématique de médias pour tenter de gagner des voix lors du prochain scrutin.

La radio est, de loin, la plus utilisée, ce média étant le moyen de communication le plus puissant de l’espace médiatique haïtien, à cause de la configuration socio-économique d’Haïti, dominée par la pauvreté, l’analphabétisme et très peu d’accès à l’électricité.

Des candidats, partis ou regroupements politiques font diffuser en rotation à la radio 2 ou même 3 spots différents. C’est notamment le cas de la plate-forme Lespwa (L’espoir), ayant pour candidat à la présidence, l’ancien chef d’Etat lavalas René Préval, ou du candidat indépendant Charles Henri Baker, supporté notamment par le parti Combite pour Rebatir Haiti (KONBA).

De pleines pages (parfois doubles) sont payées également dans les deux principaux quotidiens Le Nouvelliste et Le Matin.

Parallèlement, les secteurs politiques ne négligent pas des symboles, mis en relief sur des banderoles et photos posées partout à Port-au-Prince au mépris des règles admises en matière de l’affichage. Les murs des résidences et institutions privées et publiques sont quasiment inondés de posters de diverses dimensions. Les pylônes électriques ne sont pas épargnés.

Quelquefois, des photos d’un candidat remplacent celles d’un autre concurrent, des posters sont déchirés ou rayés à l’aide de peinture forte.

Au niveau du discours, les propos ou slogans tentent, évidemment, d’être plus captivants les uns que les autres en vue d’attirer la sympathie des électeurs et électrices.

L’Alliance Démocratique du candidat à la présidence Evans Paul se présente comme le « Chwal batay pèp la » (poulain du peuple). Son symbole est un cheval. A l’occasion, le candidat ne manque pas d’insister, par exemple, sur le fait que « le cheval atteint des lieux inaccessibles au camion ».

Captant l’allusion faite à son symbole (un camion), le candidat Baker rétorque que « le cheval ne peut transporter que deux personnes, alors que dans le camion, il y a de la place pour tout le monde ».

En outre, jouant sur le code numérique qui lui a été attribué (44) Baker avance que son camion est un 4X4. Mais 10 (le code numérique de Paul), est la note des « bons élèves », disent les animateurs de campagne du candidat, pointant du doigt les « mauvais élèves » qui ne récoltent que des « 1 ».

Mais 1 est le numéro de code de Préval, et ses partisans pensent plutôt que ce chiffre tombe juste, car il anticiperait « la situation qui va se présenter au lendemain des élections ».

Avec ses « trois feuilles » comme symbole, le secteur de Préval se présente comme le remède à la situation actuelle. « Votez Lespwa et restez calme », dit un spot.

Mais, en rapport aux « trois feuilles », Baker lance la formule suivante : « Fumez-les, et puis du calme ». Allusion voilée à la drogue.

D’autre part, l’Organisation du Peuple en Lutte (OPL) fait sonner le « tambour du rassemblement ». Les partisans de l’OPL rappellent que l’emblème du parti (un tambour) est historiquement l’instrument utilisé pour appeler au ralliement des populations partout à travers le pays.

Les sociaux démocrates entendent « fusionner » le pays autour de la Fusion, parti qui est la résultante de trois organisations politiques. « Avec Fusion, pas d’exclusion », répète le candidat à la présidence Serge Gilles, dont les propos sont relayés par un jingle.

Le Mouvement Chrétien pour une Nouvelle Haïti (MOCHRENHA) se considère comme un « choix divin ».

L’Union pour Haïti (UNION), formée du Mouvement pour l’Instauration de la Démocratie en Haïti (MIDH), de Marc Bazin, et de Fanmi Lavalas, de l’ancien Chef d’Etat Jean Bertrand Aristide, se veut un exemple de « réconciliation ». Bazin, qui représente le regroupement aux prochaines présidentielles, était le principal concurrent d’Aristide aux élections de 1990 et premier ministre durant le coup d’Etat militaire de septembre 1991, qui avait renversé Aristide.

La campagne électorale doit encore durer environ 3 semaines. Il n’est pas certain qu’une quelconque surprise pourrait être attendue durant les prochains jours, ou bien avant le deuxième tour, fixé au 19 mars.

Durant cette campagne, l’accent n’est nullement porté sur la philosophie ou l’idéologie prônées par les divers partis, ce qui donne l’impression qu’ici, les options s’entrecroisent et que les propositions sont quasi interchangeables.